dimanche 27 janvier 2013

eL eSTaDo De La coSas



Titre du second et je le pense superbe album de Kortatu, mais c’est pas le sujet, même si…Encore une fois, encore et toujours les mêmes questions, c’est dans quel monde de tordus qu’on vit ?

Y’a rien à faire, pas moyen de se retrouver dans ce qui se fait, ce qui existe, ce qui se dit aujourd’hui, mais en toute honnêteté c’était déjà un peu l’cas y’a maint’nant tout ça d’temps …P’t’êt’ juste une incompatibilité à la vie sociale, aux mœurs et tout l’toutim.
C’est toujours un peu l’même bordel, j’entends des trucs qui me plaisent mais ne sont jamais suivi du geste, des fois pire !! Erreur de la création, on a dû me coller là où s’qui fallait pas ou tout simplement l’aurait mieux valu éviter d’m’y coller tout court !
On m’l’a suffisamment répété c’est qu’ça d’vait pas êt’ complètement faux !


Plus ça va et plus c’est pire, comme le type qui arrive dans une soirée où s’qu’on l’a pas vraiment convié, juste l’était là au moment des invites mais l’est en trop dans l’schéma !

V’là qu’on vient d’boucler 2012 et j’ai l’impression de vivre pire qu’y à 40 ans, au moins y’avait la découverte du lend’main alors que là je sais par avance ce qui va arriver, et promis, je n’ai aucun don de vision ou aut’, juste une putain d’mémoire !


Moi qui suis tout sauf un grand nageur j’ai l’sentiment d’baigner tous les jours dans l’grand bain d’l’hypocrisie, mais de là à dire que c’est la faute des aut’, trop facile, alors j’essaie mais sincèr’ment, j’bois la tasse !



Les collègues vous l’diront je n’suis pas reconnu pour mon sens profond de la démocratie, citant généreusement les bienfaits du Stalinisme, sans aucune retenue puisque je serais forcément le premier a êt’ transféré dans une usine à glaçon avec mon piolet et des tits batons en cartouchière pour fabriquer des miko loin là bas en Sibérie.



 J’essaie, même si j’aime pas ça. J’ai mon compte sur face de book, mais pas vraiment grand chose à y dire, just des Clasheries en partage, conserver les liens avec les gars touchés par Ranx à l’époque sur Mon Spasm, toujours l’idée qu’y s’rait pas désagréab’ de vider quelques bouteilles en leur compagnie mais pour le reste …


Toujours ce putain d’décalage, j’aime pas trop ce truc de com, lu en retard ou complètement incompris, en fait y’a tellement pas moyen d’avoir une vraie conversation, un véritab’ échange que la moquerie ou le second degré tombe fissa à la baille, sans parler des trous du cul qu’on inventés l’monde, faiseurs de phrases en tout genre, si sûr de leur connerie que personnellement, j’aurais comme un malin plaisir de me les tenir dans une pièce close en vis à vis, les écouter, un peu, avant de les tabasser, beaucoup !
C’est p’êt’ là qu’le bas blesse, l’apôtre du socialisme équipé kalachnikov et camps d’redress’ment qui s’offusque de ces gentils bien pensant tellement plus fachos qu’la moyenne nationale.




Je Hais, y’a pas d’aut’ mot, je hais ce nid d’couilles molles bien pensant, les j’suis sûr, j’suis du bon coté, j’suis l’gentil aux idées humanistes, confinés en tit noyau bien réduis, club bien fermé où surtout aucune contradiction n’est tolérée, de toute façon ceux qui penseraient pas pareil ne sont que des cons, beaufs réacs et tout, eux seuls ont les clefs d’un monde meilleur.
Ouais, bien enfermés dans une grande salle, et qu’on y foute le feu !!

A y est, j’suis chaud et dans l’ton d’mon papier !


 


Beaucoup (trop) de Liberté !

