From Lead To Gold est l'album d'un groupe décidé à bouffer tout le gâteau avant qu'il ne soit trop tard. Les quatre musiciens ont pris leurs quartiers au Studio Condorcet, ont convié au festin quiconque est animé par l'envie commune d'ouvrir les vannes en grand. Christian Seminor, complice des années Dau Al Set, rapplique avec ses congas, un guitariste de hard rock se retrouve aux chœurs, Félix Jordan de Sabotage, tandis que le producteur et maitre des lieux, Olivier Cussac, traque la sonorité qui fait mouche et l'interprète avec une implacable justesse. Hammond, Wurlitzer, Violons, Cuivres, Farfisa, Percussions font tournebouler l'esprit, valser les émotions et lorsque l'affaire s'évapore sur un solo de trompette hanté, on reste estomaqué par tant d'audaces.
Staretz ne nous refuse rien.
From Lead To Gold est un disque malin comme une fille des rues. Chaque chanson disparait dans le silence avant qu'on y prenne ses aises. St. John's Eve, qui ouvre l'album, commence comme on s'étire, avec une paresse lunaire, puis la mélodie n'en fait qu'à sa tête, nous éveille soudain. C'est à ce moment là que la rythmique nous décroche son jab du droit, on esquive par une feinte, on se redresse pour répliquer, trop tard, le Hammond nous cueille, l'adversité n'est plus de mise, ne reste que le charme.
Smell of fire est déjà là, en coup de grâce, illuminée par le saxophone de Loïc Laporte, et le disque file comme une balle au dessus du bitume, les paysages d'ombres et de lumières, sans cesse animés, se dessinent dans les phares. That's fine for me s'agrippe à nos cuirs comme une baby de Coney Island, From lead to gold est une aguicheuse de dancefloor, Memories box, Lonesome king, Tchi tchi kokomo sont autant de franches réussites, des frangines malignes aux courbes mouvantes soulignées par l'inventivité des arrangements et les interventions en embuscade de Pablo Acedo. Ce jeune guitariste est l'indéniable révélation du disque, la singulière personnalité de son jeu amène un décalage salutaire sitôt qu'un titre aurait l’inconscience de trop flirter avec la norme. Entièrement auto-financé, enregistré en une petite semaine, From Lead To Gold ne souffre d'aucune comparaison et se permet le luxe, avec Almost blind, de se conclure en laissant entrevoir une possibilité d'évolution plus radicale encore. Ce groupe n'a pas abattu tous ses atouts. Reste à espérer que quelqu'un, quelque part, dans les médias, les maisons de disques fasse son travail autrement qu'en fabriquant des têtes de gondoles, et donne des moyens supplémentaires à l'expression de ceux qui considèrent, et démontrent, que la musique n'est pas seulement l’œuvre des taxidermistes.
Staretz vient de réussir un
splendide album, un disque comme plus personne n'en fait, avec une
vivacité qui n'a rien à voir avec la rage, l'énergie feinte des gros
bras. From Lead To Gold est fin, racé et digne. Gardez vos comparaisons, j'ai jeté les miennes, ce disque mérite de n'être aimé que pour lui-même.
Bien vendu et donc bien pré-acheté. Je me soupçonne d'acquérir le disque aussi pour voir si tu es capable d'exagération pour pousser le truc.
RépondreSupprimerTu avais bien réussi ton coup sur "Go Down South" Le clip donne déjà une bonne idée du futur du truc.
Ceci dit je suis client, conquis d'avance. Mon souvenir dès les premières écoutes des Feelgood... Des Inmates... Thorogood. Volontairement pas originaux mais je découvrais des disques qui tapent de suite et qui tapent encore après d'autres écoutes, c'est ça la bonne surprise, je me méfie de moi quand j'aime de suite. J'ai même tendance à ne pas trop concentrer les écoutes de peur de gâcher. Mais pour ce rock là, j'arrête la prudence.
Et c'est là que le disque de Staretz est intéressant, il part des bases pour mieux les détourner en cours d'exécution. Prends un morceau comme Tchi tchi kokomo, à l'attaque c'est du pur Canvey Island, du Dr Feelgood période Malpractice, sauf que déboule le farfisa et voila qu'on se retrouve en plein rollercoaster avec Question Mark qui sature dans la sono.
SupprimerLe disque est bourré d'idées pertinentes, sans faire étale de leur culture, ils ont su l'utiliser pour enrichir leur musique tout en restant fidèles à ses racines. Joli coup gagnant.
Formidable album, compositions très inspirées et, surtout, une espèce de jeu multiforme et magnifique dans les arrangements ! Tout ce qui est écrit dans cette chronique me va fort bien, la bienveillance se mérite et vous avez décortiqué avec élégance la richesse du truc : on est dans l'inattendu, la surprise du chef. Une galette très très recommandable.
RépondreSupprimerEnfin un groupe qui lâche, les guitares, les voix, les claviers et trace sa ligne pour délivrer une tranche de Rock n roll bien saignante en évitant les poses de pseudo rebelles à la manque pour se concentrer sur l'essentiel.
RépondreSupprimerEt les compos... vraiment classe ce "bitter streets"
C'et peut être les French Groovies qu'on tient là.
Duke