Rob Zombie. Faire un
machin qui tienne debout, soit un brin cohérent et réussisse à
faire partager l'état d'esprit de Rob Zombie, voilà le genre d'idée
à la con qui me traverse le ciboulot après m'être enchaîné
l'intégrale cinéma du bonhomme en l'espace d'un week end.
Rassurez-vous, on n'a pas
fait que ça avec Milady, on a aussi écouté ses disques entre deux
films. Manière d'être bien dans le mood.
Musicalement, c'est vite
fait, avec White Zombie puis en solo, Rob, c'est le gars qui a
inventé Marilyn Manson dix ans avant tout le monde. Le premier a
avoir passé Alice Cooper à la sauce Trash-Electro en y adjoignant
des clips psyché complet. Par chance, il savait aussi faire autre
chose.
Quelques-uns des
meilleurs films du moment par exemple.
House of 1000 corpses
son premier long métrage réalisé en 2003 est d'emblée un sacré
coup d'essai. Ce film est un trip qui refuse de descendre. Si bon
nombre de films d'horreur souffrent du même défaut, une heure de
paluchage avant une ultime scène bien canon, celui ci n'arrête
jamais. La maison des mille morts est un inventaire de ce que le
cinéma a pu inventer comme supplices filmés de toutes les façons
possibles, principalement les plus loufdingues. En noir et blanc, en
couleurs saturées, en négatif, balancez moi tout ça dans la
marmite et faites bouillir. Il serait vain de dresser une liste des
références et clins d’œils qui défilent deux heures durant, les
ingrédients sont multiples mais la saveur est unique. Voyage au pays
des trépanés. Rob Zombie nous gâte, ressuscite Sid Haig et Karen
Black, nous présente Walton Goggins et fait jouer les hystériques à
sa femme. A la fin de House of 1000 corpses, on n'a qu'une seule
envie, achetez un ticket pour le train fantôme et s'envoyer aussi
sec la seconde réalisation du Zombie.
Et la suite du programme,
voyez comme le monde est bien fait, c'est The Devil's rejects. Soit
le film le plus cintré, le plus vicieux, le plus violent et dépourvu
de la moindre trace de morale depuis...ben, j'en sais rien. Depuis
toujours.
The Devil's rejects
commence par un massacre, finit par un massacre et entre les deux
c'est une boucherie. The Devil's rejects c'est aussi l'affirmation du
talent de Mme Moon Zombie, Sheri de son prénom (quand je vous dis
que le monde est bien fait), une actrice qui si elle ne joue
quasiment que dans les films de son homme ne le fait pas moins avec
un talent qui laisse sur les fesses. Regarder la façon dont Rob
Zombie filme sa femme résume assez bien son cinéma, pas de
maquillage camouflage, pas de filtre 20 ans pour la vie,
encore moins de retouche numérique. Le gars bosse à l'ancienne, à
l'éclairage, et si on aperçoit des cernes, des rides et quelques
poils, tant mieux, la part de réalisme fait partie de la réaction
psychotique qu'il cherche à provoquer chez nous.
Ce qui ne veut pas dire
que Rob zombie fait dans le documentaire pénible avec du gris sur du
noir, loin de là. Avec lui c'est festival de néons flashy et
couleurs hurlantes, l'enfer ne fait pas semblant d'être rouge !
C'est même ce qui sauve The Lords of Salem, son dernier méfait, ces
tableaux aux couleurs saturées que l'on jurerait sorti de chez Dario
Argento. Ça et aussi l'interprétation impeccable de Sheri Moon. Pas
que le film soit un navet, Milady l'a adoré, y a trouvé à juste
titre des références à L'Au-delà de Lucio Fulci, et moi même je
n'ai pas d'avis tranché, c'est le soucis, pour la première fois je
vois un film de Rob Zombie qui ne me colle pas les nerfs en pelote,
ne me donne pas envie de réduire la moitié de la ville en cendres,
d'aller fracasser des cranes, d'étrangler le premier quidam à
passer sous mon réverbère, éviscérer le chien de ma voisine,
ébouillanter vif mon conseiller pôle emploi. A la fin de Lords of
Salem, j'ai fait des spaghettis au pistou, finalement c'est bien
aussi.