 

Y s’passe tellement plus rien, y’a plus d’colère, moteur essentiel au mouvement, du coup ça stagne sur son cul, à dégueuler d’autosuffisance, chacun son bord, on tourne le dos à l’aut’ sous l’simple prétexte qui dit pas amen en chœur, la dictature du plus grand nombre !!
 



  Mondo Bongo

Les Pussy Riot ont fait s’émouvoir tout ce beau monde, réinventant le Punk Rock loin là bas derrière le mur qu’existe plus, quel malheur, manque de liberté…Alors que part chez nous c’est nos mômes qu’écoutent Nos disques, on les emmènent aux concerts et va même les y rechercher. Rock, juste un label pour vendre des portables ou des sacs d’écoliers. Forcément quand on a que les BB Prunes avec les ch’veux d’vant les yeux pour emballer « une partie d’ la jeunesse »

 
D’un simple échange d’idées, d’avis, sur face de book, un collègue se faisait y’a pas si longtemps traiter de facho. Le sujet, la nouvelle rédac chef des inRockuptib’ !
Tristesse, déjà d’attendre quelque chose de ce magazine de putes à frange, puis tout simplement de se faire insulter parc’que ton avis de va pas dans le bon sens de l’histoire. « Comment ça ? », « t’es pas d’accord avec ce qui est dit ? », Facho !


Et c’est bien là qu’ça fait sérieusement mal, le terme n’est pas tout neuf, on l’a, je l’ai, bien souvent utilisé, mais jamais pour qualifié un ami ou même un personnage rencontré là et avec qui y’a jamais eu un accord sur un sujet.
Bien malin çui qui peut prétend’ avoir le d’ssous du nez plus propre que les aut’, et pourtant, v’là l’niveau, le club des « bien pensants », sign on the door said all full up! Tant mieux !! 


Things a’ going Bad to Worst 

Bien pire que fin 70 c’est sûr. On se contente médiocrement de c’qu’on a, ce qui pourrait êt’ compréhensib’ pour ceux qu’ont connu des jours moins brillants mais les mômes, assis sur leur cul, à attendre, sans jamais chercher à rien bousculer, aucune révolte en vue d’ce coté là, aucune envie non plus, une horreur.  
Il semblerait que ce magazine de putes à frange se retrouve aujourd’hui parachuté mètre étalon de la conscience, mes talons dans ta gueule ouais !
L’Expression n’est plus qu’un mot vide de sens, Inutile, artistik !


Tu peux coucher ton âme sur du papier, la coller sur une partition, personne n’en n’a plus rien à foutre.
Si j’écoute l’intégral de Daptone Records c’est pas pour c’que les mots me racontent, Sam Cooke ou billie Holiday le faisaient bien mieux d’leur temps, Clash ou Culture en 77, non c’est juste parc’que le Son me parle.


Ca va faire dix ans qu’oncle Joe a avalé sa rose, il m’est toujours plus quotidien que chaque jours de la semaine, mais j’ai rien fait, pas inventé de nouveaux Sons, inventé une autre façon d’exister, rien, je mène juste la même vie, bloqué quelque part fin 70 / début 80 et si y’a qu’les cons qui changent pas d’avis, par ici les médailles !
C’est pas qu’j’y crois encore, c’est juste que je vis avec ça « Me, J’ai pas l’Don », l’original !
Les jours passent et sont pratiquement tous porteurs de contrariété.
« Everybody want to go at de heaven, nobody want to die », la con science est sauve, un bulletin d’vote, un choix d’label alimentaire, une con sommation responsab’, un don annuel, une chaine de télé ou la Direction d’pensée d’un magasine culturelo-musical.
Les Majors tant conchiées devenues les branches souffreteuses de deux ou trois distributeurs internationaux de gel douche et autres conserves.

On a grandi au son du « Free Nelson Mandela », quand est-ce qu’on libère la Palestine, l’Irlande du nord ou le sud Finistère ?



