lundi 29 juillet 2013

CoLucHe


Lorsqu'il est mort Coluche ne me parlait plus depuis longtemps. Il était devenu ce qu'il avait toujours rêvé d'être, un parvenu. A tout prendre j'aurais préféré qu'il fasse comme annoncé, acheter une île, une fois blindé se la jouer Jacques Brel. Au lieu de ça, il incarna tout ce qui me nifle le plus dans ce début des années 80, Zorro des idées généreuses à faire croire au peuple que la France avait soudainement changé un soir de 10 Mai à coups de Touche pas mon pote, d'irrespect mondain et toute cette merde. Se ridiculiser avec la bande de Canal +, ce lèche cuir de Denisot, ambiance coke, champagne et main au cul. Tout cela financé en sous main par le nouvel état, et donc par nos contribuables de parents, souvent les mêmes qui n'avaient pas les moyens de se payer l'abonnement au décryptage. Le culte du monarque socialiste n'est pas passé par moi, le paluchage de la bite à tonton n'a pas fait parti de mes attributions, ni alors, ni depuis. Chirac nous aura au moins évité Balladur et Le Pen, Mitterand ne nous a évité que Giscard bis, en échange de quoi on a tous fini allemand. Bravo !


Non, vraiment, lorsque Coluche est mort, j'avais 19 ans et définitivement plus besoin de lire les panneaux pour trouver ma route.


Coluche, je le garde gouailleur, viscéral et mauvais comme une teigne, celui du Music-Hall auquel il projetait de revenir. Trop tard.
Je m'en foutais comme de l'An 40 qu'il sache aussi faire pleurer dans Tchao pantin, rien que de voir jouer Agnès Soral ça donne envie de pleurer. Rien à glander qu'il soit reconnu comme un grand acteur, un de plus, je savais déjà tout ça depuis La cloche tibétaine, sa série globe trotter qu'on matait en famille.


Mon Coluche à moi, c'est celui que ma mère avait refusé d'aller voir en gala parce que se coller une plume bleu, blanc, rouge dans le derche ça ne passait pas. Malgré que les sketchs la fasse marrer. Rétrospectivement, elle avait raison ma mère, c'est là qu'il a commencé à se perdre.


Je viens de finir de lire le bouquin de Philippe Boggio consacré à Coluche et je l'ai aimé. Il est écrit avec objectivité, évidemment pas à charge. Le travail de l'auteur inspire le respect, on n'a pas affaire à un livre de fan supplémentaire, c'est d'un homme dont il est question au fil des pages. Avec tout ce que cela comporte comme faiblesses, moment de grâce ou de connerie crasse. Le livre raconte la vie de Coluche, celle d'un imposteur. Et qui le sait mieux que quiconque ne voudra l'admettre. Tous les gosses ont ce moment où l'on se veut plus pauvre qu'on ne l'est. Plus dur aussi. Lui ne dépassera ce stade que tardivement en se collant sur la tronche un masque encore plus inopportun, celui de Robin des bois distribuant du riz et de la soupe aux plus populaires d'entre nous, tout en cirant les pompes d'une gauche cocktails qui ne se soucia jamais que d'elle même. Les seules têtes qu'il ne trancha pas ne furent pas les plus belles. De par la tendresse dont il nourrit ses premières incarnations, je me dis que sans Mai 68, Coluche aurait été de la bande des Gabin, Ventura, Sardou, Audiard, plus sensible à Pompidou qu'à Ramses Solférino et sa pyramide de verre.


Le jour où Coluche est mort, je ne me souviens plus avoir été ému, c'est quand, au détour de cette émission du dimanche midi sur FR3, je l'entends brailler Géraaard, raconter l'histoire de ce mec sur le pont de l'Alma, celle du flic aussi, lorsqu'il dépeint notre éternel quotidien que rien ne détruira jamais sans qu'on le reconstruise aussi sec, que l'envie de chialer se fait la plus forte.

samedi 20 juillet 2013

Les SLiTs !

Des FiLLes vach'teMenT ATypiques 


Enfin un bouquin sur les Slits, pas sur un groupe de filles dans le Punk ou le Rock, pas un Girls Band, pas une équipe de féministes énervées non, juste un groupe de Rock, avec des filles dedans !

Comment et pourquoi les Slits ont été un groupe important, et même plus qu’important, même si pratiquement jamais cité !!

Sans aucun doute le groupe le plus Punk avec les Subway Sect ou Alternative TV jamais mit en place, aucun rapproch’ment avec l’univers du Rock’n’Roll, aucunes références, à rien, juste faire un truc, le leur.




