vendredi 26 novembre 2021

ZNoRT !

 


Mal distribués, isolés sur leur marché national, sombres dans le ton, les italiens étaient les plus créatifs. En mal de renouvellement malgré une domination sans conteste depuis le milieu du vingtième siècle, les belges déclinaient lentement dans un respect des ainés teinté de lassitude. Enferrés dans les comics, les américains ne parlaient qu'à eux-mêmes lorsqu'ils se risquaient à autre chose, Crumb, Shelton, les provocations satiriques de l'underground US paraissaient bien inoffensives envers Nixon et ses sbires, vu d'un pays où la mort du Général De Gaulle se trouvait brocardée en une d'un journal autrement plus corrosif. 

Les années soixante-dix prennent l'affiche, Tintin, Astérix, Gaston Lagaffe, Blake et Mortimer ronronnent en albums, tandis que le reste se fréquente avec désinvolture sous forme de brèves disséminées dans les dernières pages des journaux. Le temps de la révolte a sonné ! La mutation de Jean Giraud en Moebius anticipe le mouvement, la création des Editions du Fromage fondées par Claire Bretécher, Gotlib et Mandryka pose la première pierre d'un édifice vite renforcé par Les Humanoïdes Associés de Jean-Pierre Dionnet, Moebius, Philippe Druillet et Bernard Farkas, plus tard remplacé par Philippe Manoeuvre pour la partie relation publique. 

Ces deux éditeurs au professionnalisme tout relatif vont propager une nouvelle forme de récits plus en accord avec la culture rock que leurs ainés de Pilote, dont ils furent membres dissidents, ne surent l'être. A travers les magazines Metal Hurlant pour les Humanos et L'Echo Des Savanes pour les Fromagers, une ribambelle de nouveaux auteurs et dessinateurs va déferler en bousculant les conventions, forgeant une alliance avec leurs homologues transalpins. Et lorsque Gotlib claque la porte des Editions du Fromage pour fonder Fluide Glacial en s'inspirant des satires de l'underground américain, ce sont toutes les formes de la bédé universelle qui converge vers une France enfin à la pointe d'une culture en phase avec son époque. 


Dix ans durant, de 1975 à 1985 date à laquelle Dionnet quitte le navire, notre pays va rayonner dans le domaine des cases à bulles, triomphant au delà du raisonnable jusqu'à se faire dévorer tout cru par les investisseurs de tous crins. La vente du titre Metal Hurlant aux américains en 1977 sera le premier écueil, Heavy Metal connaîtra un tel succès que dès lors il ne sera plus question que de chiffres et rentabilité. Bye bye les ambitions artistiques commercialement casse-gueule, adieu les Editions Speed 17, émanation en littérature des Humanoïdes Associés qui permis de découvrir Charles Bukowski, Hunter S.Thompson, Hubert Selby et pas mal d'autres sans parvenir à s'installer durablement dans le paysage. Too much, too soon. A l'orée des années 80, les Humanos s'offrent une renaissance sous forme d'albums aux allures cheap puisant leur inspiration dans un quotidien de sales gosses aussi inoffensifs qu'attachants, Margerin (Lucien), Tramber et Jano (l'inégalable Kebra) puis Tramber seul (William Vaurien), Dodo et Ben Radis (Les Closh), Charlie Schlingo (Trip Slip), Peter Pluut (Richard Crève-Cœur), Pierre Ouin (Bloodi) rencontrent un large succès populaire, tardivement accompagné par la brève existence du magazine Rigolo, là où les précurseurs, Druillet (La Nuit), Moebius (La Folle Du Sacré-Cœur, L'Incal), Chantal Montellier (Andy Gang), Dick Matena (La Fille du Prêcheur), Serge Clerc (Rocker!), Loustal (Cœurs de sable) ou Denis Sire (Bois Willys) n'avaient conquis que la frange la plus élitiste du public rock.


Les Editions du Fromage devenues Echo Des Savanes sous le contrôle d'Albin Michel prennent la tête du peloton en optant pour des albums affriolants aux allures luxueuses, l'érotisme gothique d'Alex Varenne (Erma Jaguar), Martin Veyron (L'Amour Propre) et son arrogant Bernard Lermite, La Survivante de Paul Gillon, Torpedo de Berthet, Le Déclic de Manara qui vire phénomène de société tout comme Vuillemin et ses sales blagues récupérées par canal plus, Les 110 Pillules de Magnus (mais aussi Necron), Pauvres mais Fiers de Didier Tronchet, Léon La Terreur de Theo Van Den Boogaard, 
Squeak the mouse de Mattioli... Bizarrement, c'est le moment que le magazine choisit pour réduire sa part de bédé à la portion congrue au bénéfice de reportages potaches parfumés de  nudité aseptisée. Le crash suivra rapidement.