Toujours pire, aujourd’hui on envoie des gars libérer le nord Mali de sales cons moyen-ageux, les mêmes qu’on armes quand ils sont dans les pays voisins, Tunisie, Libye, Syrie, See de Hypocrites see dem galong deh !! 
La normalité est qu’un Clown mort il y a plus de 25 ans nourrissent les ceux qu’ont faim, et encore une fois, malheureux, ne va pas r’met’ ça en question, « espèce de fach… ! »
Un peu de RSA, de Restaurant du Cœur, quelques colis d’un quelconque secours et une poignée d’allocations, grogne oui, mais en silence !

 More Dogs than Bones

 

 Ces putes au grand cœur qui poussent la chansonnette pour les crevards, posées à coté de leurs comptab’ dans leur apparts parisiens, y s’passe plus rien.
Soutien de la bonne conscience, artistes engagées, z’ont dû faire élire la bonté d’âme, la générosité, l’ouverture d’esprit et la justice sociale, l’aut’ couille molle de Mi-Molette quoi !
Dur de prendre position quand t’as la bouche pleine de ton patron, reste à chanter des histoires de pâq’rettes ou la tristesse de ta braguette mais surtout ne moufte pas !

On l’a d’jà vu, passer en une soirée électorale de Mon HLM qu’il était blême ou les pérégrinations pétaradantes d’un Gérard Lambert du coté d’Rungis à des Mistrals gagnant bien vendus mais vide de sens !!
Sous l’aut’ nain ça réclamait d’la loi Adopi mais prônait une conscience de gauche, sous l’aut’ rat-moli ça s’inquiète d’avoir à partager une partie d’ses rev’nus avec ces cons du peuple !
Ce même peuple qui, y’a 30 ans, leur avait construit des zéniths pour qu’ils ne se fatiguent pas trop, 2 dates par grandes villes et basta, quand même pas jouer une semaine entière, à pas cher, dans un théâtre pour des gens, tout con, tout simple !! 


Le monde change … la connerie persiste



Abdel a vécu dans la guitoune de chantier avant de « bénéficier » d’une piaule au foyer Sonacotra, il y a quelques semaines son petit fils passait fièrement devant les caméras parc’qu’avec les collègues de la cité y z’avaient virés les Roms installés sur le parking voisin, miracle de l’intégration ou dupont la joie shoot again ?

Racisme, communautarisme et j’sais pas trop encore quelles aut’ merdes qui finissent toute en isme à tous les étages, j’vois plus qu’ça, la Peur !

Si je ne suis en aucune façon raciste ce n’est pas parc’que plus intelligent que la moyenne ou plus généreux non, c’est juste parc’que je connais le truc par cœur . Trop d’la cité pour mes potes Jean François des pavillons, j’étais aussi trop Petit Français pour mes collègues de la cité, durant ces années où l’individu se construit et la conscience avec, il m’était beaucoup plus difficile de traverser ma ville que de traînailler sur paris où, les tournées de gifles avec des méchants étaient bien plus rares qu’avec les types avec qui j’ai grandi.



La bande à Margerin me manque, original nid d’affreux sortit de nul part et avec nul par où aller. Ne pas choisir ta compagnie, surtout pas, ça montre les dents, bouscule ou chari mais ça marche d’un bloc, de toute façon pas assez nombreux pour blaser personne. Je suis un contemporain de La Souris Déglinguée, l’Infanterie Sauvage, R.A.S, Wunderbach, Cadavres et autres Kremlin Kontingent, j’ai arpenté des kilomèt’ de bitume avec tout ces lascars, de Colombes à Corbeil, d’Aubervilliers à Pantin, pris dans la poire les concerts du Citea ou de la ferme d’Ermerainville, les Sound Systems au théâtre du forum et les bastons d’regards à la Mutualité. 

 
Certains noms de groupes ou de types chocs quand tu mets un morceau sur la toile, j’les ai aimés tous ces groupes, tous ces types, font partis d’ma vie, d’mon histoire, l’histoire revisitée par les absents, y’avait les traînes lattes d’avant 84 et, faut croire, les Rockers subventionnés et bien encartés, après.