1976/77, une toute petite fenêtre, impossible 10 ans avant et déjà plus possib’ deux ans après. Un groupe monté de bric et de broc, d’envie.
La musique, un truc secondaire, juste une attitude mais pas un de ces trucs déjà très vite rangés dans des cases. Les Slits n’étaient pas un groupe de « Féministes » avec le mode d’emploi de la révolution des foufounes et de la rhétorique de vilaines saucisses qu’ont que’que chose a prouver, juste une bande de nana qu’avait surtout pas envie de vivre la vie, chiante à crever, d’leur mère ou d’la voisine de palier.
Pas envie d’attend’, se faire marier et une l’éternité à ruminer.




Si les yankees Runaways étaient là avant, elles jouaient dans le près carré des lascars, guitares entre les g’noux, moue de filles à soldats et sans doute bien plus de couilles que l’grateu d’van halen, les Slits elles, ont achetés leur harpent d’terre et l’on travaillé, à la corne.

Pas de cindy lauper, annabella lwin, t’être même de madonna et autres suiveuses sans que ces quatre chipies ne décident un jour, non pas de jouer, mais d’utiliser un instrument, de musique, qu’on s’entende !!



Si la furia de 77 a révélée un paquet d’individus et de groupes offrant aut’ chose qu’un fond sonore pour Aujourd’hui Madame, les Slits qui étaient dans la motrice se sont toujours retrouvées recalées dans le wagon d’queue.

Correction Train ! 


L’album Cut ne sort qu’en 79, éclair de génie, non pas musical, bien que perso j’adore, non celui de ne pas avoir cédé, ne pas avoir sorti un single ou même un album de plus qui resterait aujourd’hui dans le bac Punk-Rock immatriculé 77, tranche de nostalgie pour ceux qui y étaient, et pire encore pour ceux qui en rêve.


Les Slits c'est en fait deux histoires.


Une qui pause 4 nanas biens énervées, bien que joyeuses déconneuses, relativ’ment incapab’ de jouer d’un instrument mais avec une Revendication, Exister, elles et par elles même, modèle 76 avec le Punk, c’était tout à fait possible.
La seconde, serait l’histoire de ces 4 nanas, déjà plus tout à fait les même, et oui on est maint’nant en 77, qui vont s’extirper de ce magma tout foutraque en créant leur son, leur monde.
Un Joe Jackson ou les Pogues l ‘ont fait, les Specials ou Dexys Midnight Runners aussi, et je les en remercie au passage mais qui a pensé a remercier les Slits pour l’énorme contribution au monde de la musique qu’on a écouté au long des années 80 et 90 ?


On aurait pu avoir un groupe de filles jouant du Rock Lourd ou du Ska, un Girls Band de gentilles andouilles aux formes avantageuses surinant les ondes des radios FM avec leur sirop de sucre fondu, non, on est tombé sur un nid d’sorcières braillardes nous fabriquant moult décoctions avec du Rock, du Reggae, du Jazz plutôt vachement Free, des tempos qui ne tiennent pas sur du 4 temps, des ambiances Africano-Londoniennes et une palanquée de hululements à faire frémir un banc d’chouettes !

Si l’est devenu très vite concevable qu’un groupe de Punk-Rock joue occasionnel’ment des morceaux de Reggae, la formule des Slits à partir de 77 travaille de plus en plus sur l’Up Tempo, ralentissant généreusement leurs morceaux, proposant ainsi des espaces à leur toute jeune chanteuse, Ari Up, qui vocalise à qui mieux-mieux et invente par là même Bjork, ben ouais, fallait l’dire !!


Le travail avec Dennis Bovell sur Cut reste remarquable, les filles n’y produisent pas un Rock Reggae sirupeu/Police-isé mais un savoureux mélange des genres. Ne gardant du Punk-Rock que le coté Individualiste, s’affirmant comme des femmes libres de toutes entraves Rock‘n’Rollesques, masculines, ne jouant qu’avec leurs propres règles du jeu et surtout de la conduite. Les toujours trop brèves séquences filmées à cette époque par notre si cher et précieux Don Letts nous le confirmes.
L’engagement « féministe » des Slits s’arrêtera là, penser et faire par elle même, ce qui ne les empêchera pas d’avoir, depuis le départ de Palm Olive, un batteur masculin et même un producteur sinon rasta, en tout cas emprunt d’une culture où la femme est fermement réclamée en cuisine. La petite anecdote sur la « rencontre » Marley / Slits en raconte si long...


