mardi 19 novembre 2024

RouGe PRoFoND


Le subconscient est formidable. Charles Dumont meurt, je rêve de Willy DeVille. Logique implacable. Je me tiens au bord de la scène, tandis qu'il s'éreinte à éduquer un public de festival !!! Fataliste, il se tourne vers moi et me confie ce message "Le rock, c'est de pire en pire". Faudra vous contentez de ça, je lui ai demandé son mail sans avoir le temps de le noter, déjà j'entamais la lente remontée depuis les limbes vers la lumière.

Chemin inverse de celui qui accapare mon temps depuis des semaines. D'abord, j'ai réfrigéré mes méninges en consacrant toute une journée aux albums de Burzum, territoir survivaliste de Varg Vikernes, et comme un mal ne vient jamais seul, j'ai enchainé sur les trépanés finlandais de Minotauri. Non pas qu'ils soient meilleurs que d'autres du même acabit. Leurs disques sont d'une uniformité hypnotique, là où Burzum manie les contrastes pour étreindre l'esprit d'un inexorable noeud coulant idéologique, Minotauri tabasse le crâne d'un sempiternel même geste, tout en braillant des textes riches en apocalypses écologiques, en cimetières réconfortants, en solitude dépressive. Une version dégénérée de l'oeuvre de Geezer Butler. Les textes de Varg Vikernes, c'est une toute autre affaire, on n'y comprend rien. L'un veut soumettre, les autres veulent détruire. Les jeunes de 40 ans appellent ça du Doom Metal, je l'ai lu dans Rock Hard Magazine. J'en ai profité pour dévorer leur dossier sur Reverend Bizarre, les champions incontestés du genre. Leur truc à eux, version extrémiste de celui de Minotauri, c'est recycler Black Sabbath en accentuant leurs aspects les plus répétitifs et craspecs. En gros, ils ont viré tous les breaks zarbis au bénéfice des riffs (un seul par morceau de 20 minutes) et ralenti le tempo autant qu'humainement possible. Vous pouvez vérifier sur Youtube, le bassiste descend une canette entre deux notes. Le tout sonne comme enregistré non pas dans un garage, mais dans une cave. Humide, poussièreuse et alimentée en 110 volts. Voyez le cliché, il fonctionne. 

Evidemment, tout ceci influence mes lectures et me réconcilie avec Camion Blanc -quoique ça vient sans doute de nos récents échanges de commentaires- leur publication Black Metal Satanique, Les Seigneurs du Chaos, versant biblique du film, trouve sa place en haut de ma pile. Bref, tout va pour le mieux. 


Les associations d'idées sont formidables. Quoi de mieux à faire pour empirer délibérément le mal que de dégainer la filmographie de Dario Argento ? Je vous le demande. Le programme de la semaine est chargé, Phénoména, c'est fait, le singe, Jennifer Connelly, Iron Maiden, on ne va pas y revenir, Le Cabinet Des Rugosités s'en est chargé (ici). Les autres vont suivre à raison de deux par jours. J'attends juste que le ciel vire au blanc. Blanc poussière comme l'éclairage de Ténèbres. Celui qui m'impatiente le plus est Profondo Rosso (Les frissons de l'angoisse). Avec Macha Méril qui se fait trucider au hachoir. Argento est un génie. Je vais tous me les refaire, jusqu'au Syndrome de Stendhal. Les suivants, je ne les ai jamais vu. Milady veut tenter Dracula, j'ai pris Lunettes Noires. Et pour varier de Dario Argento, j'ai aussi mis le grapin sur Le Parfum De La Dame en Noir de Francesco Barilli. Avec Mimsy Farmer ! Toute nue. Comme d'habitude, certes, sauf que cette fois elle est sur une table d'autopsie. Voyez le genre.



Et Willy ? J'ai failli, ce matin, démarrer la journée (ensoleillée) par un de ses albums. Mais lequel ? Impitoyablement le constat s'est imposé, froid comme le verre brisé qui décapite dans un Giallo, plus aucun de ses disques ne tient sur la durée. C'est aussi vrai pour tous les disques du New York de la fin des seventies. Les gars étaient des personnages pas croyables, les biopics ne vont pas tarder, pour autant plus aucun disque ne me donne envie. On a chacun nos favoris; le premier Blondie, Ramones leave Home, Johnny Thunders so alone, Mink DeVille coup de grâce...aucun n'a su vieillir. Et c'est normal, c'était pas le but. La pertinence du rock était dans sa connexion avec le quotidien, le lien est rompu depuis belle lurette. Les grands classiques recencés comme tel dans les encyclopédies tutoient dorénavant les médiocres. J'en arrive à préférer m'envoyer By Numbers plutôt que de devoir supporter une fois de plus Who's Next. La déclinaison est infinie, valable pour les uns et les autres. Pas de remords à les laisser prendre la poussière. Poussière ? Ténèbres ! Je me suis remis une dose de terreur. Les associations d'idées sont incurables.

Hugo Spanky