       Droit d’inventer

Je lisais dans l’dernier numéro d’ Mojo encore un triste papier sur Joe Strummer, depuis le film de l’aut’ couille c’est comme devenu un genre, exercer son droit d’inventaire !
Joe Strummer se donnait-il un genre, c’était pas un vrai cockney estampillé, sa révolte … Tas d’connards !
Quiconque a vu le Joe sur scène ou backstage, avec le Clash, les Rockabilly War ou les Mescaleros le sait, quiconque l’a croisé dans la rue, le métro ou un disquaire le sait, ce type était un concentré d’être humain, de générosité, avec la bonne couche de connerie que trimbale tout un chacun, mais jamais il n’a blasé personne ni fait de fausses manières, sinon Clash existerait probablement toujours !


Est-ce qu’il a inventé sa vie, oui, en tout cas j’lui souhaite, comme à chacun, comme moua et même pas honte. Je fais avec ce que j’ai, de là où j’suis parti et, sans jamais avoir chié sur personne. Ça va, j’m’en suis pas trop mal sorti. J’voulais pas aller au LEP de fond’rie, alors j’me suis démerdé. J’ai inventé mon monde, mes codes, me suis rattrapé à ce seul truc que j’avais pour grandir, ma musique, la musique. 

Mon existence ne se résume, je l’ai vu au dernier déménag’ment, qu’à des carton d’disques, mes Précieux et tous les souvenirs qui vont avec !!

Est-ce que Vincent Eugene Craddock à inventé Gene Vincent, est-ce que Richard Penniman a inventé Little Richard, est-ce que Winston Hubert McIntosh a inventé Peter Tosh, est-ce que Philippe Fragione a inventé Akhenaton, est-ce que Carlton Douglas Ridenhour a inventé Chuck D, est-ce que John Mellor a inventé Joe Strummer ? Est-ce qu’on aurait eu grand chose à partager avec un fils d’employé diplomatique ?
Est-ce que de joyeux gredins à demi rempli auraient inventé un soir Ranx Ze Vox ?
De quoi est-ce qu’on aurait pu vous parler, qu’est-ce qu’on aurait pu partager, nos journées à l’usine ? 


Je souhaite à tous les gosses aujourd’hui d’avoir un onc’ Joe, un Chuck D, un Peter Tosh ou AKH pour les sortir d’la torpeur, les faire se poser quelques questions et s’engager, même si dans tout et n’importe quoi mais s’engager, tenir une position, rester loin de notre dame de la fatalité et d’la pensée du plus grand nombre « SafetyIn Numbers », faire leur vie, s’l’inventer.


Les uns écoutent du Punk Rock pour justifier d’élever des clebs et boire de la mauvaise bière, d’autres du Reggae Roots pour s’avachir la boite à penser à la weed bien grasse ou du Hip Hop, malheureusement bien trop souvent de merde, pour tenir leur rôle de « racaille » et aut’ pseudo représentation.
La cinquantaine montre le bout du pif, Punk, Rocker, Rude Bwoy, d’la merde en vérité, juste un 7red, toujours pas d’Rolex en vue, juste mes yeux, mes oreilles et ma boite à penser, qui marche p’t’êt’ pas toujours bien droit mais qui m’tient d’bout, dans l’sens de la marche, vraiment pas l’sentiment d’avoir raté ma vie. Elle est bien pleine, souvenirs, images, sons & lumières, partages.
Toujours dans la place, à défendre mon carré,  
Es el Rock de la Linéa del Frente !!



L’état des choses, il est c’qu’il est, comme en cuisine, on mange s’qu’on fait, j’en prends ma part et pour le reste …  

Une Excellente Année à Tous !!







samedi 12 janvier 2013

caFé & ciGaReTTeS



Les riffs de guitares saturés, les tempos rapides, m'ont fait marrer un temps. Celui des surboums. Mais avec l'age où s'amuser seul ne suffit plus viennent les premiers moments de spleen, les aurores embrumées sur les berges de la Garonne à entendre mourir les chevaux, du temps où les abattoirs côtoyaient mon bar préféré et déversaient leurs sangs dans les flots boueux. De ces moments qui vous donnent le goût de la soie, l'irrépréhensible besoin d'entendre une ballade, une vraie. Une de ces chansons qui plus jamais ne vous quittera.

