lundi 19 décembre 2016

CHaRLie FaYe & The FaYeTTeS, IRRésiSTiBLeMeNT FuTiLe


J'ai beau être doté d'un enthousiasme naturel proche de Droopy, il m'arrive parfois de pétarader comme un feu de Bengale, soudain animé d'une sarabande d'étincelles. Et même si aucun risque de combustion spontanée ne se profile à l'horizon, je ne boude pas mon plaisir lorsque, au détour d'une énième journée à surfer sur le web en quête de l'hypothétique perle rare, me voila sous le charme d'une demoiselle d'Austin, Texas, et de ses charmantes acolytes.

L'histoire sera brève : Charlie Faye est texane comme je suis pape, c'est une new-yorkaise pur jus lassée de piétiner dans le circuit Folklo-Americana, au sein duquel elle joua un temps les duettistes avec Will Sexton (frère de Charlie sexton). 
En 2013, la dame décide d'en finir avec la morosité et choisit d'habiller dorénavant ses mélopées d'exaltations et de rythmes délicatement martelés. Aussi, lorsqu'au hasard d'une tournée, elle tombe sous le charme des rives du Colorado, elle y dépose ses valises et bye bye birdie. Fini de poireauter des heures que son guitariste franchisse le New Jersey turnpike depuis Hoboken pour pouvoir répéter, que son batteur rapplique du Bronx en maugréant sa sale humeur. Comme elle le confie :  "à Austin vous pouvez former un groupe en faisant vos courses au supermarché, n'importe où dans la ville des musiciens vivent à 5 minutes les uns des autres". Pratique.

De New York, Charlie Faye garde le up-tempo des Shangri-La's. De Austin, elle pique la rondeur des basses du sud. Pour faire bonne mesure, elle débauche ses copines Betty Soo et Akina Adderley, et rode un show à faire tomber raide les diabétiques. Entre reprises de Chains et Rockaway beach, elles affutent un répertoire personnel aussi parfaitement ajusté à la nostalgie ambiante que le sont les ravissantes robes Courrèges dans lesquelles elles batifolent. Dopé par les réactions du public, le trio a pris le temps, début 2016, de transformer l'essai en enregistrant un album, avec un malicieux coup de main de Pete Thomas, baguette en chef des Attractions d'Elvis Costello. Un album frais, pulpeux, ingénieux, inventif dans ses fioritures, intelligemment anglais et pourtant si typiquement américain.
Et même si elles n'inventent pas l'ouverture de porte, je préfère la fréquentation d'une ribambelle de demoiselles en manque de Carole King, que me farcir la commémoration des 40 ans du Punk. A ce propos, je tire mon chapeau à Joe Corre, le fiston de Malcom McLaren et Vivienne Westwood qui vient de flamber en place publique pour 6 briques de merchandising, fringues et bandes inédites des Sex Pistols, manière de rappeler aux croque-morts de la presse, aux champions de la mise sous verre, aux amateurs de musées, que l'idée originelle du Punk n'était pas de finir récupéré par l'establishment, ni de servir de fond de commerce à des quinquagénaires en mal de renouvellement.


Avant d'aller plus loin, une petite parenthèse pour vous laissez le temps de noter le nom d'Akina Adderley, choriste chez les Fayettes, mais leadeuse en chef lorsqu'elle œuvre entourée de ses Vintage Playboys. Elle et sa troupe ont les atouts, et la personnalité, pour nous consoler du départ vers d'autres cieux, de la regrettée Sharon Jones, tout en s'affranchissant de l'héritage grâce à des envolées instrumentales qui ne craignent pas de tutoyer le Jazz  de Nouvelle-Orléans.


C'est fait ? Reprenons. Charlie Faye & The Fayettes ne révolutionneront pas la Pop, elles ne proposent rien de plus que ce que Blondie proposa, en d'autres temps, avec In the flesh, mais...vous avez quelque chose contre In the flesh ? Moi non plus. Et voila que le bonbon est à nouveau à portée de lèvres, emballé de couleurs vives, en son cœur gorgé de mélodies chapardées à personne et crânement entonnées, comme de bien entendu, par une voix de petite juive maigrichonne de Brooklyn. Pas exactement comme si tout recommençait, plutôt comme si tout continuait. Cherchez pas, y a pas meilleur compliment à lui faire.


