jeudi 29 novembre 2018

SiGUe siGUe SPuTNiK



Sigue Sigue Sputnik ne m'inspirent aucun superlatif,  Sigue Sigue Sputnik ne sont les meilleurs en rien, mais on a été un peu vite en besogne pour voir en eux les pires de tous. Le rocker lambda n'a pas son pareil pour se comporter en petite vieille, après tout, rejeter Sigue Sigue Sputnik en 1984, c'était comme s'effrayer des New York Dolls dix ans plus tôt.
Ok, ils sont laids comme seuls les anglais peuvent l'être, leurs dégaines, leurs provocations à deux balles, leur insistance à vouloir être nimbés en permanence d'une aura de scandale, tout ça, et les publicités entre les chansons, n'a pas vraiment aidé à leur donner la crédibilité que l'on accordait sans broncher à, je sais pas, défoulez-vous, U2 ? Pourtant en matière de crédibilité rock, le groupe se pose là, baptisé à Paris en première partie de Johnny Thunders, parrainé par Mick Jones, fondé par son ancien complice des London SS, Tony James, éminence grise de Generation X, l'homme qui composa Russian roulette pour Lords of The New Church, c'est quand même pas trop mal comme bulletin de naissance. Generation X ! Un des groupes les plus sous-estimés du punk, malgré des albums qui vieillissent en conservant leur charme d'origine. Tiens, bien vieillir, c'est un peu ça le fond de ma pensée. Sigue Sigue Sputnik, comme Big Audio Dynamite, vieillit bien. Ils ne sont pas des caisses à avoir cette qualité, encore moins parmi ceux qui ont misé sur la modernité, chose, on le sait, qui lasse aussi vite qu'elle a pu surprendre.


L'apanage le plus communicatif de Sigue Sigue Sputnik fut l'enthousiasme. Dans une Angleterre livrée à la dépression gothique, voila qui faisait un bien fou. Les gars cumulaient les moues d'Elvis Presley, posaient les riffs minimalistes de Marc Bolan sur la rythmique hypnotique de Suicide, maquillaient l'ensemble à coups de samples puisés dans le répertoire Deutsch Grammophon et envoyaient le tout dans un hyper espace de manga porno. Tony James, Prince, Mick Jones, j'en reviens toujours là sitôt qu'années 80 riment avec réussite artistique, ont pigé le topo, plutôt que d'ignorer les technologies, soumettons-les, plutôt que de s'apitoyer sur le désastre, réveillons les méninges.


Le 20eme siècle a écrasé les peuples par la guerre d'abord, par l'argent ensuite, Sigue Sigue Sputnik est une satire de ce constat, des missiles passent au dessus des piscines de Beverly Hills pour s'écraser sur les ghettos. Le groupe fera un triomphe au Brésil. Encore un point commun avec Big Audio Dynamite, Rio rocks! et Sambadrome, comprenne qui voudra. Autres similitudes, le goût pour les maxi singles, les remix extended qui rendent maboules, les reprises inclassables (I could never take the place of your man de Prince, Always on my mind de Presley, toutes deux impeccablement réussies), les formations mutantes, l'utilisation du web comme mode de distribution et les comebacks improbables.




Flaunt It est une sorte de classique à l'échelle de 1984, une curiosité qui entre une pub pour L'Oréal, une autre pour NRJ, donne à entendre une musique hybride aux modulations évolutives. Produit par Giorgio Moroder, le disque dévarie une formule établie par Eddie Cochran et Buddy Holly, sans rien en renier. A l'image du monde qu'il annonce, le notre, avec ses écrans géants convulsifs, Flaunt it overdose consciemment l'auditeur, exige de lui une attention permanente pour mieux lui laver le cerveau comme le font les médias livrés aux publicitaires, les jeux vidéos obsédants. Sigue Sigue Sputnik est un concept parfaitement exécuté par une horde de gremlins ricanants.
Dress For Excess, leur second album est celui qu'il vous faut pour piger le génie de la chose. Un make-up technologique raisonnablement dosé, co-produit par Tony James et Neal X le disque délaisse quelque peu l'oppressive agressivité de son prédécesseur et tape au cœur de la cible. En offrant une plus large place à la guitare de Neal X, en soignant des mélodies pas si mal branlées, en samplant Who et Led Zeppelin plus souvent que la Toccata de Bach, le groupe délivre un album qui aujourd'hui encore, et peut être aujourd'hui surtout, apporte une fraicheur salutaire. Un parfait reset pour tous ceux qui ont l'impression persistante d'avoir serré du bulbe.