En ces mots, je n'évoque pas la chose pop, je serai clair sur ce point, lorsque je cause ballade je fais dans la distinction, j'épure à l’extrême. Autant dire que les anglais passent à la trappe direct. Si je prends la parole ce n'est pas pour causer de faibles mélopées au chagrin modeste, mais pour évoquer l'Homme dans sa part la plus désespérée, celle où se loge les souffrances que rien n’amoindrit. C'est ainsi, je ne m'attache qu'à ceux qui savent soigner leurs émotions, les exprimer de sorte qu'elles deviennent miennes.

La ballade n'est pas un slow mou du genoux prétexte à des tripotages aussi divers que déplacés, la ballade est une affaire intime, l'évocation d'une blessure, une confidence à l'oreille, un truc à en faire dégueuler le cendrier.


Il peut rock'n'roller de tout son saoul, c'est dans sa capacité à évoquer l'odeur du tabac froid qu'un chanteur se sublime. Ou se ramasse à la pelle. Elvis, Gene Vincent, Sam Cooke, Otis Redding doivent leur immortalité à Love me, Unchained melody, Sad mood, Coffee & cigarettes et des dizaines d'autres friandises tout de rose poudrées. Délicieuses tortures. Jerry Lee Lewis s'il est surnommé le Killer c'est aussi pour la façon qu'il a de vous planter les banderilles dans l'épiderme. Impérial dans les ballades country, l'auteur de Great balls of fire reste avant tout le plus bel interprète de Middle age crazy.

Le critère est valable même pour les plus retors. Pas de Ramones sans I remember you, Pet semetary, She talks to rainbow. Je me contrefoutrai d'apprendre que je n'entendrai plus jamais Born to lose de ma vie, cela pourrait même me réjouir mais qu'on ne me prive jamais de It's not enough. Pas de Johnny Thunders sans I only wrote this song for you, Diary for a lover, Two times loser.

Qui peut encore se fader les Stray cats de Sexy & 17 ? Alors que leur I won't stand in your way devient plus beau et patiné à chaque écoute. Même le talentueusement turbulent Hank III se déguste avec plus de délectation encore dès qu'il tombe le cuir et envoie l'émotion, Country heroes et tout récemment Ghost to a ghost, le désignent comme notre plus précieux espoir, peut être bien le seul.


Et puis il y a les orfèvres du genre, les cadors de la pupille humide, en tête desquels Bruce Springsteen, Bob Seger, Chris Isaak et trop de chanteurs Country pour n'en citer que quelques-uns.

D'abord sombre et torturé le temps de l'intouchable Silvertone, Chris Isaak héritier de Roy Orbison et Buddy Holly deviendra dès son magnifique Forever blue fataliste mais apaisé. Comme chacun de nous. C'est l'un des charmes des ballades, elles vieillissent avec vous, prennent un sens nouveau. La ballade c'est cœur et âme, et même l'auto-proclamé Sex machine, James Brown, ne tutoiera jamais autant le sommet qu'avec son ode à la Femme, It's a man's man's world. La ballade c'est le feu du désir plus que la satisfaction d'une excitation assouvie. C'est l'éternel face au consommable, les bras serrés plutôt que les jambes ouvertes en quelque sorte. La ballade c'est la confirmation que se préférer seul que mal accompagné n'exclut pas la douleur.


Et en matière de douleur, Bruce Springsteen se pose là. Avec l'homme du New Jersey la rivière est asséchée, les usines sont fermées, les destins piétinés, les promesses rompues. Lorsque le boss fait du tourisme c'est destination le Nebraska pas la Floride. Bruce Springsteen c'est l'obscurité totale directement venue des plus grands de la Country, un Hank Williams à forte transpiration. Les rares fois où il cherche l'interrupteur, c'est vers dieu qu'il se tourne.
Bob Seger c'est les petits matins à la gare routière, quand le café ne réchauffe que le palais. Jody girl, Against the wind, Beautiful loser, Fire lake, No man's land, Turn the page, Good for me, argh, n'oublions jamais Bob Seger. Encore moins en hiver.