Les Editions Glenat font illusion un temps avec quelques séries particulièrement réussies, Eva Medusa d'Ana Mirallès qui préfigure Djinn avec bien plus de mordant, la mise en abyme Raoul Fulgurex de Tronchet, le sommet étant sans doute atteint par Les Passagers du Vent de François Bourgeon dont les six premiers volumes, parus entre 1979 et 1984, nous plongent dans le contexte colonial des dernières années de la royauté et l'esclavagisme qui va avec. Autre grosse claque avec Les Eaux de Mortelune de Patrick Cothias et Philippe Adamov même si rien ne suffit plus pour éviter l'inévitable. Comme la musique, la bande dessinée se convertit au numérique, perd son grain, l'anarchie de ses cases, se découpe en niches artistico-mes-couilles. Les éditeurs indépendants plient boutique, quelques uns sont intégrés par les institutionnels. Je me raccroche aux séries Dinosaur Bop et Je suis une Sorcière de Jean-Marie Arnon, inspirées des Cramps autant que de Jack Kirby, mais aussi excellentes soient-elles, c'est bel et bien la queue de la comète. Chacun y va de son format bien ordonné, de son génie régional subventionné, le ton (re)devient bêta, au nom de l'épure les dessins s'émancipent du détail. Une case blanche, deux coups de crayon et on s'ébahit devant tant d'audace. Et je parle même pas des scénarii nombrilistes où neuneu y va de sa petite névrose dans l'air du temps. Bouffonnerie que tout cela.


Mais, mais, attendez un peu, on ne va pas se quitter là dessus. On s'en fout de ces glaires, il reste les inamovibles, ceux que le temps n'effleure même pas. A traquer aux puces, à l'ancienne, LES INDISPENSABLES !



Qui ? Dis nous qui ! me hurlent les voix en panique sans se rendre compte que la première des réponses trône depuis plus de 15 ans en proue de ce blog : RanXerox, bordel ! Créé de toutes pièces, scénario et dessins, par l'italien Stefano Tamburini en 1978 Rank Xerox et sa dulcinée Lubna font leurs premiers carnages dans les pages des magazines transalpins Cannibale puis Frigidaire avant que la collaboration avec le dessinateur Tanino Liberatore ne leur donne l'allure définitive qu'on leur connait (et qu'une menace de procès du fabricant de photocopieur ne modifie le Rank Xerox originel en RanXerox définitif). En deux albums, Ranx à New York (1981) et Bon anniversaire Lubna (1983), le duo va retourner cul par dessus tête tout ce qui a pu se faire jusque là en matière d'outrage et d'ultra violence. Le cinéma va s'en inspirer, l'univers du rock en général (Zappa en tête qui leur fera réaliser la pochette de The Man from Utopia), Ranx sera l'aboutissement d'une logique enclenchée avec Orange Mécanique, ainsi que l'acte de naissance d'un underground gore joyeusement décérébré. Le plus incroyable étant que tout cela ait pu exister, profitant d'une faille spatio-temporelle entre la fin de la censure de Mad Max et avant celle du Déclic de Manara. Avec Ranx tout est permis, l'âge indécent de Lubna et ses copines, le lynchage en règle d'handicapé, le sexe affiché énorme et dressé de l'androïde, les shooteuses ensanglantées, rien n'est glissé sous le tapis. L'aventure prend hélas fin trop vite avec la mort par overdose de Stefano Tamburini en 1986, véritable moteur transgressif de l'affaire. Un troisième album poussif, Amen, finalisé par Alain Chabat à partir d'un scénario inabouti de Tamburini confirmera qu'il vaut mieux en rester là.
En plus de réunir les trois albums, une Intégrale (encore merci Harry Max pour le cadeau) publiée en 2010 par Glenat permet de retrouver les premiers strips dessinés par Stefano Tamburini longtemps inédits en France.