Avec des têtes de gondoles comme Rio rocks!, Hey Jane Mansfield superstar, Supercrook blues, les sublimes Albinoni vs Stars Wars et Dancerama, Boom boom satellite, conclut par un Is this the future en forme de résurrection de Ziggy Stardust, en flirtant avec les mélodies caractéristiques des 50's pour mieux les détourner, Sigue Sigue Sputnik incarnent ce que les Beach Boys de Surfin' USA furent au Chuck Berry de Sweet little sixteen. Dress For Excess est le disque que les Cramps n'ont jamais eu l'audacieuse inconscience d'enregistrer. C'est dommage pour eux, mais rien n'indique qu'il faille l'ignorer plus longtemps. 

Hugo Spanky


24 commentaires:

  1. Avant d'échanger davantage. je connais (presque) bien "Flaunt It" grâce à un papier du Zorno en 2016 qui l'avait proposé. Son papier en fait en recyclait un autre. Qui m'a encouragé à rester sur "Flaunt" Je cite:
    "(Guts of Darkness) va nous détailler la recette : ".... Or, Sigue Sigue Sputnik, au lieu de persévérer dans leur voie extrême et assumer leur satut de groupe punk du XXIème siècle va tout gâcher avec un second disque désastreux, produit par les faiseurs de tubes de l'époque, Stock, Waterman et Aitken (à qui l'ont doit des infections comme Kylie Minogue, Rick Astley, etc), détruisant d'un seul coup une réputation de groupe maudit qui eut pu faire leur renommée..."
    Tout le zorno est ici
    http://mangemesdix.blogspot.com/2016/01/synthpop-iv-gloire-troisieme-partie.html

    Ducoup, une fois de plus, tu proposes une relance? Pour le deuxième album?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je connais le papier sur Guts of darkness, c'est un des trucs les plus cons qu'il m'a été donné de lire sur le sujet. A mon avis, ton mec n'a carrément pas écouté Dress for excess, tant ce qu'il raconte ne ressemble en rien à ce qu'est l'album, il le prétend notamment produit par Stock, Waterman et Aitken (qui ont fait du très bon boulot avec Divine, Kylie Minogue et pas mal d'autres), alors qu'ils n'ont produit qu'un seul titre... Dress for excess n'est pas si différent de Flaunt it, encore moins au point d'être qualifié de désastreux en comparaison. Je suis en désaccord sur à peu près tout ce qu'il dit pour les décrire. L'uniformité dont il parle est une impression de surface (de la même façon le Blues c'est toujours pareil) mais si tu écoutes le disque, c'est sans cesse en rupture, en mouvement, les rythmes s'additionnent ou disparaissent, une boite à rythme se voit rejoint par une batterie au 3/4 d'un morceau (mais encore faut-il l'écouter en entier). C'est bien plus chiadé qu'il n'y parait. Et dire qu'il n'y a que "quelques lignes de guitare rock'n'roll pour la forme" c'est à mourir de rire, il y a de la guitare absolument partout et à fond les gamelles qui plus est !
      Dans la foulée il sort Marilyn Manson de son chapeau et là, franchement, hormis qu'il est laid, je ne vois même pas de point commun conceptuel entre eux. Il cite aussi Mad Max, Blade runner, l'américanisme puant, on ne sort pas des clichés, Zizi Jeanmaire et les mangas me semblent plus pertinents. Son papier est un condensé des banalités d'usage débitées par la presse "rock" de l'époque, saupoudré d'un brin d'approbation pour faire genre.
      Bref, lire RanxZeVox, c'est goûter la différence )))

      Supprimer
    2. Merci pour le lien, mais j'abandonne, je viens de lire leur chronique de Frankie Goes To Hollywood, c'est un carnage. Le gonze ne cite pas Trevor Horn, faut le faire, colle un y à Freddie Mercury (qui au passage n'a rien assumé du tout), ne sait visiblement pas qu'aucun des membres du groupe hormis Holly Johnson ne joue sur l'album, ni même que War est une reprise d'Edwin Starr (qui n'est pas le papa de Joey, faudra le lui dire au cas où...)))) Pour couronner le tout, il résume le double album à ses singles, affirme que le clip de Relax a été interdit (c'est peut être l'un des clips les plus diffusés de l'histoire de la télé) alors que seule la scène où les mecs se pissent dessus a été coupée...un carnage, je te dis ))))
      Ça me ramène à ce que je dis souvent à propos des chroniqueurs rock français et des auteurs à la noix que publient Le mot et le reste ou Camion blanc/noir, les mecs racontent n'importe quoi appris par ouïe dire sans ne serait-ce que lire les notes de pochette.
      Au suivant )))))

      Supprimer
    3. @devantf, tu viens de lire un post qui parle de musique, et donc je sais que tu prends note, tu écoute, commande etc.... pourquoi tu renvoies sur un lien mort !? J'aime pas du tout taper sur l'imbus lance d'habitude, mais faut vérifier ses sources parce que faut savoir que ces papiers sont lus, crus, répétés, et qu'ensuite on en sort même des bouquins que les gens vont lire, croire et répéter. Faut arrêter les conneries à mandonné !

