Putain, je sais pas vous, mais j'en peux plus d'entendre ce même discours devenu ritournelle "on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire..." Bordel de merde, commencez déjà par dire et faire ce qui vous passe par la pigne et ensuite on verra bien. Les gonzes s'imaginent sans doute que tout s'est passé crème pour Coluche, Gainsbourg, Polac et tous ceux qu'ils brandissent en argumentaire de la liberté de ton. J'ai un scoop pour eux, les mecs se sont fait démonter. Coluche a eu les associations d'anciens combattants sur le râble, et en ce temps là ça faisait encore du monde, Gainsbourg a vu les parachutistes débouler en troupe à un de ses concerts pour protester façon viril contre son adaptation de La Marseillaise, Polac s'est fait virer... La seule différence entre eux et les glaires d'aujourd'hui c'est qu'ils allaient au mastic sans craintes des conséquences, surement même en les espérant bien croustillantes, manière de faire vibrer la routine. Ils n'ouvraient pas le parapluie avant que ne tombe la première goutte de pluie.
Tout ça pour dire que je m'emmerde sec. L'art est devenu craintif, convenu, rébarbatif, en un mot chiant. Peinture, musique, danse, littérature (je préfère ne pas parler du cinéma, c'est pire que tout le reste réuni), il n'y est question que d'adaptations, de copie, les plus audacieux mêlent des ingrédients d'autres cultures et faudrait faire comme si la world music n'avait pas quarante ans d'existence. Malheur, j'ai des envies de démission. Eux l'ont déjà fait, les artistes se sont mis à l'arrêt. Ils n'ont plus leurs beaux réceptacles à disposition, les théâtres sont fermés, le robinet est coupé. Y a plus quarante blaireaux pour les accueillir, les maquiller, les sucer, les flatter, leur donner la becquée. Comment voulez-vous dans ces conditions qu'ils puissent déployer leurs talents ? En étant créatifs, dites-vous ? Innovants ? En investissant la rue, dont tous prétendent qu'elle leur a tout inspiré ? C'est vrai que ça serait pas con. David Peel s'en était bien contenté pour y enregistrer ses brûlots contestataires. Z'ont pas dû y penser. Préfèrent geindre sur les plateaux télé, tendre la main aux ministres.
Au milieu de tout ça, après que Netflix ait fini de me convaincre que j'avais passé l'âge de regarder le programme, Harry Max m'a indiqué de quoi rallumer la lucarne, Barry, une série HBO qui démarre pas mal, faut voir. 8 épisodes de 25mns en 2 saisons, c'est un crédo dans lequel je fonctionne. Le contexte, grosso merdo, c'est un tueur professionnel qui rapplique au milieu de La Méthode Kominsky. Va t-il flinguer tous les apprentis acteurs ? En tout cas, j'en aurais envie à sa place )))
Rayon disque, c'est le désert de Gobi. Vous avez des coups de cœur ? Vraiment ? Le mien c'est le nouveau Lana Del Rey, Chemtrails Over The Country Club. La demoiselle continue sa route, parfois ça me touche plus que d'autres, ce coup ci elle a mis dans le mille. Les chansons se dévoilent à l'usage, se révèlent moins simplettes qu'elles ne le laissent d'abord paraître. Intrigantes en coda, après un déroulé en mise à nue. Lana Del Rey s'amuse d'elle, de nous, des clichés, jongle puis s’alanguit. Confirme que pour moi elle est la seule, vraiment la seule, dont la façon d'enlacer sait me troubler.
Et sinon ? Vous voulez vraiment que je vous cause du coffret Plastic Ono Band qui sort la semaine prochaine ? Vous dire qu'il contient la jam sessions sur laquelle Yoko Ono a bâti son album du même nom et que c'est bien la seule chose qui m'excite à l'horizon. De là à cramer 90 sacs pour, ça serait mal me connaître. Remarquez, c'est presque par cher pour 6 cd et 2 blu-ray vu la tarification actuelle. A titre d'exemple Black Sabbath adjoint un double Live et un livre à son album Sabotage et vend le tout 120€ !!! Mazette, rien que ça.
Les héritiers de Prince annoncent plus ou moins la même chose, en accompagnant l'album inédit Welcome 2 America d'un concert sur blu-ray pour 99€ (on en est là, à des prix façon grandes surfaces). Je me contenterai du double vinyl en édition ordinaire. C'est mon monde, l'ordinaire. C'est là que je me sens le plus à mon aise. Surtout quand je vois comment ils s'y prennent pour nous en sortir.
Ah, fallait bien que ça arrive un jour, je suis tombé sur un disque des Kinks que j'aime du début à la fin ! Par hasard, en faisant un vide maison, voila pas que de l'ombre d'un coin d'armoire s'échappe le visage grimé de Ray Davis. Sleepwalker qu'il s'appelle et il contient tout ce que j'aime chez eux, sans rien de ce qui me gonfle d'habitude. Un disque basique, bien branlé, avec de chouettes chansons agencées avec savoir-faire. Le disque que les Pretenders n'ont jamais réussi à faire.
Il y avait aussi le Black President de Fela Kuti égaré là, je l'ai adopté sans trop me poser de question. Je vous dis pas comme je suis zaze depuis, un vrai moderniste zoulou. Pour un peu, je me revendiquerais de l'avant-garde.
Hugo Spanky