Précurseuses, inventives, pas plus intéressées qu’ça d’êt’ un groupe de Punk, de Rock, de Reggae ou de variétoche de plus, juste faire leur truc, mixture pas possible sortie du gros chaudron qu’était Londres à cette époque, mélange des genres, les basses aussi rondes qu’énorme du Reggae et des Sound Systems qui se multiplies en ville, des guitares elles très nouillave, acérées et une batterie complètement bancale, minimale, plus proche des tambours de l’Afrique. Comme Public Image, comme Basement 5, comme encore d’autres qui se lanceront à leur tour, World Music & Fusion, et feront oublier ceux et celles qui étaient là à la base du truc. Comme d’hab, ceux qui initient l’bazar sont rarement ceux qui en tirent que’que chose, Same Player Shoot Again …



La parenthèse du Punk trop vite refermée, les Slits sont déjà hors jeu lors de la sorti de Cut, un très bon disque vraiment, avec une pochette hum…resplendissante, en tout cas vite rétrogradé par la presse tant papier que radio, par des cindy lauper et autre kim wilde, à la fantaisie bien plus malléable ou la plastique vachement plus … irréprochab’.
Il ne reste au groupe, et la c’est dommage, immatriculé Punk-Rock, que cette frange cloutée iroquoise méchamment à chien qui fera les beaux jours d’Anagram Records et qui n’avait absolument rien à foutre des premiers groupes de 77, jugés vendus et poseurs sur fond de Pop. Les tirades d’un Jimmy Pursey dans le NME à propos notamment du Clash sont plus qu’éloquentes, ni, et j’en reviens, sic, au (mauvais) goût de mes punks à chien, à un quelconque brassage de musique comme d’identité.


Pour le début des années 80 coté aventureux, même si il a légion de groupes super intéressants, le portail doucement se ferme. Plus de place pour ce qui ne tiendrai pas dans un Top of the pops tout propret, surtout pas de revendications, et, grand malheur, c’est au bout d’une vilaine ballade avec la dope que s’efface des types comme Malcolm Owen, emportant avec lui tous les espoirs chaudement contenus dans les Ruts, une moitié des Pretenders et j’en passe.


1981, nos bruyantes amazones enregistrent un second LP, The Return of the Giants Slits, qui sortira en 82 sans le moindre intérêt ni des médias ni du public. Un album bien trop calme pour nos joyeuses sorcières, oscillant entre chants malpoli-phoniques et transe Africaine, un drôle de cocktail très avant garde, celui-là même qui fera bouger le monde 10 ans plus tard sous le nom de World Music.
Les filles, désolé pour le/les batteurs, se trouveront renforcées d’une cinquième énervée en la présence de Neneh Cherry, belle fille du trompettiste de Jazz Don Cherry présent sur l’enregistrement et une tournée.


1982, exit les Slits. Ari Up reformera le groupe, différemment et elles enregistreront même un album en 2009, mais c’est déjà une autre histoire.


Coté discographie, il existe 3 Peel Sessions, des enregistrements de 77, 78 et 1981, très mal distribués et salement bidouillés sur les éditions cd ainsi que quelques très bon Bootlegs, Girls Next Door est terrib’ !!

A l’opposé de la trop brève carrière du groupe, sa séparation s’est faite sans étincelle. Après avoir horrifiées, remuées, fatiguées la vieille Angleterre, les promoteurs, les managers et autres maisons de disques, c’est un groupe un peu las qui rend les armes. Comme d’autres, cinq ans à se vivre dessus, à partager le bon comme la galère, l’incompréhension, la fatigue et avec l’age des envies d’ changer d’air, nouvelles opportunités, sans faire de bruit, sans avoir besoin de faire de longs discours, d’un regard se comprendre, « je s’rais pas à la prochaine répèt », nous non plus et zip it up, les teignes sont entrées dans l’histoire.