Restons au chapitre lacrymal pour évoquer Chaland, Yves de son prénom. Celui dont la disparition en 1990 d'un accident de voiture à 33 ans laisse le plus d'interrogations sur ce qu'il aurait pu devenir tant, dans son cas, le talent se mesurait à l'intelligence. Dès sa découverte par Dionnet à la fin des années 70, Chaland apparait d'un antagonisme acharné. Pensez donc, au milieu des aliens bubonneux aux couleurs fusionnelles, des tripes et du sang, de la chair opulente, du néo-réalisme plus vrai que vrai (au point de flirter avec la photo dans le cas de Claeys) voila t-y pas qu'un drôle de zigoto se met à pondre des Spirou. Adepte de la ligne claire, style que l'on croyait alors aussi enterré que les tapisseries à fleurs, Chaland va ressusciter un univers qui n'avait finalement jamais connu l'âge adulte. Car si son style graphique est d'un classique estampillé, sans ambiguïté, par la maison mère Bruxelles, l'irrévérence de son ton n'en demeure pas moins incroyablement peu consensuel. Et c'est rien de le dire. Chaland, c'est Blondin et Cirage de Jijé, le Hergé de Tintin au Congo première édition dans le texte, non content d'en retrouver le trait, il exploite à fond les manettes tout ce qui, au fil des ans, sera décrété d'un mauvais goût inacceptable. Je m'explique. Âmes sensibles s'abstenir, il faut ici autant de second degré que de bon goût. L'univers de Chaland, celui de Freddy lombard, Captivant, Adolphus Claar, Bob Fish et, plus sardonique encore, du Jeune Albert, est celui des années du racisme banalisé, des réflexions impitoyables, des mesquineries meurtrières. On meurt enfant chez Chaland, on triomphe salaud, on apothéose la crasse derrière l'élégance du trait. Le pire étant que dire tout ça est terriblement réducteur. Il faut lire Chaland, se goinfrer de ses dessins, s'esclaffer de ses dialogues. Son intégrale tient en quatre volumes dont on ressort l'esprit affuté et virevoltant, révolté aussi, un peu plus encore, par l'ineptie de nos censeurs. Chaland éveille une part de nous qu'on ne cesse de vouloir mettre sous cloche, l'impertinence.

En hommage à Jijé et Franquin Chaland aura l'occasion de signer une aventure de Spirou, Cœur d'acier, qui, trop clivante, fera reculer Dupuis qui envisagea un temps de lui confier le personnage. Cette ultime aventure sera interrompue en plein cours par l'éditeur, avant de connaître de nombreuses péripéties aboutissant en 2013 par la parution de l'intégralité des planches, enfin, chez Dupuis. A ce moment là, Chaland sera mort depuis longtemps et c'est à nous, maintenant que c'est essentiel, d'user et d'abuser de notre liberté de ton. Et laisser les cons, les bêtes et les ignares pour ce qu'ils sont. 






Toute passion à son déclic et c'est par le biais de quelques planches publiées dans le magazine Phenix que Crepax me déniaisa. Pour la première fois je voyais la bédé autrement que comme une sorte de tradition dont on hérite en même temps que des albums d'Astérix de son grand frère, et qu'on poursuit sans trop se sentir concerné. Mon oncle Hubert avait éveillé un début d'intérêt en me refilant ses Tanguy et Laverdure, mais rien de comparable au choc que je reçus en découvrant Anita.  Tantôt tendue, tantôt défaite, traits d'encre noir aux mouvances psychédéliques, violée par son écran télé l'espace d'un récit que je mettrais des années à compléter, faute d'en connaître l'auteur. Ainsi allait l'enfance avant l'encyclopédique internet, en quête d'un vague souvenir on découvrait en chemin mille autres merveilles.



Je pourrais ici tartiner cent lignes sur la bédé friponne, vous réciter tout un paragraphe sur les seins de Blanche Epiphanie, l'orpheline tourmentée de George Pichard, j'en suis fana. Mais Crepax reste à part, souvent sans grand sens autre que celui qu'on veut bien donner à des histoires cousues de motos longilignes, de cuirs, de fouet, de mini-jupes juchées tout en haut d'interminables paires de jambesson style demeure unique. Anita, Valentina, Bianca, Crepax a des perspectives lysergiques. Ailleurs, il donne trait à des classiques de la littérature et soudain Emmanuelle n'est plus un film, Histoire d'O, Dr Jekyll et Mr Hyde, La Venus à la fourrure, Justine...de quoi s'évader sans désir de retour.