      Supprimer
    4. Lien mort? Ha pour télécharger. En fait j'avais oublié qu'il proposait aussi le téléchargement. Ce n'était pas mal intentionné de ma part. L'idée c'était de "rendre hommage" à la chronique qui m'avait fait connaître les Gonze Gonze Sputnik. Hugo corrige (et ça fait mal :-) ) mais j'avoue que la lecture avait été suffisante pour que je m'intéresse au Sputnik.

      Supprimer
  2. (Au début La toccata je pensais à celle de Mordicus ;D) Bref. Sinon ça m'étonne pas qu'ils soient si populaires au Brésil. Avec leur musique spécial carnaval composée de percussions, de sifflets, de pétards, de claquements de bâtons etc... tout pour te plonger dans un état de transe et te désarçonner afin de te laisser groggy, étourdi.
    Sauf qu'à un moment le carnaval s'arrête et te laisse un répit contrairement aux bombardements d'images, d'informations inutiles de publicités dont on nus bombarde au quotidien via la boîte aux lettres, internet, la télé. -Je me demande à ce propos si un jour prochain (dont je suis certaine qu'il arrivera plus tôt que prévu) on va pas avoir des coupures pubs lors de notre propre enterrement). C'est ça Sigue Sigue effectivement. Le nerf de la guerre. C'est l'avenir du futur, c'est Blade Runner pour la vie. ;D

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le Brésil c'est terrible, ils font des triomphes aux meilleurs sans avoir besoin qu'on les leur montre du doigt. A l'instinct. Iron Maiden fait un carton là bas, alors que les brésiliens ne connaissent même pas l'existence du hellfest )))))

      Supprimer
  3. Je connais vaguement ce nom, mais leur musique m'est inconnue. Ta chronique, à la fois amusante, intéressante et passionnante, me donne envie de faire quelques recherches sur cette bande d'allumés !!!

    RépondreSupprimer
  4. C'est "Psychotic Reaction" des Count Five, avec des synthés en plus.

    RépondreSupprimer
  5. Leur reprise de Personality crisis sur l'album "A tribute to Johnny Thunders: I only wrote this song for you" est plutôt bien branlée également.

    RépondreSupprimer
  6. J'avoue que "Dress For Excess" est une bonne éclate/claque. Tu parlais de Cramps. Dans ma cuisine en plein Cochon aux épices (contexte inutile) je pensais justement à Devo & Cramps. Mais à force de références nous allons leur reconnaître une "personality" bien à eux. Et que je me suis fait pour l'occasion par rebond Kylie Minogue, Rick Astley ... c'est que j'aimais et j'aime, je me souviens d'un pote qui te dansait ces trucs, un vrai Zebulon Kratwerkien. C'est con que je n'ai jamais pu lui faire un coup de Sputnik, je suis certains qu'il serait resté collé au plafond.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah, tu vois que je ne dis pas que des conneries ))))
      Les productions Stock, Waterman & Aitken qu'il était de bon ton de descendre en flèche, perso je les entendais comme une sorte de Motown remis au goût du jour, inoffensif mais charmant.
      Pour le passage sur les Cramps, ma pensée était inverse, je ne voulais pas dire que Sputnik leur devait quelque chose, mais que je regrette un manque d'évolution dans le parcours des Cramps. Je trouve que le groupe à raté quelque chose après A Date with Elvis et Stay Sick, je rêvais d'une mutation vers plus d'exotica érotica, des touches de mambo, de calypso, et pourquoi pas un peu d'électronique rococo. Kizmiaz proposait une nouvelle voie qu'ils n'ont jamais suivi, préférant s'enferrer dans un psychobilly de plus en plus caricatural et systématique jusqu'à l'appauvrissement du dernier album. C'est con, ils avaient tout pour eux, MTV les a soutenu et a diffusé, ils ont même participé à un épisode de Beverly Hills 90210. C'était le sens de mon propos.
      Sigue Sigue Sputnik ne manquait en rien de personnalité, tu as raison de le souligner.

