Pile au moment où je pensais classer l'affaire des séries de grande envergure, Mindhunter m'est tombée sur le râble sans crier gare. Le synopsis avait tout pour que je passe mon tour, et je ne m'en suis pas privé. Pensez donc, un énième épanchement sur deux experts du FBI en charge de dresser le portrait de quelques-uns des plus traumatisants tueurs en séries de l'Amérique du vingtième siècle. Experts, profilers, unité spéciale, autant de mots-clés pour roupiller sur son canapé sans même prendre la peine de dégainer une Heineken. Franchement, si c'était pas que Milady laisse trainer ses pupilles sur tous ce qui est affaire de crimes, je ne me serais jamais penché sur le cas de ces deux oiseaux en costard fédéral. D'ailleurs, à tout dire, j'ai carrément zappé le premier épisode, préférant poser un disque sur la platine que de m'imposer 50 minutes de désillusions. Sauf que dès le deuxième, Ed Kemper s'invite à la fête et, comment dire, Ed Kemper c'est mon dada. Alors, j'ai regardé. Et j'ai plus bougé jusqu'au dénouement final, qui tient à peu près autant d'un dénouement final que celui censé conclure la saga des Soprano.
Partez pas, je ne vais rien spoiler du tout. Juste vous dire que Mindhunter a tout ce que The Deuce n'a pas. Un casting béton, d'abord. Pas du tape à l’œil, du qui tient l'endurance. De la tronche à l'ancienne, façon Les rues de San Francisco pour le duo de tête. Les fameux deux agents du FBI qui vont, pour la première fois de l'histoire, chercher à rendre utile l'emprisonnement à perpétuité. Vu qu'en Amérique ce terme signifie encore ce que le dictionnaire en dit, autant en profiter pour ne pas nourrir les condamnés à rien foutre. Et c'est là que mon Ed Kemper entre en piste. C'est le premier sur la liste, celui dont le profil et le discours sur la méthode vont servir de base à une plus précise compréhension du monstre que sait si bien cacher l'être humain derrière des siècles de bonnes manières.
Chapeau bas à celui (ou celle, c'est pas le moment de déconner avec ce genre d'oubli) qui a déniché(e) Cameron Britton pour camper Kemper. Je ne sais rien de cet acteur, je n'ai souvenir de ne l'avoir vu nulle part, mais bordel, j'espère qu'il n'a pas passé ces derniers mois à se taper des branlettes en public, ni à tripoter les fesses des starlettes de Hollywood, parce que j'aimerais assez que sa carrière ne soit pas flinguée avant qu'il ait eu le temps de tourner dans la saison 2. Voire plus. Dans le genre qui a bien cerné son rôle, il ne risque pas que la concurrence vienne lui arpenter les arpions. Cameron Britton est débonnaire et flippant dans un même plan fixe, exactement comme on s'imagine qu'Ed Kemper doit l'être. Je ne veux pas savoir où il a appris à ressembler de la sorte à un gonze qui a débuté sa crise d'adolescence en dessoudant ses grand-parents.
Qui dit grands hommes, dit petites pépées pas bien loin. Sachez simplement qu'Anna Torv est mieux que ça. Mindhunter n'a pas recruté ses rôles féminins dans les pages des magazines de mode, ce qui fait un bien fou. Non pas que ce soit des laiderons, loin de là, mais qu'il est agréable pour le mâle que je suis de se sentir considéré comme capable d'apprécier une bonne actrice. La production de Mindhunter -David Fincher (déjà producteur de House of cards, dont je n'ai toujours pas vu la moindre seconde) et Charlize Theron- s'est fixé comme mot d'ordre de respecter son public. Réalisation rigoureuse, jamais ennuyeuse, script impeccable, scénario à tiroir irréprochable de cohérence, rythme de croisière dépourvu de temps morts, casting fondé sur la capacité de chacun à incarner une psychologie des personnages sur laquelle on peut s'appuyer. C'est tellement du bon boulot qu'ils ont même pas cherché à coller des tocs au premier rôle. Si ce n'est une tendance obsessionnelle à pratiquer le cunnilingus à la moindre occasion, on baigne dans le classicisme le plus absolu. Le jeune fougueux vaguement arrogant et le vieux bourru qu'à un gosse à moitié fini. Manière qu'on pige bien que c'est pas là que ça va se jouer.
