Good bye Grigry
25 octobre 2010, le Cool Ruler s’en est allé.
Dandy du Ghetto, voix de miel et mélodie au sirop, trop facile pour ce monsieur, Gregory Isaacs était aussi formidable qu’un Frank Sinatra, "même pas peur de l’dire", personnage compliqué, fruit de son univers.
Oh pas un d’ces peigne-zizis qui se lèvent un matin en décrétant qui vont devenir le Boss du quartier en bousculant les tites vieilles et en regardant de haut l’toubabzi qui s’en va au boulot, niet, juste le produit d’son Ghetto, çui qu’pas un connard mettra à l’amende, çui qui s’demerdera pour vivre dans son univers, sans forcément faire chier son voisin, mais surtout sans se faire emmerder par quiconque !
La carrière du Cool Ruler, c’est au moins un millier de chansons, une tapée d’albums et pas moins d’une tour Eiffel de singles. Un truc langoureux, des fois trop, Lover qu'il appelait ça, plus supposé faire frétiller les d’moiselles que tortiller les Rude Boys et pourtant Rude Bwoy, Gregory Isaacs en était bien un !
Comme un Sinatra, not’ Dandy du Bidon ville en a croisé des macchabées, tout comme ceux qui les ont flingués, Réalité, quelques heures dans un studio a chanter les douceurs de la vie, de la fraternité et du respect, avant de sortir, encadré de mecs en armes, le studio Channel 1 était alors au centre de ce carnage, les artistes, aimés et souvent très respectés des Dons passaient entre les balles, enfin, ceux qui n’insistaient pas trop, ne prenaient pas trop partie parc’que sinon, là aussi la liste est longue…La carrière du Cool Ruler c’était ça, tout comme celle d’un Sinatra, mais dans un Ghetto Jamaïcain, au milieu des montagnes de déchets, des rues barrées et des coups de flingues, Smile Jamaica, le slogan a été inventé par des gens qui vivaient l’horreur, pour en sortir, pas pour définir une île où s’qui fait bon de faire bronzer les arpions en éventail, 1970/80, des milliers de morts, des types qu’ont jamais rien d’mandés, juste qui vivent dans la moitié du Ghetto contrôlé par tel ou tel parti "politrick".
L’homme Grigry s’était pas qu’un chanteur à minettes, pas qu’un marchand d’sirop sur rythm chaloupés, au virage de nombre de ses chansons, aussi cul-cul qu’elles puissent paraît’, la condition de l’homme Noir, le respect de l’Individu, la douleur d’un Peuple se faufil en loucedé, une remise en question de tous aussi, à chacun de comprendre, c’est plus compliqué qu’du serrurier noir, surtout plus fin.
Avec le départ de Monsieur Gregory Isaacs c’est pas qu’une voix qui disparaît, c’est toute une époque où les artistes, même si pas toujours aux mains propres, chantaient pour leur peuple, pour élever les esprits, soigner ses maux, savait aussi soigner leurs mots, que le message ne se transforme jamais en slogan pour idiots bêtes révoltés, comme prétexte à trouver plus moche que soi.
L’homme Gregory était un poète, conteur de la vie et de ces turpitudes, même sous un soleil écrasant ou près d’une eau poissonneuse. Un putain d’poète, un morceau d’chanteur et un sacré lascar.
Je fini c’papier avec un léger sourire, à l’heure qu’il est je le sais, y’a au moins un ami, même si je suis sûr qu’ils sont plus nombreux, qui l’aura accueilli, pour de nouvelles aventures…
Sing Gregrory Sing !
7red
Ça merdouille un peu avec une photo qui cache une partie du texte. Mais super article. Merci !
RépondreSupprimerJe l'ai découvert dans le film "rockers" début 80. Avec son interprétation de "Slave Master" et ce refrain : "I'm gonna get plantation in fire" dont je me rappelle encore.
RépondreSupprimerVraiment génial, ce passage du film. Un grand chanteur.
Il était devenu accro au dernier degré, il se faisait même plus créditer quand il faisait des sessions pour les autres, suffisait de lui filer un peu de blanche ou de quoi l'acheter au coin de la rue, et il était content ...
RépondreSupprimerIl a gardé malgré cette hygiène de vie sa voix pratiquement intacte jusqu'à la fin ...