vendredi 28 août 2015

cReTiN HoP !


Quoique vous soyez en train de faire, quelque soit l'importance que vous y attachiez, laissez tomber immédiatement. Right now ! Parce que tout ce dont vous avez besoin c'est de regarder sans perdre le moindre foutu instant Sex & Drugs & Rock & Roll.

Cette décapante série, rapide comme un 45 tours, 25mns par épisode, avait tout, sur le papier, pour effrayer même le pire adepte des clichés du Rock'n'Roll. Je vous fais le pitch en deux lignes : Un vieux rocker (un rocker, quoi) calciné par la coke, le whisky et les pétasses refuse d'accepter qu'il est au bout de la route, même pas de la highway to hell, plutôt du chemin de traverse. Terminé, finito, plus personne ne veut en entendre parler. Surtout pas son propre groupe ! Qui d'ailleurs n'existe plus, le guitariste gratte derrière Lady Gaga et le bassiste soigne sa dépression en chantant l'Irlande de la grande famine. Partez pas de suite, j'ai pas fini. Là dessus arrive sa fille, dont il ne connaissait l'existence ni d'Eve, ni d'Adam. La môme est belle comme Lindsay Lohan à vingt ans et....et on s'en bat les noix. Tout connement parce que quelque soit l'histoire que ça raconte, cette série est à pisser de rire !


Oubliez tout ce que vous pouvez imaginer comme étant hilarant dans une pellicule dont un groupe de rock foireux est le centre d’intérêt. Vous emmerdez pas à vous remémorer Wayne's world, Anvil ou Leningrad Cowboys, Sex & Drugs & Rock & Roll les fait tous oublier. Cette série est parfaitement stupide, incroyablement conne et tout bonnement jouissive. Elle ne joue pas au plus fin, elle se roule dans les clichés comme un cochon dans sa merde. Comptez pas non plus sur elle pour stabiloter les vannes, ça chambre sur Richie Sambora, Keith Richards, Steven Tyler, Joan Jett (qui apparait en guest) ou Roger Daltrey et si vous pipez pas ce qui est drôle là dedans, pas de soucis, un autre truc vous fera marrer deux minutes plus tard comme lorsque sevré de drogue notre héros se retrouve incapable de composer autre chose que du Radiohead mâtiné de Morrissey. Un cauchemar.



Denis Leary, ça vous dit quelque chose ? Non ? C'est bien dommage, ça signifie que vous vous contrefoutez des films de Tom DiCillo et ça c'est franchement un sacré problème que vous avez. Les films de Tom DiCillo sont ce que le cinéma nous a donné de meilleur depuis 30 ans. Johnny Suede, The Real Blonde, Living in Oblivion (Ça Tourne à Manhattan), Box of Moonlight, Double Whammy (Bad Luck), Delirious, When you're Strange, la liste n'est pas longue mais chacun de ces films doit être vu et revu. Ils sont la quintessence du cinéma New Yorkais, autant dire la quintessence du cinéma rock. Pour si peu que ça veuille dire quelque chose. Quoiqu'il en soit, Tom DiCillo a compris deux ou trois trucs essentiels au bon fonctionnement de l'être humain. En voyant ses films, on les comprend aussi. 


Denis Leary, ça vous dit toujours rien ? C'est pas grave mais tachez quand même de voir Double Whammy de Tom DiCillo, c'est lui qui y tient le premier rôle. On le trouve aussi aux côtés de Christopher Walken dans Suicide Kings de Peter O'Fallon. Et c'est également lui qui écrit, produit et parfois réalise Sex & Drugs & Rock & Roll, c'est comme ça que je me suis penché sur cette série. C'est grâce à ça que je suis excité comme une puce sur mon clavier alors que comme tout un chacun je devrais avoir bien mieux à foutre à 23h23 même un jeudi soir. 




D'ici deux ans, les tristes sires tenteront de vous vendre Sex & Drugs & Rock & Roll comme étant le nouveau Spinal Tap, en réalité c'est du côté de The Office et Eastbound and Down que ça se situe. C'est filmé comme un documentaire, c'est crétin à souhait, corrosif, incisif, ça trace à toute berzingue et dézingue tellement de cartouches à la minute que je ne sais pas comment ça va pouvoir durer. Et si faut ça durera pas, peut être bien que c'est carrément pas fait pour durer. La première saison attend son 7ème épisode au moment où je vous cause, c'est dire si c'est ici et maintenant que ça se passe. Be there or be square.

 
Hugo Spanky

mercredi 26 août 2015

AaRoN NeViLLe EsT ViVaNT !



Il y a des disques dont on se dit que c'est même pas la peine d'en causer, qu'ils sont de telles évidences que chacun d'entre nous va se démerder pour les écouter, les chérir, se faire dorloter par la douce chaleur qu'ils dégagent. Et puis arrive l'accident de parcours, le disque qu'à force de se dire qu'il va tomber du ciel jusque directement sur la platine, on finit par passer à côté.