Et parce que c'est jamais fini, tant que c'est pas fini, il y a Blueberry. Une trentaine d'albums (si on inclut La Jeunesse) pour une vie entière depuis la guerre de secession jusqu'aux prémices du vingtième siècle. Celle d'un déserteur, un opportuniste qui s'endurcit au fil des coups durs, demeure pacifiste dans l'âme, traverse l'agonie d'un monde, tandis qu'un autre s'éveille. Entre spaghetti et John Ford, La prisonnière du désert et Il était une fois dans l'ouest, Blueberry ouvre une voie. Devenue licence à la mort de Jean Giraud, fuyez les albums qui ne portent pas sa signature, mais ne négliger aucun des autres. Pour en saisir toute la portée, il convient de commencer par le début, Blueberry ayant la particularité de vieillir au fil de ses aventures. Ce qui en fait le personnage qui nous ressemble le plus.






L'intégrale de Blueberry se justifie, comme celle de Corto Maltesse pour d'autres que moi, mais la bédé c'est aussi des coups de cœur. Parmi ceux là, La Comtesse Rouge fantasmagorique adaptation par George Pichard du sanguinaire parcours de la Comtesse Bathory, La Femme du Magicien dessiné par Boucq sur un scénario de Charyn édité par Casterman dans la collection (A Suivre), un pur moment de grâce sublimé par des traits d'une finesse qui confine à l'irréel. Battaglia raconte Guy De Maupassant dans un registre totalement différent et tout aussi captivant, et pour en citer un de récent, parce que c'est mérité autant que rare, Little Odyssée de Fred Bernard chouette histoire crayonnée de mobylettes, d'ennui et de mauvais choix qu'on n'a pas le temps de regretter. Puis il y a le cas Loustal, pour lequel j'ai pas les mots, sinon ceux que vous avez déjà lu ailleurs. Démerdez-vous avec ça. Côté ricain, il faudra y revenir pour causer comme il se doit du Conan de John Buscema et de son Surfer d'Argent, du Iron Man de John Romita Jr (Le diable en bouteille), glorifier le trait révolutionnaire de Jack Kirby, en glisser une sur les démentiels scenarii d'Alan Moore, étonnamment le seul anglais du lot, et ses séries V pour Vendetta, Watchmen, son épatant From Hell, sans oublier The Killing Joke peut être son chef d'oeuvre et sans doute le meilleur des Batman.

Plus j'en ajoute, plus j'en oublie.


Hugo Spanky



26 commentaires:

  1. Que de bons souvenirs remontent à le lecture de ton papier.
    Pour compléter cette évocation, je conseille la bio de Dionnet "Mes moires" qui parle admirablement de tous ces azimutés de la bd et aborde bien d'autres sujets encore (cinéma, littérature, etc.).
    La bd d'aujourd'hui - à de rares exceptions près - est bien tristoune et ennuyeusement uniformisée par la colorisation numérique ou exécutée par des brèles qui sous couvert de l'appellation roman graphique (ça fait chicos...) nous prodiguent des dessins honteux réduit à leur plus simple expression.
    L'autre jour, par hasard, j'ai vu chez mon buraliste qu'ils ont osé ressortir Métal Hurlant sous forme de mook... à 20 € l'exemplaire soit tout l'opposé du côté populaire et cheapos de l'original !
    Ce monde me désespère...

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    1. Dans le genre massacre numérique, il faut voir ce qu'ils ont fait du Déclic de Manara lorsqu'il a été réédité il y a deux ans (à la louche) dans la collection bd érotique qui se vendait justement dans les bureaux de tabac. Un carnage, vraiment.
      J'ai vu ce nouveau Metal Hurlant, c'est à pisser de rire. Il y a de quoi désespérer, c'est vrai. J'ai la sensation qu'on nous confisque notre culture au bénéfice d'une élite qui vit par procuration.

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    2. Il y a quand même quelques bons albums de BD qui sortent de nos jours :
      - dans les Spirou il y a les deux tomes de "La femme Léopard" de Yann et Schwartz qui sont d'excellents albums d'aventures ainsi que "L'espoir malgré tout" d'Emile Bravo qui se déroule pendant l'occupation allemande ;
      - de Schwartz et Yann encore, les deux albums de leur nouvelle série Atom Agency sont également à recommander ;
      - les trois "Tyler Cross" de Nury et Brunö sont de bons polars hardboiled à dévorer ;
      - la série western surprenante "Gus" de Christophe Blain vaut le détour tout comme W.E.S.T de Rossi / Dorison et Nury qui mélange fantastique et western avec succès ;
      - et, dans la reprise de Blake et Mortimer, on trouve des réussites telles que "La malédiction des trente deniers" ou "Les sarcophages du 6e continent".
      Mais il est clair qu'au vu de la pléthore ahurissante de bandes dessinées qui sort chaque mois, seule une portion congrue sort son épingle du jeu.