      Supprimer
    2. Ha la la Tu sais bien que je suis honnête avec ta façon de nous reprendre à rebrousse poil, meilleurs exemples - les mauvais sont sur une liste de chantage à venir - Mick Jagger et Bon Jovi. Tu imagine - Jovi surtout - que me voilà à faire le combatant surtout de Bon Jovi - 100,000,000 Bon Jovi Fans Can't Be Wrong - pour les fan de Springsteen vous avez là le etc... Donc sache un truc: quand on aime pas je zappe vite, quand on aime, je pardonne tout, même les fautes historiques. ;-)

      Supprimer
    3. ... Surtout les fautes historiques

      Supprimer
    4. Le 100 000 000 Fans, c'est un bijou de bout en bout, j'en profite pour conseiller l'album Power Station Years consacré aux toutes premières sessions de Jon Bon Jovi, c'est une tuerie dans le pur esprit Asbury Park. Le cd existe dans plusieurs versions dont une avec quelques titres de plus particulièrement excellents.
      Mick a fait des fautes historiques ???? Jon Bon aussi ???? De quoi ? Comment ? Je vous sommes de t'expliquer )))

      Supprimer
    5. Meeeuuuh non. Bon Jovi je ne sais pas, Mick, j'ai promis de ne rien répéter. Non, je faisais allusion aux erreurs relevées sur le site de Zorno. Je me disais que je pardonne tout ça quand cela m'a donné envie de connaître. Mon côté cool? J'menfoutiste? Aquaboniste? Bonne question.
      Sinon, j'ai noté tes références et je vais aussi chercher les lustik Sputnik, je parle des titres absents des deux albums... Tiens? Du Céline Dion sur ton site!!

      Supprimer
    6. Mouais le pardon, bon...après leur avoir brisé les doigts alors ))))
      Hors ces deux albums, Sputnik a notamment fait un disque de "reprises" d'Elvis, Blak Elvis vs The Kings of Electronic qui contient une fantastique version de Always on my mind. Il existe aussi The First Generation qui regroupe des démos des débuts, minimaliste comme il se doit.
      Pas mal de maxis valent le coup également.
      Céline Dion me sied parfaitement, je suis même fan de Mariah Carey. Viva Divas!

      Supprimer
    7. Maria Carey, une petite lacune chez moi, tiens, je vais finir par faire appelle à l'aide pour constituer une compilation digne de ce style. Les blogs, c'est pas l'idéal, je vais réfléchir. Déjà mal à la tête

      Supprimer
    8. Ses premiers albums sont vraiment bons, la compil "1's" regroupe les meilleurs singles de cette époque, son album Unplugged est indispensable et dans un registre plus "moderne" au sens R&B du terme Rainbow est excellent avec Jay Z à la production sur le méga hit Heartbreaker.
      Ça fait une bonne approche.

      Supprimer
    9. Ah ! Ah ! Ah! Partir de Sigue Sigue Sputnik pour finir par parler de Céline Dion et de Mariah Carey; il n'y a que sur Ranx Ze Vox que l'on peut voir ça. Continuer sur cette voie les petits gars, c'est comme ça qu'on vous adore !

      Supprimer
  7. moi je préfère anastasia, en voilà une belle coiffeuse. j'avais pris sigue sigue flaunt it à l'époque (en solderie c'est pour ça) ... mais j'arrivais pas à écouter autre chose que love missile, comme du suicide variette, la dégaine trop punk à la judge dread. finalement je l'ai refourgué, trouvé le 45t, et me suis passionné pour la discothèque des cramps. flame job est leur dernier meilleur disque. tout comme les sex pistols je savais pas qu'il avaient pondu autant d'album ! stay sick sick sick

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ouais, ils étaient chouettes les Cramps, mais rayon disques à partir de Look mom' no head, ça commence à rabâcher sérieux. C'est con, ils avaient la culture pour pousser le truc vers l'inconnu. Bon, faut aussi dire qu'ils avaient un public de merde et que ça les a pas aidé à prendre les bonnes décisions de devoir toujours faire le show la bite à l'air et compagnie.
      Tant qu'à garder qu'un seul titre de Sigue Sigue Sputnik, c'est Rockajet baby qu'il te faut.

      Supprimer
  8. je parlais de la discothèque pas de la discographie ... j'admet qu'il y a de la rabache, mais avec cette tonalité ... fait toi une compile. flame job viens bien après look mum qui n'est vraiment pas terrib', mais ou il y a "eyeballs in my martini" quand même. good byyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyë

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ouais, il y a le fabuleux enchainement Ultra twist, Let's get fucked up et Nest of the cuckoo bird et un peu plus loin Strange love et Naked girls falling down the stairs, ok, c'est du très bon et même mieux que ça. Mais le remplissage tout autour, il aurait pu avoir une variété de couleurs que ça aurait pas fait de mal. Figure toi que c'est en faisant des cassettes pour la bagnole que j'ai du me rendre à l'évidence qu'il y a certains de leurs disques qui nourrissent mieux que d'autres. Mon favori c'est Psychedelic Jungle, celui là impossible de le compiler.

      Supprimer