L'album d'Aaron Neville, My True Story est celui là, ma croix à porter. Le machin est sorti fin 2013 et j'en ai rien su, même pas un coup de fil de Keith Richards, élégant et parfait producteur de l'album, pour m'inviter à partager le gumbo. 
En fait de gumbo, c'est plutôt sous la promenade de Coney Island qu'Aaron Neville nous invite à le rejoindre, s'il ne manque pas d'ingrédients venus de la Nouvelle-Orléans My True Story n'en est pas moins un hommage au Doo Wop de Brooklyn, aux romances de la Motown aussi. Visez un peu le menu, Money honey, Ruby baby, Be my baby, Ting a ling, Tears on my pillow, Goodnight my love. Le Work with me Annie de Hank Ballard & The Midnighters traine dans un coin et This magic moment reste la plus belle de toutes, éternellement. Aaron n'a pas oublié Under the broadwalk, ni Little bitty pretty one de Frankie Lymon et d'autres encore que je vais pas vous enfiler comme les perles d'un collier. 


Aaron Neville, j'ai eu l'honneur de lui serrer la paluche quand j'étais tout juste un homme et je peux vous dire que j'en suis pas peu fier. Des gars qui m'ont impressionnés y en a pas eu des caisses mais lui, pfiou, voir ma main disparaître dans la sienne, ça m'a fait un choc. Aaron Neville c'est pas juste physiquement qu'il est grand, c'est pas juste par son talent qu'il est impressionnant, c'est par sa vie, par ce qu'il est. De son premier hit en 1967, Tell it like it is à ce My True Story, que de groove et de bonheur il aura dispensé de par le vaste monde. A chaque fois que j'en ai eu l'occasion je suis allé le voir sur scène, à chaque fois je m'en suis félicité. J'ai même invité mon père à un concert des Neville Brothers. Mon Marcel ne m'a jamais fait de reproche et c'est pas ce soir là qu'il allait commencé, je le revois encore, tout aussi embarqué que moi par la voix de ce foutu bonhomme à l'allure aussi rustre qu'il se révèle délicat. Même si ça saute pas aux yeux de prime abord. 


C'est que tout n'a pas toujours été rose pour cet enfant de la Nouvelle-Orléans, le temps se sera parfois écoulé bien lentement depuis ses débuts sur les scènes du Mardi Gras en 1954. Aaron Neville connaîtra les prisons du sud au moins deux fois dans sa jeunesse, six mois en 1958 pour une histoire de voiture volée "on était huit par cellule, sans compter les rats..." puis un an dans les 60's pour cambriolage. Longtemps il vécut avec le singe sur le dos ne parvenant à décrocher qu'à la fin des années 70 lorsqu'après des décennies d'errance et de sales boulots il unit son talent à celui de ses frères et se consacre définitivement à la musique. Dans un reportage qui lui est consacré, un de ses fils confie : "Mon père creusait des tranchées et travaillait aussi comme docker pour remplir nos assiettes, on n'avait pas de frigo, juste une glacière. A ce moment là, il avait mis la musique entre parenthèses, c'est à l'enterrement de ma grand-mère que mes oncles l'ont convaincu de s'y remettre à fond"


Depuis Aaron Neville a enregistré au gré des contrats, des disques qui s'ils ne frôlent jamais la crise cardiaque se sont avérés de fidèles compagnons. Il faut entendre son Doo Wop Medley sur le Live at Tipitina's Volume II des Neville Brothers pour situer le niveau ou son incarnation d'Avé Maria sur  Warm Your Heart son album solo de 1991 qui le voit œuvrer au milieu de pointures dont les noms suffisent à donner le tournis, Rita Coolidge, Dr John, Ry Cooder, Bob Seger, Jim Keltner ou Linda Ronstadt avec qui il grave par ailleurs l'album Cry Like A Rainstorm sur lequel on trouve une éblouissante version du When something wrong with my baby de Sam & Dave

En 1993 il sort successivement The Grand Tour et Soulful Christmas un album de Noël a faire rougir Santa Claus. Le machin ne vole pas son titre mais n'est pas exclusivement conçu pour une veillée en forme de recueillement, il suffit de se caler Louisiana christmas day, Let it snow ou Such a night pour piger qu'entre deux desserts Aaron a des projets pour le petit Jésus. Pardonnez moi du peu. 