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    3. Du Spirou de Yann et Schwartz j'avais aimé Le groom vert de gris, je vais tenter ceux là. En général je trouve Yann intéressant lorsqu'il bouscule les personnages, mais je l'avais aussi trouvé à bout d'inspiration dans le 3eme cycle de la série Pin Up (le 2eme était déjà un cran en dessous du 1er). Bon, le succès les avait surement poussé à tirer un peu trop sur la corde d'une formule quand même pas bien épaisse niveau potentiel (la même chose est arrivé à Djinn de Ana Miralles)
      Le reste, je ne connais pas du tout, je vais feuilleter tout ça avec intérêt, mais je reste méfiant, j'ai franchement du mal avec le graphisme actuel.

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    4. Grace à un nouveau blog tout ce qu'il y a d'épatant, j'ai pu déchiffrer ton charabia (hardboiled????) et effectivement, je le conçois, je le reconnais, il y a du pas mal dans les oeuvres récentes. Ok, du carrément bon, de temps en temps )))
      Un nouvel univers s'ouvre à moi, tu vas pouvoir t'atteler à un papier pour me guider.

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  2. Apparament, ce n'est pas une franche réussite le nouveau MU ! Les critiques sont quasi unanimes et le lance flamme est de sortie ... ça ne donne vraiment pas envie pour 20 € ...
    Syl

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    1. Je pige même pas le concept, les mecs s'offrent une marque et en font un truc qui ne ressemble en rien à l'idée de base. J'ai feuilleté le premier numéro, on se croirait sur l'autoroute. Bon, il semble qu'il existe un public pour ce genre de révisionnisme à la noix qu'on retrouve dans des machins comme Schnock. Il y a quelques années les gonzes avaient piqué une crise en se faisant un revival Goldorak, Albator et Casimir, on nous demandait que ça aux puces. Même Chantal Goya était devenue culte, c'est dire où ils en sont )))

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  3. Je ne m'étends pas sur les souvenirs en partie partagées avec ton papier. Peut-être le dernier numéro de (A Suivre) histoire de marquer la fin justement?
    Une saine frustration car cette fois ci le téléchargement ne peut pas assouvir les envies de lectures que tu réveilles ici. Limite à retourner en médiathèque chercher des BD pour le plaisir de les tenir en main à défaut de retrouver les cités.
    Gourmand lecteur de Hara-Kiri je trouvais dans la plupart de ceux que tu cites comme des cousins: humour, provocation et intérêt.
    En vrac par rebond, CorBen, Conan le Barbare et je m'étais jeté sur cette littérature de Howard & co et ses autres héros, un pont vers des bouquins de SF ce qui pourrait faire une suite à ton papier. Merci Amigo, papier grandiose de retour de manivelle.

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    1. J'écris plus qu'en réaction, j'en suis le premier énervé ))) On est allé à un minuscule festival de bédé dans un bled parce que Sylvie aime bien Foerster et qu'il y tenait un stand. Je me suis dit que ça serait cool, qu'il y aurait des vieux papiers à feuilleter et des petits plaisirs à se faire. Et peut être même des nouveautés à découvrir. Je t'en fous! Les albums cheapos de nos jeunes années sont dorénavant collectors et coutent une blinde, ils sont tous sous plastique, impossible de feuilleter sans se faire fusiller du regard. Et encore, ce sont les trucs les plus ordinaires.
      Une fois esquissé les tirs des deux vendeurs oldies, je me suis retrouvé devant le stand le plus balèze du salon, celui de l'Espace culturel Leclerc )))) Véridique. Bon là c'est allé vite.
      Autour, on a eu droit à quelques étudiantes des beaux-arts en mode édition à compte d'auteur qui dédicaçaient leurs oeuvres à des jeunes filles en fleurs. Et puis Foerster avait dû aller pisser, à moins que son GPS ne soit tombé en rade sur la route. Ou alors c'était un homonyme.
      Je te le donne en mille, on a fini au bistrot.