Il n'y a pas de surenchère dans Mindhunter, les gars sont là pour créer une méthodologie permettant d'écrire la définition du serial killer jusque dans ces variantes les plus exotiques et c'est ce qu'ils font. Selon les épisodes, ils se prennent les pieds dans le tapis ou croisent une enquête locale, filent parfois un coup de main, avant de reprendre leur quête. On ne s'attarde pas à savoir l'aboutissement, le procès, les condamnations, c'est pas le propos et on s'en fout. On a reprit l'avion pour le pénitencier, enclenché la touche rec du magnétophone à cassettes et on provoque les confidences de Jerry Brudos ou Richard Speck, avec le frisson au bas du dos, les perles de sueur dans le creux de la nuque et l'envie que ça dure encore quelques minutes de plus.
Chapeau bas à celui (ou celle, c'est pas le moment de déconner avec ce genre d'oubli) qui a déniché(e) Cameron Britton pour camper Kemper. Je ne sais rien de cet acteur, je n'ai souvenir de ne l'avoir vu nulle part, mais bordel, j'espère qu'il n'a pas passé ces derniers mois à se taper des branlettes en public, ni à tripoter les fesses des starlettes de Hollywood, parce que j'aimerais assez que sa carrière ne soit pas flinguée avant qu'il ait eu le temps de tourner dans la saison 2. Voire plus. Dans le genre qui a bien cerné son rôle, il ne risque pas que la concurrence vienne lui arpenter les arpions. Cameron Britton est débonnaire et flippant dans un même plan fixe, exactement comme on s'imagine qu'Ed Kemper doit l'être. Je ne veux pas savoir où il a appris à ressembler de la sorte à un gonze qui a débuté sa crise d'adolescence en dessoudant ses grand-parents.
Hugo Spanky
Cameron Britton en impose effectivement. Les autres ne déméritent pas non plus à vrai dire. Parce qu'avec les rôles un peu cliché qu'on leur a attribué, ils donnent corps à leur personnage tout en l'aérant grâce à une interprétation naturelle et décontractée, ce qui manquait tant à The Deuce.
RépondreSupprimerCependant une question me taraude par rapport aux dates. Stéphane Bourgoin a également interviewé Ed Kemper et d'autres tueurs en série. C'était avant, après.. ?
Stephane Bourgoin a, selon ce qu'il dit, rencontré l'équipe de John E. Douglas (Holden Ford dans la série) à Quantico à la fin des années 70 et aurait bénéficié de leur aide pour rencontrer des serial killers. Comme souvent avec lui, il faut prendre ce qu'il s'attribue avec précaution, sans pour autant dénigrer la valeur de son travail. Ceci dit, il n'a certainement pas eu beaucoup d'influence sur le FBI.
SupprimerPour la comparaison avec The Deuce, Mindhunter en est quasiment l'exact opposé. Pas de nom cliquant au générique et une sobriété qui privilégie l'efficacité. Le choix de prendre des actrices plutôt que des top modèles résume bien l'affaire. Parmi ses nombreuses incohérences, The Deuce nous colle comme tapins du quartier le plus glauque de New York des nanas calibrées pour poser en Une des magazines les plus chics de la planète...))))
Ce qui fait la force de Mindhunter, c'est ce qui me séduit souvent dans le cinéma en général, c'est sa capacité à faire en sorte que l'on s'identifie aux protagonistes, que l'on ne se sent pas exclu de leur univers. On ressent leurs émotions. C'est un dialogue, pas une démonstration.
Bon, il était temps Hugo, on a failli lancer une pétition. J'ai (hélas) fini la série JUSTIFIED, vu deux fois dont les dernièrs épisodles avec ma douce qui a beaucoup aimé la série "au chapeau". Je suis loin d'avoir terminé SOPRANO que je dois lui "vendre"... Nous nous sommes agréablement perdu dans le premier épisode de "Dirk Gentlys Holistic" Mais ton "Mindhunter" je le sens bien, j'espère ne pas avoir à le regarder en loucedé, je vais lui faire lire ton article, car si je parle de "tueurs en série" elle va m'accuser d'aimer les trucs crapoteux (mais c'est vrai, ceci dit!!). Bon, faut que je teste un peu avant.