I Know I've Been Changed de 2010 est capté en une poignée de jours passées aux côtés d'Allen Toussaint. Les deux hommes font vibrer le répertoire gospel avec une ferveur et une fougue peu commune qui atteignent parfaitement leur but, ne pas rompre après la dévastation Katrina. Pour empêcher les rythmes de Big Easy de faire tortiller les bassins, il faudrait bien plus que les éléments déchainés. Cherchez pas, ce disque là il vous le faut.
Et même quand la production se fait trop envahissante comme sur To Make Me Who I Am en 1997 auquel je préfère l'impeccable The Tattooed Heart (1995), Aaron Neville rattrape toujours le coup par la plénitude de cette voix comme il n'en existera jamais plus d'autre. Il sera bien temps alors de regretter que ce bonhomme n'a pas eu la reconnaissance qui l'aurait autorisé à enregistrer plus souvent ce qu'il souhaitait vraiment. Comme sur My True Story justement, cet album que la présence de Keith Richards a permis de faire distribuer par le label Blue Note, depuis quelques temps repris en main par Don Was, producteur des Stones. Ceci expliquant cela.


Avec ses frères, dont deux furent membres des légendaires Meters, Aaron enregistra une poignée de disques passés largement inaperçus entre 1976 et 1987. D'abord sous le nom de Wild Tchoupitoulas, le temps d'un disque qui les voit accompagner George Big Chief Jolly Landry dans la plus pure tradition de la Nouvelle-Orléans, puis sous celui de Neville Brothers
Pas assez Disco, pas assez Rock, carrément pas Punk, les labels se succèdent mais aucun ne sait quoi faire du groupe et tant pis si Aaron fait des miracles sur Arianne, une ballade incroyable de beauté que l'on trouve sur leur tout premier disque commun, un bijou absolu produit par Jack Nitzsche et paru sur Capitol en 1978.


En 1981, Fiyo In The Bayou régénère le son des Meters dans l'indifférence générale, Aaron s'en fout pas mal que la mode soit à la new wave, plutôt que de se laisser pousser la mèche il s'octroie des versions de Mona Lisa et The ten commandments of love d'un classicisme absolu entre grand piano et violons. De toutes façons rien n'y fait, même l'ultra putassier Uptown sortit chez EMI en 1987 se ramasse un bide alors qu'on ne peut pas dire que les frangins y soient allés avec le dos de la cuillère.


Le succès viendra enfin avec l'album Yellow Moon produit par Daniel Lanois en 1989, une réussite sans conteste qui fera grimper en flèche les ventes de bougies noires et de pattes de poulet, rapidement suivi par le splendide Brother's Keeper, leur meilleur album en ce qui me concerne, puis le solidement funky Family Groove. Un triptyque qui aurait dû les mener crescendo jusqu'au sommet de la reconnaissance. Au lieu de quoi, c'est dans les bacs à soldes qu'on a la plus sûre chance de les trouver. Que voulez-vous, le monde est ainsi fait qu'un groupe capable de sublimer le répertoire de Bob Dylan avec autant d'aisance que celui de Link Wray, Sam Cooke ou Leonard Cohen n'arrive pas pour autant à vendre de quoi s'éloigner des clubs du French Quarter, de Tremé ou Storyville. Je ne suis pas sûr que ça soit pour leur déplaire, ceci dit. Et soyons honnêtes, pour une fois on n'est pas les plus mal lotis. Durant toutes les années 90 le groupe a multiplié les visites en France, que ce soit en tête d'affiche, en première partie de Joe Cocker ou en compagnie de Willy DeVille le temps d'une invraisemblable revue New-Orleans qui les mena à Nîmes en 1992 pour un concert mémorable doté d'un casting royal, Dr John, Johnny Adams, les Wild Magnolias et Zachary Richard. C'est cette après midi là que je suis tombé par hasard sur Aaron Neville tandis qu'on rodait l'un comme l'autre aux alentours du site. Dans la rue, comme il se doit pour une rencontre.



Hugo Spanky

samedi 22 août 2015

LoOKiNG foR BRuCe SPRiNGsTeeN



Les rock stars portent un masque, parfois une multitude de masques. La scène est un jeu de dupe, on croit à la rencontre d'un public et de son idole, rien n'est moins vrai. On assiste à un spectacle où chaque mot est répété chaque soir, ou chaque bref instant d'intimité partagée n'est que fantasme, on communie par mensonge consenti. On applaudit à tout rompre celui qui nous bernera avec le plus d'agilité.