Sweet little message groove sans froisser la soie, la basse prend soin d'enfiler ses demi-pointes pour mener la danse, Carelessly fait du gringue à Carole King, Heart est arrogant comme Mary Wells, Eastside ne s'embarrasse d'aucun complexe pour honorer les Mar-Keys, Coming round the bend déboule comme un inédit du Phil Spector des grandes heures revisité par Steve Van Zandt. One more chance est le genre de tourneries à la Sea of love auxquelles je n'ai jamais tenté de résister. Mon hit, c'est Loving names et son sifflet à la Joe Meek, suivi de Delayed reaction, un machin nerveux traversé en son milieu par une ambiance musette du cosmos, petit détail de production qui fait la différence. 
Pour en finir avec le passage en revue, sachez que le disque s'ouvre par le Suprême Green light et se conclut par un It's all happening que les Shirelles n'auraient pas renié.


Avec autant de références, vous aurez pigé que je ne viens pas de découvrir la Tecktonik, l'avenir du futur n'est pas ici. Les râleurs ont de quoi aiguiser leur ulcère. On peut aussi choisir de retrouver, un instant, le souffle du bonheur. Et je vous certifie que pour danser, l'esprit léger, le corps gracieux, autour du sapin illuminé, vous ne trouverez pas meilleur fournisseur que ce délicieux écrin de mélodies ensorceleuses à la vitalité communicative. Quoiqu'il en soit, vous ne pourrez pas dire que vous n'avez pas été prévenu.

Hugo Spanky



8 commentaires:

  1. Intrigué (l'effet oldies avec packaging ?), j'ai hésité un tantinet puis bien lu l'article (excellent résumé), pioché en youtube et site du groupe et direct, accroché.
    Bon sûr qu'on va pas révolutionner la planète musicale avec Charlie (allusion télévisuelle à la série Tv devenue culte ?), mais parfois, un peu de vraie légèreté mais tellement authentique, ça fait du bien.
    Ce qui m'épate toujours dans ces prods à esthétique sixties/rythm'n'blues/kitch c'est le soin apporté à vieillir le son en lui donnant une présence actuelle.
    Amplis vintages, batteries type gretsch, ou vieille Ludwig, basse Hohner, ça sent le Vox lampes, etc... le tout restitué avec une présence XXIe numérique, ça j'adhère de suite.
    Et puis y'a des cuivres genre "Stax ce qu'il faut de grain et de fausseté" et des choeurs à la Raylettes (Fayettes) donc tout un lot de packaging qui met en appétit.

    Je vais donc piocher le sujet plus avant, il y a là juste de quoi se faire plaisir, ça chante sans heurts, ça chorise gospelisant, ça groove sisters mode, les arrangements sont précis.

    (au passage le petit encart punk - ah que j'aime quand on coiffe ainsi au poteau la beauferie de circonstance).
    THX pour la découverte et pour le remise en juste place du punk, non de ses artistes, mais du chapelet de moutons qui se sont mis en rang derrière un mouvement sans en avoir simplement juste saisi le sens et l'urgence.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Cool, ça fait plaisir que tu te sois laissé tenter par l'écoute.
      Tous les petits détails de production donne au disque beaucoup de personnalité au fil des écoutes. On sent les amoureux du truc, à mon avis Pete Thomas a dû bosser sur le mixage (j'ai aucun crédit de rien, sinon qu'il joue de la batterie en live -il est dans les vidéos- et sur l'album) mais on sent la patte Attractions des premiers Costello.
      L'autre bon point, c'est que ça joue bien en live, et ça se ressent sur l'album, ça ne sonne pas produit formaté. C'est aussi ce que j'avais aimé sur l'album The Third de Kitty, Daisy & Lewis.