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    2. "... au bistrot" He ben quoi, tout est bien qui commence bien... Tu vas pas te plaindre. Une déception qui fini au comptoir et c'est un souvenir de + ;-)

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  4. Ranx, aussi violent qu'attachant, LE modèle des années 80. A ce jour encore, on a jamais fait mieux. Kebra, Lucien, Bloodi.. autant de gourmandises. Torpedo, ce tueur à gage Italien coincé dans un univers sombre et sans pitié.
    "le plaisir de les tenir en main" mais oui !! Comme quand tu tiens un vinyl ou un billet de cinéma. C'est physique comme activité. Sans compter les mémorables crises de rire avec les Gotlib, les Edika et etc... Après on dit qu'on est pas sportifs 😊 Znort alors 😁
    Puis les autres, -je ne suis pas aussi calée que toi, alors je vais me limiter à Loustal si tu le permets-. Loustal lui qui ne m'a jamais quitté depuis notre première rencontre en ce début des années 8O. Ce fut le coup de foudre. Première image, et me voilà à jouer au tennis sur un bateau de croisière. Dans le bayou entouré de crocodiles affamés, ou dans un Paris sale et misérable, impitoyable. Je peux rester des heures, des minutes peut-être, je ne sais pas, le temps s'arrête. C'est élégant, moite, capiteux. Il y a des odeurs, de la musique et du silence. Il fait chaud, très chaud. C'est admirable. Les histoires avec Paringaux sont admirables. Je me demande à chaque fois qui de eux deux inspire l'autre. Puis je me dis que c'est Paringaux et puis ça m'est égal. Je pense aussi que c'est le jazz qui les réunit. A ce propos je n'ai jamais écouté la musique qui accompagne Barney et la note bleue.
    C'est vraiment chouette la bédé. Dommage que j'ai l'achat plus compulsif que la lecture 🙃😃

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    1. Loustal, j'ai pas développé parce qu'on retombe toujours sur les mêmes choses, cinématographique, poétique, pastel, du sang derrière le bouquet de fleurs, en fait. Quand je lis toujours les mêmes choses sur un artiste, je finis par me dire qu'il ne doit finalement être bon qu'à ça ))) Du coup, je préfère pas m'étaler si j'ai rien de plus à en dire. Surtout que dans son cas, j'aime beaucoup également. Le duo avec Paringaux fonctionne très bien, mais d'autres collaborations sont toutes aussi bonnes. J'aime bien Jerome Charyn comme scénariste, c'est lui qui a fait Les frères Adamov avec Loustal et La Femme du magicien avec Boucq. Je l'ai sans doute pas suffisamment souligné, mais le scénariste/dialoguiste est super important.

      Calé, c'est gentil de me gratifier de cette qualité, mais c'est surtout qu'il y avait une telle multitude de créativité et surtout venant d'auteurs très différents, le style était travaillé à tous les niveaux, le trait bien sur mais aussi l'ambiance de l'histoire, que c'était difficile de se contenter de suivre mois après mois par tranches dans L'écho des savanes. Alors je dirais gourmand, surtout ))) Et puis, les envies changent aussi, tu parles de Lucien, Bloodi, Kebra (lui je l'adore), c'est un peu comme Stephen King en littérature, tu les dévores jeune puis tu passes à autre chose sans te débarrasser d'eux pour autant, alors ça s'additionne ))) Mine de rien, la bd c'est super varié, ça peut te brancher sur des trucs historique vers lesquels tu n'irais pas en littérature et ça peut aussi être super érotique, là où le cinéma à du mal à l'être. Et aussi comme Tardi avec Céline, ça permet de donner un ton à la littérature, à mettre en contexte par de simples petites touches.
      Bref, le mec qui a écrit sex&drugs&rock&roll a été une buse, ce qui accompagne le mieux un disque de rock'n'roll, c'est une chouette bédé )))

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  5. La force de la bédé est qu'elle a ses entrées partout. Dans un sac de voyage, la poche d'un manteau, roulée dans le creux de ta main, dans les toilettes, ou rangée docilement sur une étagère. Parce qu'il y a tous les prix, tous les formats, et pour tous les goûts, tous les ages. Rodéo, Kiwi, Akim, Cosmos... du western, de l'aventure, de la science fiction, de l'horreur. Les bédé adultes populaires Zara, Sam Bot, Salut les bidasses, Jesabel etc.. puis pour les petits: Tartine, Popeye, Titi... c'est super joyeux comme intrusion.
    A propos de mes questionnements sur Loustal et Paringaux, le lien ici d'une chouette interview.

