mardi 29 mai 2018

ViV ALBeRTiNe, CoNFeSsioNS d'uNe MiLF



De fringues, de musique et de mecs annonce avec frivolité le menu du livre de Viv Albertine, et il en est question. Souvent par l'absence et le manque. 
Française de par un père instable, farouche de par une mère livrée à elle-même, sœur ainée et protectrice, pour toutes ces raisons et une dizaine d'autres, elle est d'un tempérament qui ne lâche rien, préférant régulièrement abandonner la partie en cours plutôt que la jouer selon d'autres règles que les siennes. Qu'il s'agisse de musique ou de cours d'aérobic.

Avant d'être de ceux qui ont enfanté le punk, Viv Albertine est une adolescente des sixties, de celles qui à Hyde Park pleurent Brian Jones, idolâtrent John Lennon et voit en Yoko Ono un exemple non conventionnel d'intelligence et de philosophie de vie. Enfin, Yoko Ono, influence évidente pour bon nombre des femmes de cette génération, est revendiquée haut et fort. Enfin, le lien entre le mouvement hippie et le mouvement punk n'est ni bêtement ostracisé, ni renié. Enfin, l'honnêteté prime sur la gloriole. Ce livre est celui d'une femme dans toute sa complexité, qui veut séduire sans gommer ses aspérités, le trajet heurté d'une vie qui s'écrit au jour le jour au fil des intuitions, abordée à corps perdu sans attendre de vaines certitudes.


Viv Albertine délaisse toute notion d'intimité, livre pensées et faits, qu'ils soient à son avantage ou pas. Elle se montre parfois tyrannique, n'évoque les autres qu'avec parcimonie, sans chercher à rendre les disparus plus précieux, sans amoindrir ceux qui ont compté, Sid Vicious, Malcolm McLaren, et pour certains comptent encore, Keith Levene et bien sur Mick Jones, l'amour de sa vie, l'ami qui sait être là seulement lorsqu'il peut être utile. Aussi précieux que souvent absent, jamais revanchard. Autant de personnalités dont elle a su apprendre, se tenant en retrait en attendant son heure. Parce que l'on n'apprend rien de ceux que l'on précède.


Les Slits sont une étape parmi de nombreuses autres, le récit ne focalise pas sur le groupe, il occupe dans le livre la place qui fut la sienne dans la vie de sa guitariste. Ari Up n'en sort pas béatifiée, leurs rapports sont racontés avec une justesse que la perte n'émousse pas. Tant mieux, les commémorations me font fuir tant elles sont devenues mercantiles. Viv Albertine a suffisamment affronté de coups durs, jusque dans sa chair, pour n'avoir pas de temps à consacrer à ça. N'imaginez pas vous promener au milieu d'un name dropping permanent, loin de là. Joe Strummer n'est évoqué que le temps d'une proposition d'adultère dans le dos de son guitariste, après quoi on comprend qu'il n'en soit plus question, tout comme Steve Jones qui lui aurait préféré se faire sucer. Au lieu de quoi, les rencontres anonymes se font saisissantes tant ce sont elles qui conduisent finalement une vie, bien plus que les moments hauts en couleurs qui se fanent dans les souvenirs comme s'éteint dans les rétines, l'éblouissement d'un flash.



Sans trash tapageur, sans situation ubuesque pour l'épate, chaque page nous mène haletants jusqu'à la suivante, sans temps morts, même lorsque la vie s'immobilise en équilibre précaire, lorsque les épreuves se font douleurs intimes, lorsque l'on souhaiterait qu'un brin de glamour vienne soulager de tout ce sang qui se déverse. Mais depuis quand la vie est-elle glamour ? Pour autant, le livre est lumineux, il se dévore en une poignée de jours. Il exprime les sentiments d'une artiste réellement originale qui n'a jamais connu la gloire, ni même vraiment le succès, et qui ne s'en soucie pas. Surtout, plus qu'il ne s'adresse aux jeunes filles d'aujourd'hui, ce livre parle aux hommes d'hier, que nous sommes, il nous offre la possibilité de savoir enfin ce qui se cachait derrière les regards silencieux de celles que nous avons croisé sans en apprendre grand chose. Faute d'avoir su tomber cette carapace, dont Viv Albertine ne s'encombre pas dans le choix de ses mots.


Hugo Spanky




mardi 22 mai 2018

GiMMe mi GuN, PLeaSe


Je suis né dans la rue pour saluer mon arrivée, White rabbit pour m'accompagner dans les rayons, il y a plus d'esprit rebelle dans le Monoprix de mon quartier que de pertinence dans les chanteurs en vogue du moment. Divertissement même plus divertissant, plus névrotique qu'un moustique durant la quête du sommeil. Les gonzes n'ont même pas le talent minimum requis pour camoufler qu'ils sont seulement là pour racketter les lardfeuilles, sans doute pour ça qu'ils tiennent tant à ce qu'on lève les mains en l'air. Les bons sentiments pleins de vide ne suffisent pas pour ne froisser personne. La preuve par 7red :


On Fait le Show

Des mois que tous les jours y faut se fader cette merde, On Fait le Show, tous les jours et même plusieurs fois par jour, la moitié d’l’atelier résonne de cette merde, j’ai même vu de braves cons payés 1096.00€ par mois reprendre ça en chœurs, bras au ciel, une Horreur !!
Tous les jours j’entends cette merde oui mais, en toute honnêteté, c’est qu’avant-hier que j’ai pris le temps d’écouter les paroles, et là Bim, ça passe pas !!