Surtout, il y a le Doo Wop et ses dérivés, l'Eden, un morceau de paradis arraché aux étoiles. Les mélodies y virevoltent comme des flocons de neige, toutes plus scintillantes les unes que les autres. Beauté et poésie, Stand by me et Tracks of my tears, des milliers d'autres d'autant d'artistes parfois éphémères mais jamais dispensables. Chopez vous ces vielles compilations vinyle des 70's, elles recèlent de trésors. Rassasiez-vous de Doo wop, des Girls groups, Motown, Atlantic, Aznavour, Mink DeVille, la musique délicate drapée de velours rose et d'amours rouge sang. 
Des chansons comme il n'y en aura peut être plus jamais. This magic moment, Over the rainbow, Don't play that song, You really got a hold on me, Teardrops must fall, You better move on, You'll lose a good thing, Under the broadwalk, Heart & Soul, I broke that promise, La plus belle pour aller danser, Can't do without it, My girl, Who's lovin you, jusqu'à l'infini.
Bénis soient ceux qui en ont écrit autant afin que je ne me lasse jamais d'aucune.




Enfin, au dessus de tout ça, il y a Frank Sinatra. L'Original one, celui par qui le scandale arrive, l'homme qui a survécu à tout et à toutes. Il en tirera It was a very good year, la plus belle d'un répertoire pourtant fortement chargé en romance, jamais mélodie n'aura eu meilleure voix. 
Sinatra, c'est les bars où l'on va seul pour ne surtout rencontrer personne. Only the lonely. Une œuvre entière consacrée à la quête de l'inaccessible étoile.


Hugo Spanky

samedi 5 janvier 2013

DaRio aRGeNTo


Alors que l’on désespérait d’avoir un jour l’occasion de jeter un œil à « Quatre mouches de velours gris » de Dario Argento, voilà qu’enfin il est disponible en DVD. Ce film méconnu du maestro transalpin de l’horreur clôt sa célèbre trilogie dite animale de giallo.

Tout a commencé en 1970 avec « L’oiseau au plumage de cristal », le premier film de ce diable de Dario. D’emblée avec ce qui peut déjà être considéré comme un coup de maître, il met en place les jalons qui vont parsemer son œuvre si singulière. Alors que les règles du giallo avaient déjà été établies par Mario Bava (avec « La fille qui en savait trop », un faux film de meurtres et « Six femmes pour l’assassin », qui propose des crimes dans le milieu du mannequinât), Dario les malmène en ajoutant une large touche de sadisme et de perversité dans son film inaugural (les crimes sont perpétrés à l‘arme blanche et sont donc particulièrement sanglants). Il apporte également une élégance dans sa mise en scène (fluidité des mouvements de caméra) et un soin à la photographie (les couleurs sont superbes) qui le distingue du tout venant de la série B italienne. Quant à l’intrigue, retorse à souhait, elle maintient un suspense et une angoisse constante et son dénouement nous laisse pantois. Avec ce premier galop d’essai, qui mélange habillement œuvres d’art, violence graphique, musique lancinante (du grand Ennio Morricone) et travail sur la mémoire, il amène un souffle nouveau aux codes usés des films de genre. 