      Je le signale dans le papier, j'en profite pour le répéter, l'une des choristes fait du bon boulot de son côté sous le nom d'Akina Adderley & The Vintage Playboys, il y a deux albums en écoute sur spotify, ils valent vraiment le coup.

      Quant aux punks, on est tellement d'accord que je n'en dirais pas plus. Le fiston a fait ce qu'il fallait pour rappeler que ça ne sert plus à rien d'attendre, quand le train a quitté la gare. Les mêmes nazes qui n'ont jamais été foutu de mettre les groupes en Une de leurs canards quand ça aurait eu un sens de le faire, peuvent toujours vouloir réécrire l'histoire, ils n'en feront jamais partie. Pas plus que les couillons qui continuent à s'exciter sur Teenage kicks le samedi soir au bistrot. Time waits for no one )))

      Supprimer
  2. La petite Charlie Faye fait partie avec James Hunter, Eli Paperboy Reed, Nick Waterhouse, Gaspard Royant et consorts, des artistes qui font revivre la musique des 60's avec un doigté tout à fait réjouissant.
    Certains aigris diront que cette vague rétro n'apporte rien de consistant mais ils négligeront alors l'essentiel: l'art de composer des chansons dignes de ce nom et, par les temps qui courent, c'est on ne peut plus inespéré.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, des chansons, c'est bien la base de tout, écrire de bonnes chansons. Après ça, on peut ergoter sur l’habillage que les uns et les autres leur donnent, mais une chose est sûr ce disque regorge de très bonnes chansons. Et l'habillage est brillant.
      Je ne connais pas Nick Waterhouse, je vais tâcher d'écouter.

      Supprimer
  3. "Et même si elles n'inventent pas l'ouverture de porte, je préfère la fréquentation d'une ribambelle de demoiselles en manque de Carole King, que me farcir la commémoration des 40 ans du Punk."
    Tout-à-fait d'accord. Très agréables les titres de Charlie Faye & The Fayettes où, vieux fan des girls groups 60's, je retrouve un peu de leur fraîcheur. En ces temps plombés par l'actualité, ça ne se refuse pas.
    Bonnes fêtes malgré tout !

    RépondreSupprimer
  4. J'ai lu et séduit je me suis jeté sur SPOTIFY. Ça a fait ping, pap, pop dans la tête, encore mieux que n'importe quelle chanson de Noël. Allez, c'est presque mieux que Noël même. C'est que de l’éclate et en plus ça marche à toute saison. Mais OK, va pour nous secouer l'hiver. J'aime ces failles temporelles où le temps ne fait rien à l'affaire. je disais pour faire le malin que le ROCK c'est surtout US et que la POP c'est davantage UK... On en dit hein! Des conneries pour faire le malin. Et puis c'est bien, je vais pouvoir dire à mes gamins qui me chambrent: mais non, mais non je n'écoute pas que des vieux trucs (Hier une chouette collection de Sam The Sham, aujourd'hui quelques perles french pop de Hubert Mounier) Hé! en te relisant, soudain, il y à 10 ans je me souviens de ces Pipettes, des petites girls comètes qui m'avaient bien emballé le temps d'un "Pull Shapes" ... P'tain 10 ans. (PS hors sujet, yes, un colis de l'autre côté de l'atlantique, un live de Gary U.S., à suivre)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ouais c'était bien les Pipettes, et pour le coup c'était des anglaises. Il me semble quand même que leur album n'était pas aussi consistant que celui ci, même s'il faisait un effet fraicheur foutrement bienvenu. Entre les demoiselles, Sam The Sham et Gary US Bonds, fais gaffe de pas te faire un tour de reins en faisant des acrobaties dans le salon )))

      Supprimer
    2. Je reviens, parce que du coup je me suis fait l'album des Pipettes, reste chouette mais le groupe n'a pas fait grand chose et je pensais après réécoute de Charlie Faye et les références que tu proposes... je pensais qu’effectivement il y du potentiel au delà du pastiche d'une époque. Possible que la dame soit à suivre... en attendant on se fait plaisir et ça c'est cool

      Supprimer