Extrait !
« Je chante pour allumer ces bougies qu'on a laissées dans le noir »
T’as pas d’briquet connard !
« J'suis entouré d'étoiles pour que tu te sentes comme sur un nuage »
Moi aussi, on appelle ça des ouvriers, essaye !!
Je vous passe les Hey Hey, veut rien dire …
« Contre ces mauvaises nouvelles qui se répètent...
Ces horreurs qui tapent à nos portes sans cesse
Cette boule au ventre qui nous empêche de vivre, oui comme on le souhaite 
»
Alors là je dis colère, mais pour qui se prennent ces pales enculés ?
Z’ont une boule au ventre quotidienne eux, vivent pas comme y souhaitent, mais pourquoi  t-il donc ?
Difficulté d’logement, difficultés pour remplir l’caddy d’course, emmerdés par les grèves d’la SeuNeuCeuFeu ? Emmerdés par leur contremaitre ou la prochaine délocalisation d’leur boutique, pas pouvoir les cadeaux des gosses à noël ou passer les prochaines vacances devant une carte postale ?


Qu’est-ce qu’ils veulent nous faire croire ? Qu’ils s’raient plus proches de m’sieur tool monde que les aut’ crèves de l’élysée ? Sales cons, ça s’permet de vivre depuis plus d’25 ans sur le dos de ceux qui sont dans la mouise, qu’arrivent même plus ou qui n’ont plus envie de chercher d’quoi bouffer !
« Je danse pour t'envoler loin de la pesanteur du quotidien »
Sorry ça fonctionne pas ton truc !
« Je te chante mes peines pour que tu te sentes moins seul dans ton chagrin »
Cherche vraiment à t’faire traiter là ! Qu’est-ce qu’on en a à foutre de tes peines, paye toi un psy connard, t’as les moyens, et puis ne t’imagine pas, mais alors surtout pas que tu puisses apporter quelque chose, ton empathie d’merde tu peux t’la coller, t’es rien toi !!
 « Et je partage mes fous rires pour que tes larmes soient enfin sucrées »
Qu’est-c’qu’on s’en bat les noix d’tes fous rires, con d’tes morts, nos larmes ont plus valeur que ta fortune, c’est un extrait d’la vie, la vraie !
« Je te confie mes rêves, mes doutes, mes espoirs pour l'éternité »
Rien à fout’ ! T’s’rais pas du genre à téléphoner pour donner d’tes nouvelles, apprend donc plutôt à t’intéresser aux gens autour de toi, ça rend humble et pour le coup t’auras p’t’êt’ de quoi ficeler une vraie bonne chanson !
« Ces horreurs qui tapent à nos portes sans cesse
Cette boule au ventre qui nous empêche de vivre, oui comme on le souhaite
»
« Nous on fait le show
Avec le visage ensoleillé
On fait le show
Main dans la main pour faire rêver
»
Sincèr’ment, ton visage ensoleillé, tes potes qui gloussent comme des dindes et ta pseudo consternation face aux horreurs du monde… Putain, mais qu’est-ce qu’on a fait mal pour mériter ça ?
Y’a vraiment du monde pour supporter ces glands ? Quarante connards dans un studio ou sur une scène, sur les ondes radio, z’imaginez les quantités d’façons de ramasser du flouze, de faire bouger une situation qui n’a que trop durée ? 


Peut pas vraiment dresser une liste de tout c’qui cloche, mais sincèr’ment qui est assez trompé pour s’imaginer que ces chansons à la con vont soulager l’quotidien d’la mère célibataire qui essaye de faire grandir proprement ces cons chiards dans un univers aussi glauque, de r’fout’ un coup d’boost au brave gars qui bosse depuis 40 piges et qui voit son taf ou son entreprise se barrer en sucette, ces retraités qui vivent, tant bien qu’mal avec 800.00€ par mois, ces mômes qui, sans un peu d’magouille, ne décolleront jamais d’chez leurs parents, ces éleveurs/agriculteurs qui s’emmerdent à nourrir une nation qui trouve encore, au XXI eme siècle, que c’est cool de manger Mc Do, j’arrête là ça m’fatigue !

La misère prolifère, la peur du lendemain prolifère, les armes à feu prolifère, le communautarisme prolifère, la peur, tout court, prolifère et y’a des glandus pour chanter en cœur comme un nid d’moutons qui partent à l’abattoir. Une fois qu’on a enlevé les quelques actions, souvent personnelles et éphémères, y’s’passe rien. On s’contente de vivre du bon côté d’la rue, on achète cette merde et rempli les zéniths, on s’applaudit, et comme ces crevards vous le chantent, Pourvu qu’ça dure, tu m’étonnes.  On fait le show !


Pendant c’temps là, depuis maint’nant plusieurs mois, Junior Goebbles assure tranquillement son European Tour, alliant, reliant tous les partis d’extrême droite, préparant leur nuit des longs couteaux bis, profitant de ce que les peuples se contentent d’acheter un CD, manifester une fois par an, marcher dans les clous ou chanter en cœur qu’ils font le show au lieu de soigner leurs maux, au lieu de se révolter, ou au moins de trouver les choses dégueulasses, mais non, ça chante en cœur, les bras au ciel, Merde, Gimmie mi gun !! 

7red