Si The Devil's rejects
restera mon favori pour bien des raisons, je pense néanmoins que les
deux Halloween sont ses chef d’œuvres. Le premier pousse l'aspect
white trash encore plus loin que Devil's rejects et surtout, en
choisissant de se pencher sur le cas Michael Myers dès son plus
jeune age, Zombie évite le remake ainsi que toute comparaison.
D'ailleurs, il n'y a rien de comparable entre son film et celui de
John Carpenter même si les codes sont tous là. A commencer par
l'impayable Docteur Loomis que Malcom McDowell s'approprie avec une
sobriété qui lui fait honneur. Le Dr Loomis, c'est le pivot de la
saga, c'est l'humanité impuissante face à ses démons, c'est
Derrick à la poursuite de Satan, David Vincent devant affronter
l'incrédulité générale, il est là, je le sens en guise de
ils sont parmi nous. Donald Pleasence restera indétrônable
dans son interprétation toute en frustration, Mc Dowell a
l'intelligence, tout en ne s'éloignant pas tant que ça du modèle, de
ne pas chercher à le singer. Il fait du Dr Loomis un Yuppie âpre au
gain, qu'on devine plus que vaguement intéressé par les arguments
de Maman Myers.
Rob Zombie pose son
empreinte sur la saga en s'attaquant à l'origine de la psychose de
son héros, en faisant cela, en nous dévoilant Michael Myers enfant,
il ancre son film dans la réalité. Difficile dès lors de se dire
que cela n'existe pas, que ce n'est qu'un mythe, son Halloween nous
fait le même coup que le premier Mad Max, l'horreur prend naissance
dans la maison du voisin, jamais nous ne connaîtrons la paix. Pour
ne rien gâcher, la réalisation est magnifique, d'un classicisme
absolu, il y a du grain sur l'image, de la chaleur, quelque chose de
William Friedkin. Rob Zombie est un héritier certainement pas un
hérétique.
Avec Halloween II en 2009
il tutoie les sommets. Il s'approprie définitivement l'histoire et
ajoute une magnifique touche onirique à sa réalisation. Dans ce
second volet, Rob Zombie nous place dans l'esprit même de Michael
Myers, dans ses visions, il fait de nous les témoins de sa volonté
de réparer sa faute en réunissant à nouveau sa famille, certes
avec des méthodes quelque peu excessives. Soudain, on se prend
d'affection, la répulsion disparaît et c'est le reste du monde qui
devient source de danger, de provocation, de méchanceté gratuite. Ce qui n'était qu’embryonnaire dans le premier volume devient
évidence, Michael Myers c'est David Carradine dans Kung Fu, il lutte
contre la violence mais la société lui impose de l'utiliser.
Comme souvent lorsqu'un
réalisateur s'éloigne un tant soit peu des stéréotypes d'une
saga, le film fit un bide. Les gardiens du temple Halloween offusqués
comme les grands couillons qu'ils sont n'y retrouvant pas leur
Michael Myers de toujours. Peuchère, Rob Zombie avait commis un
impair, ne pas miser sur la connerie du public, s'imaginer que les
gens ne souhaitent pas voir sempiternellement le même film. En
France, comme toujours, ce sera directement en DVD que l'on pourra
apprécier la bête et uniquement en Blu-ray pour ce qui est de la
version Director's cut. Trop fort le pays de la Culture.
Pas de quoi s'inquiéter
pour l'avenir, Rob Zombie déborde de projets. Son dernier album en
date Venomous Rat Regeneration Vendor est excellent et plusieurs
films sont annoncés. On va rester connecté au Grand Zombie Circus,
les occasions de se mettre les pupilles en mode hallucinatoire se
faisant trop rare pour qu'on
se prive d'un esprit aussi peu enclin à la normalité.