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    1. Les petits formats, au papier fin comme des feuilles de cigarettes avec l'encre qui reste sur les doigts, spécialisés dans les traductions de BD italiennes n'ont plus cours de nos jours.
      C'est vrai qu'à l'époque on en a chopé à foison quand on était marmot : les sous-Tarzan, Akim et Zembla ; Bleck le roc et son ersatz Captain'Swing plongé dans la guerre d'indépendance en Amérique ; Zagor et ses histoires baignant dans un fantastique gentillet, etc.
      Tandis que les plus grands eux se passaient sous le manteau toutes les bd érotiquo-cheap qui partageaient le même format.
      Les albums franco belge en collection dite souple -plus économique que les cartonnés- étaient également là pour étancher notre soif d'aventures du neuvième Art.
      Maintenant, la Bd est devenue un luxe tant les prix pratiqués sont prohibitifs et même le marché de l'occasion voit ses tarifs s'envoler de façon extravagante ; en fait, seul le manga est encore abordable et d'ailleurs la jeunesse ne s'y est pas trompée vu qu'il est en tête des ventes tous genres confondus.

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    2. Blek le roc, Zembla, Kiwi et cie c'était les Editions Lug qui ont ensuite, bénies soient-elles, créé Strange puis traduit les aventures de Conan avec la fameuse série en noir et blanc qui fit mon bonheur le temps de sept albums entre 1976 et 1979. Aredit/Artima a pris le relai en élargissant la palette avec Captain America, Kamandi, Hulk et toujours Conan (mais en couleurs cette fois) et toute une palanquée d'autres super-héros.
      Depuis on est victime de notre bon goût précurseur, les blaireaux se sont attribués notre culture et la consomment en rééditions hors de prix. Mais le temps perdu ne se rattrape plus )))

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    3. Ils en sont même à rééditer Akim qui, rappelons-le, à la base était une sacrée bouse (dessins pourraves et scénarios improbables), c'est dire si c'est du grand n'importe quoi !
      Quant aux rééditions Marvel, c'est 35 € le volume... et, à titre d'exemple, ils en sont à plus de 50 tomes de Amazing Spider-Man ; t'imagines le fric que ça coûte !
      C'est vrai que de notre temps, on pouvait trouver notre bonheur pour pas trop cher et se constituer une vaste culture BD.
      On aura eu cette veine désormais bien révolue.

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    4. C'est clair que la nostalgie ambiante envers des conneries comme Kiwi tient de la sénilité ))) Il y aurait bien mieux à rééditer, quoique laisser tout ça dans nos souvenirs est surement la meilleure option, surtout si c'est pour le faire en éditions pseudo luxueuses comme celles que tu décris et qui dénaturent complétement l'idée de base.
      Je me fais plaisir à l'occasion aux puces, récemment en tombant sur des albums de Regis Franc (Nuits de Chine, Sunset corridor, Le marchand d'opium) qui à leur façon se révèlent encore corrosif envers bien des travers d'actualité.

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    5. Régis Franc, je t'avoue n'avoir jamais essayé car ses dessins étaient pour mézigue rédhibitoire.
      Là, je me replonge dans l'intégrale de Chaland, un régal ; quel dommage que ce type soit parti trop tôt.

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    6. Ah là forcément, Chaland, il y a lui et puis les autres. Un vrai talent.
      J'ai parcouru le livre consacré à l'histoire de Metal Hurlant, je vais essayer de le choper, ce que j'en ai lu (un passage sur Chaland justement) est intéressant sur l'époque et le ton franc du collier qui caractérisait toute cette bande d'excités.

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  6. Ha, Haaa, haaaaa.... merci, que de bons mots sur cette bande dessinée, encore aujourd'hui dénigrée (bien que servant copieusement d'inspiration au cinéma depuis bien 20 ans).
    Quel plaisir de lire un hommage sur RanXerox de Tamburini. Un artiste extraordinaire, un talent fou (même si l'âge de sa copine me dérangeait quelque peu - je pensai que c'était finalement une vision futuriste glauque et de totalement désenchantée).

    "glorifier le trait révolutionnaire de Jack Kirby" : Yes ! Plutôt trois fois qu'une ! Là aussi, le cinéma (les blockbusters) lui doit beaucoup - des fringues à la fois extravagants et classes aux décors saisissants. Sans oublié que le premier véritable super-hero black et autonome, Black Panther, c'est lui. Ainsi que l'inclusion de personnage de la mythologie.

    Par contre, il convient tout de même de rappeler le rôle majeur de Pilote. Ne serait-ce que pour l'inclusion de Druillet. Voir pour la première fois, bien avant la naissance de Métal Hurlant, ces dessins de fou qui sortaient du cadre, de la page, était une expérience incroyable. Quasiment une épiphanie. Tiens, celle-là aussi venait de Pilote.