Fort de ce succès, il récidive en 1971 avec « Le chat à neuf queues » dont le casting s’enorgueillit de deux acteurs américains: le falot James Franciscus, dans le rôle d’un reporter et l’exceptionnel Karl Malden, dans celui d’un ancien journalistedevenu aveugle. Cette fois ci, l’intrigue repose sur la génétique (rien que ça!) et élabore une théorie (bien fumeuse tout de même…) sur les prédispositions à la violence. Toujours aussiprompt à nous délivrer des instants de terreur qui nous rivent ànotre siège (chaque fois que l‘assassin entre en scène, on voit en gros-plans ces yeux, gimmick redoutable d‘efficacité), Dario s’amuse même à détourner un des fondamentaux des films horrifiques gothiques de la Hammer: l’incontournable scène nocturne se déroulant dans un cimetière. Moins réussi que son prédécesseur ce film est surtout un moyen pour lui d’affûter son style si immédiatement identifiable et envié par tous les tâcherons qui se targuent de vouloir nous faire peur alors que même Mamie Nova ne frissonnerait pas un iota face à leurs ridicules effets de manche dépassés (Wes Craven et Scott Derrickson se reconnaîtront…).


Après ce long métrage, Dario aurait bien voulu s’attaquer à un autre genre de film mais comme « La chat à neuf queues » cartonna lui aussi au box office mondial, pressurisé par ses producteurs, il du se résoudre à réaliser un autre giallo. Et, en 1972, arrive donc sur les écrans « Quatre mouches de velours gris », son film maudit par excellence. Invisible depuis des années pour d’obscures raisons de droit, on peut enfin juger sur pièce de sa qualité grâce à la bienheureuse initiative de l’éditeur Wild Side de le sortir sur le marché français. Ce long métrage nous prouve de façon indiscutable qu’Argento mérite sa place aux plus hautes marches du panthéon des réalisateurs qui ont révolutionné le septième art.


Tout dans ce film met à mal le confort du spectateur. Dès le générique, le montage alterné entre des musiciens qui jouent un instrumental biscornu et la vision d’un cœur mis à nu qui bat, fait voler en éclats tous nos repères. Un sentiment d’étrangeté ce dégage de cette scène annonciatrice du malaise qui nous prendra en otage tout le long de ce film. D’ailleurs, afin de nous déstabiliser encore plus, Dario mélange allègrement instants de terreurs pures (les scènes de meurtres sont toujours aussi inventives et baroques) et humour lourdingue typique de la comédie italienne au bord du gouffre des 70‘s. Mais ce n’est pas tout, son montage empreint de folie contribue également à rendre son film particulièrement excentrique: lors d’une scène en faux raccord (volontaire), on passe subitement du jour à la nuit et lorsque le héros se rend chez un détective, on alterne entre sa conduite en voiture et la montée des marches qui mènent au logement de celui-ci. Ce dispositif bouleverse la temporalité du film et de brusques accélérations des mouvements de caméra nous perdent même géographiquement dans certains plans. 


Quant au casting, hétéroclite à souhait, il accentue de plus belle notre sensation de perdition totale. Car nous avons là Michael Brandon qui incarne le héros bellâtre de service, Mismy Farmer qui, lors du final, part complètement en vrille, Bud Spencer (!) dans le rôle d’un type qui se fait appeler Dieu (!!) et, cerise sur le gâteau, Jean-Pierre Marielle (!!!) qui interprète un détective efféminé (une caricature d’homosexuel digne de Michel Serrault dans« La cage aux folles ») dont la particularité est de n’avoir jamais résolu une seule de ses affaires (84 échecs à son passif, autant dire que l‘on a pas affaire à Columbo là!). On l’aura compris, Dario Argento nous délivre un film totalement fou et alors que l’on pourrait croire que tant d’audaces visuelles et scénaristiques pourraient nuire à l’ensemble, elles apportent au contraire une incroyable fraîcheur à ce giallo définitivement atypique dont la scène finale dévoile en outre une maîtrise technique admirable. 
 

Lorsqu’on revoit ces trois pépites, on se rend compte à quel point Dario a marqué à jamais notre imaginaire avec ses visions, certes cauchemardesques, mais d’un style si puissant qu’elles nous retournent les rétines de joie. D’ailleurs, en guise de conclusion, on peut émettre l’hypothèse qu’un certain Brian De Palma a dû s’abreuver à la source de ces images chocs et qu’elles lui ont inspirées ses propres compositions hallucinantes qu’il a rehaussé d’une forte tension sexuelle encore plus prégnante et dérangeante.



Harry Max