RépondreSupprimerJ'aimerai bien moi aussi être enthousiasmé par plus de séries, de films, de livres ou de disques. Sentir plus souvent ce besoin irrépressible de venir taquiner mon clavier. Hélas, triple hélas. Il y a la seconde saison de Vice Principals qui s'achève en crescendo de folie, il y aurait bien We are not animals (dispo sur netflix pour ceux qui l'ont) dont je n'ai vu que le premier épisode et dont je ne désespère pas de choper la suite. Il y a aussi la première moitié de la nouvelle saison d'American Horror Story, qui sonde les méandres de l’Amérique de Trump, avant de s'égarer comme à son habitude. Et aussi ce livre de Norman Mailer, Le chant du bourreau sur l'affaire Gary Gilmore, et cet autre du même auteur, Un château en forêt, gargantuesque somme sur l'enfance démoniaque d'Adolf Hitler, qui attendent que je leur sacrifie le temps nécessaire (que je consacre à l'autobiographie de Phil Collins...)
SupprimerBref, hormis sur le cas Vice Principals pour lequel j'espère trouver les mots pour en causer plus longuement, je piétine lamentablement sur le reste. En écoutant Funkadelic sans prendre de drogue )))
Pour ce qui est de séduire madame, je pense que Mindhunter sera à la hauteur. Les rôles féminins ont du fond et le jeune Jonathan Groff, qui incarne Holden Ford, a des airs de notre président Macron, ce qui devrait opérer dans ton sens (car, c'est bien son charme "à la Kennedy" qui l'a mené là où il est, non ?).
"Vice principals" c'est un OVNI ce truc. Un vrai régal. C'était trop bon.
SupprimerCarrément oui. Vice Principals est hallucinant et indéfinissable, je crève d'envie d'en parler, mais comment décrire ce truc ? La saison 2 finit demain et je suis déjà en manque. Je vais me refaire l'intégrale de Eastbound and down pour tenir le coup.))))
SupprimerAh putain, Eastbound and Down ...
RépondreSupprimerEuh ouais non j'voulais dire, à part que tu m'as convaincu avec ta prose, j'vais aller voir de quoi il retourne (tu voudrais pas nous faire un point TV genre tous les 15 jours, j'regarde pas moi chuis comme Dev j'attends tes tuyaux ...) euh je disais donc, une question me taraude à te lire : existe-t'il une autre manière (à part l'obsessionnelle) d'envisager le cunnilingus ?
Bonne question. Tout ce que je peux dire, c'est que si il existe une raison de s'en priver, ce n'est pas Mindhunter qui nous l'apprendra.)))
SupprimerOK bon ben je change rien alors ...
SupprimerMe voici bien avancé. Et soudain (en fait pas vraiment soudain) je me suis mis à penser que le traitement était plus "europeen" que Américain. Le bleu froid de l'image, la lenteur, les réflexions sans charger l'horeur mais tout en instillant au goutte à goutte une angoisse sourde, je pensais à un très bon film sur le theme de "tueur en série" et il est français aussi "Scènes de Crimes" est du même modèle. La même capacité à faire partager non pas l'horreur en montrant mais l'angoisse de ceux qui découvrent et doivent comprendre sans laisser l'émotion l'emporter. Le truc usant on imagine. J'avais vite décroché de "criminal minds" pour justement ne pas être arrivé à ce résultat, et ils ont essayé, mais l'intrigue devait l'emporter.
RépondreSupprimerTu as parfaitement défini ce que j'ai vu et aimé dans Mindhunter et que je n'ai pas su formuler aussi clairement que tu viens de le faire. Le bleu froid, la lenteur, cette angoisse sourde qui te serre les tempes, ce ressenti d'impuissance, parce que les gars arrivent après, quand tout est déjà fini et que toute leur ambition est de réussir à arriver avant. Ils ne sont même pas là pour enquêter, juste collecter les éléments d'un puzzle dont personne ne sait à quoi il ressemblera, ni le nombre de pièces qu'il contient. Ni si il est possible de le constituer. Le fait que Mindhunter se détache de l'intrigue policière est son point fort, c'est aussi ce qui offusque ses détracteurs. C'est dérangeant, cette sorte d'absence de morale, le bon ne lutte même pas pour gagner à la fin. Au lieu de quoi il nourrit son égocentrisme pour développer une intelligence avec l'ennemi. C'est une bonne chose.
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