Et puis il y a Bruce Springsteen. Monsieur Loyal. Celui par qui le mensonge périt, l'homme qui ne triche jamais. Et qui pourtant ne fait que ça. Bruce Springsteen s'est engueulé avec sa femme ? Bruce Springsteen a 39 de fièvre ? Une entorse ? On n'en saura rien, il grimpe sur scène et délivre ses 4 heures de montagnes russes comme s'il venait d'avaler son bol d'Ovomaltine. That's entertainement ! Comme les Rolling Stones jouent devant les caméras de Scorsese tandis qu'Ahmet Ertegun agonise dans une loge.
Surtout, Bruce Springsteen va plus loin dans l'absence de soi. Est-ce par pudeur ? Par sens du devoir à accomplir ? J'en sais foutrement rien mais le fait est que depuis, combien ? 30 ans ? il n'a de cesse de se cacher, de renoncer, d'y revenir. Quand on le pense mis à nu, il ne fait qu'enfiler un nouveau costume, illusoirement usé comme trop porté, celui de Nebraska, l'homme américain dans ce qu'il a de plus brut de pomme pile au moment où les médias se questionnaient sur son éventuelle homosexualité. Puis les muscles et les litres de sueur, les bottes de chantier et au final une sérieuse psychanalyse parce que, bon, on a beau être le boss au bout d'un moment on ne se comprend plus soi-même à jouer ce jeu là trop longtemps.


Et de retrouver notre Bruce Springsteen remis du triomphe mondial, rétablis et heureux comme un pape en Avignon par la magie d'un second mariage cette fois réussi. Pensez donc, une rouquine bourlingueuse qui joue la choriste sur l'album de Keith Richards, c'est autre chose que la blonde évaporée qui trouvait le temps long au bord de la scène pendant que son homme à testostérone maximale se faisait péter les veines du front en hurlant son acte de naissance.

Avec tout ça on en arrive au milieu des années 90 et le boss est redevenu fréquentable, la critique ne s'y trompe pas, The ghost of Tom Joad ! Malheur, les inrocks se font dans la culotte, c'est plus le Stallone du microsillon, c'est John Steinbeck ! John Ford ! John Springsteen ! Enfin, il se dévoile, ça y est on le tient, le boss est un lettré, non seulement il lit des livres avec plein de pages dedans mais en plus il les comprend ! Hallelujah, tout le monde est d'accord, Springsteen a fait la paix avec lui-même et ne cache plus sa complexité derrière des montagnes de Marshall en surchauffe.




Sauf que non. Rien n'a changé, plus on en voit et moins on en sait, Bruce Springsteen continue à enterrer ses plus œuvres les plus personnelles, il persévère à garder son jardin secret. Secret Garden, c'est d'ailleurs le titre que j'ai donné à l'album manquant, celui qu'il renonça à sortir quelque part entre Tom Joad et The Rising, l'album qui aurait été le plus sensible, le plus féminin, le plus dépouillé d'artifice, fussent-ils ceux de la simplicité rustique. Un disque dont seul quelques morceaux verront le jour éparpillés de ci, de là, en maxi 45 tours, sur des musiques de films ou des années plus tard sur Tracks, le coffret d'inédits qui en raconte plus long sur le bonhomme que tous les albums officiels ne le feront jamais. Dans ses chansons, Springsteen invente des personnages, des situations, il  les incarne avec tellement de ferveur qu'elles firent sa gloire. Le boss n'a pas son pareil pour parler de nous, les Fonzie de l'existence, mais quand il torche des chansons qui parle de LUI, il les met inévitablement au rencard. 

Cet album imaginaire c'est celui de Street of Philadelphia, de Missing, de Back in your arms, d'American skin aussi, celui de Lift me up ce morceau à voix de fausset inspiré par Antony and the Johnsons dont le boss est raide dingue mais que les biographes citent moins facilement que John Fogerty. Secret Garden, bien gardé le secret. Bien maquillées les fêlures du boss. Sacré jeu de piste aux indices qui se dérobent, dont il faut saisir des fragments pendant la coda de la version live de The river durant la récente tournée, sur Tunnel of Love aussi ou la série de concerts avec harmonium qui suivit Devils and Dust et sur High Hopes ce dernier album qui faillit être celui là. Le reste du temps Bruce Springsteen est en mission. Car si lui ne tient plus droit dans ses bottes, qui le pourrait ? Si même lui n'incarne plus l'Homme éternellement fort, alors John Wayne n'aura servi à rien. 


Ces temps ci Bruce Springsteen chante sur le générique de Show me a hero, la nouvelle série qui compte mais il est où le disque avec Happy ? L'album qui montre que Bruce Springsteen ne fait pas que gratter sa pelle assis dans sa cuisine en marmonnant des histoires de tueurs en séries, qu'il sait aussi dessiner des esquisses de symphonies avec des nappes de synthés et une boite à rythme délicat. Brothers under the bridges, Don't back down, tout un univers de Pop avec âme. Tout ce qui manque à ce style trop souvent dépourvu de profondeur,  Bruce Springsteen en avait la recette et il ne nous en aura offert qu'une infime partie. Parce que tout n'est que mensonge, bien au delà des rêves qui ne sont pas réalisés et que, non, quelque soit les affirmations, le monde n'est pas prêt pour Bruce Springsteen. Trop friands de héros que nous sommes pour se voir humain tel que l'on nait. Comme dans le miroir dont chaque matin on s'empresse de corriger le reflet.

Hugo Spanky