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    1. Pilote est indiscutablement à la base de tout ce que j'évoque, L'écho des savanes, Les Humanoïdes associés et même Hara Kiri sortent de ses entrailles, autant dire ce que la presse des années 70 a connu de plus kamikaze. C'est vrai aussi qu'ils ont raté le coche du changement d'époque. Un peu comme moi avec la BD des années 2000.
      A l'occasion, je me tenterais bien Promethea, même si, niveau sexy, Blanche ne lui laisse aucune chance ))

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    2. Mine de rien, au niveau sexy Kirby était pas mal (ses œuvres, pas lui). Evidemment, tout en respectant les codes de la censure. Etonnamment d'ailleurs, car, à mon sens, les costumées féminines de Marvel étaient souvent particulièrement sensualisées. Notamment avec des poitrines opulentes, normalement pas très compatibles avec une musculature développée. (Passaient-elles déjà par la chirurgie esthétiques ? Dès les années 60 ? )

      A mon sens, "Promethea" est une BD particulièrement dense. Tant au niveau du sujet, de la narration que des dessins affolants. Grand nombre de planches pourraient être l'objet d'un tableau.
      Un copain grand amateur de BD depuis des lustres, partage mon avis. (comme quoi, on est au moins deux à apprécier cette œuvre 😄)

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    3. Tu aimes les héroïnes sexy de Jack Kirby, tu devrais jeter un œil à la série Dinosaur Bop de Jean Marie Arnon.

      Je suis d'accord que les costumes dont Marvel dotait ses donzelles ne laissaient aucun doute sur la générosité de leurs anatomies, néanmoins les deux qui ont accaparé mon imagination avec le plus d'insistance n'en n'avaient pas besoin puisqu'il s'agit de Mary Jane Watson (croquée par John Romita) et Bêlit (sublimée par John Buscema) dont le destin tragique au côtés de Conan me brisa le cœur comme aucune autre.
      J'espère que Promethea m'épargnera de nouvelles souffrances ))

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    4. Crénom !? Mais d'où sort de JM Arnon ?? On dirait du Kirby remanié à la sauce franco-belge. Et le type là, son héro, il ressemble beaucoup à Lux Interior (jeune). Du pain béni pour Fluide Glacial ou Métal Hurlant (non, pas Pif).
      Le dessin est très bon mais est-ce que la BD vaut vraiment le déplacement ?

      Oui, la piquante MJ Watson, et les donzelles bien peu frileuses de J. Buscema. Dire que ce grand nom des comics des 70's aspirait plutôt une carrière dans la pub et l'illustration de bouquins. A l'origine, il n'avait pas une opinion favorable envers la BD, et en particulier celle des super-héros.

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    5. Les quatre premiers volumes de la saga Dinosaur Bop sont franchement bons, c'est gavé d'allusions au rock et aux Cramps en particulier (dans son autre série phare, Je suis une sorcière, la créature qui accompagne l'héroïne se nomme carrément Rex Inferior et je ne vais pas te faire l'affront de traduire L'odeur des filles...))) Après ces quatre là (L'odeur des filles, La caverne des cœurs brisés, Neanderthal bikini et Shaman blues) il y a eu un trou de plus de dix ans avant qu'il ne ressuscite la série en 2015 et je n'ai pas (encore) lu les nouveaux volumes, mais j'imagine que ça reste dans le même esprit.
      Entre temps, il a fait Je suis une sorcière que L'écho des savanes avait édité en feuilleton, pareil, peu d'albums dans un premier temps (2 pour être précis, le second étant titré Le mystère de l'homme-chien) mais un vrai bon esprit comme on aime. Cette série là aussi a été réactivée depuis.
      Tout cela représente pour moi les derniers feux des comics qui me parlent, dommage qu'il soit tombé à une période où les éditeurs type Echo des savanes se cassaient la gueule, il n'a pas eu l'exposition qu'il aurait mérité, même si depuis il s'est trouvé des structures indé (Organix comics, Inana éditions) qui lui permettent de publier à nouveau.
      Laisse toi tenter, tu vas te régaler.
      https://www.bedetheque.com/auteur-2584-BD-Arnon-Jean-Marie.html

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  7. Ne pas négliger la reprise de Swamp Thing par Alan Moore. Ni "Providence", en hommage à l'autre dingo de Lovecraft. Ou encore "Promethea" qui plonge dans l'ésotérisme avec des dessins affolants de J.H. Williams.

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