Je voudrais en remettre une couche sur la Production du premier album assurée par Dennis Bovell, sur le type en tout cas. Déjà un producteur reconnu même si de Lover’s Rock et musicien notamment avec Matumbi et avec LKJ, ce type d’une culture total’ment différente qui se trempe, excuser le jeu d’mot, avec les Slits, les Fentes, un groupe de Femelles Vociférantes toute Punk, un groupe qui ne risquait ni de lui ramener Fortune ou célébrité.
Je tiens à en rajouter parce que je sais très bien que tout ceux qui ont un jour ou l’aut’ scotchés sur le Punk-Rock connaissent tous Linton Kwesi Johnson, tout comme je le sais et depuis vraiment trop long de temps, les amateurs de Jamaïcannerie, qu’elles soient Roots, Rub a Dub, Ragga DanceHall n’ont absolument rien à foutre ni de l’histoire ni de ceux qui l’ont fait, donc toujours un point commun avec les à chiens d’aujourd’hui.
Rappel à quel point des types comme Don Letts, Dennis Bovell, Dennis Morris sont, étaient eux aussi, des traits d’union plus qu’important. Après tout si j’avais pu me faire produire un titre en 77 par Lee Perry, c’est pas Complete Control que j’aurais Choisi !


Si les Slits sont passées telles des comètes pétaradantes, sans être plus ou mieux reconnues qu’ça, c’est au travers d’aut’ groupes que leur impact fait écho. Siouxsie et ses banchés et Poly-styrene avec X Ray Spex ou Gaye Advert à la basse de Adverts dès 76, des femmes impliquées, pas juste de joly minois pour faire frémir les pré-pubères. Nina Hagen, très pote avec Ary Up, The Raincoats avec Palm Olive après son départ des Slits et The Mo-Dettes avec Kate Korus, première gratte des Slits too. Les Bodysnatchers et Pauline Black des Selecters pour la bande à Two Tone.


N’en pas douter, des chanteuses telles Sinéad O’Connor ou Annie Lennox, de l’aut’ folle de Deee-Lite à Lily Allen ont toutes un tribu à rincer aux Slits.


Avec le départ d’Ary Up en 2010, pour une autre scène, toutes idées de revoir un jour les Slits est perdu, tant mieux, rien à foutre de Rolling Slits et je suis sûr d’une chose, comme elle l’a toujours fait, toujours été, la Miss Ary Up doit en faire voir de toutes les couleurs au chef d’orchestre, Original Germa-ïcaine Bad Gal !!
Des Filles Atypiques de Zoë Howe aux éditions Rytrut, à lire, vraiment.
Commande en ligne assurée et super agréab’ : http://rytrut.free.fr/





Aujourd’hui la parité homme femme est inscrite dans la loi, journal officiel et toute ces conneries, Les Slits à grand coup d’accords & miaul’ments sal’ment dissonants l’ont mise à jour dans le Rock, mais ça c’était avant !!





7red

lundi 15 juillet 2013

DiaMoND DaVid Lee RoTH


Van Halen, c'est l'histoire d'un groupe jamais devenu ce qu'il aurait dû être. Avec ceux là, on a frôlé la perfection et puis, non. Van Halen, c'est d'abord David Lee Roth, grosse voix en chef, sans doute le  chanteur à avoir œuvré dans le Hard Rock des 80's avec le plus de personnalité. C'est aussi les frères Van Halen. Avec dans l'ordre d'apparition à l'écran, le petit génie de la six cordes, le virtuose du manche, celui qui ringardisa en trois mouvements de doigts la totalité des guitaristes à prétention l'ayant précédé. Doté d'une qualité supplémentaire, la retenue. Ses soli, novateurs au possible, restent cantonnés dans leur rôle dévastateur de pulsations maximales, sans interminables branlettes. Eddie Van Halen n'en demeure pas moins un caractériel de première bourre au comportement auto-destructeur. Toujours fébrile malgré le succès, il refusa constamment d'admettre l'évidence, la star du groupe, c'est pas lui, c'est le chanteur !



Van Halen démarre sa discographie par deux albums jumeaux, puisque composés et enregistrés quasiment en même temps. 
Des deux disques, le second est le meilleur. Plus varié et tout aussi rageur que son déjà illustre prédécesseur, Van Halen II opte pour le penchant le plus californien du groupe, harmonies vocales en cascade, son black, voire carrément funky sur Dance the night away
L'album aux chromes sanguinolents confirme que Jamie's crying et Feel your love tonight n'étaient pas des accidents de parcours. Les  Deep Purple favoris de David Lee Roth ne sont visiblement pas In Rock ou Machine Head, mais bel et bien Stormbringer et Come Taste The Band
 
 



David Lee Roth est un passionné, il n'est pas là pour la monnaie, du moins pas seulement. D'ailleurs, il n'en a pas besoin, sa famille est gavée. Ce qui anime le chanteur, c'est toute une culture, une palette d'une richesse rendue seulement possible par une haine farouche des œillères. C'est tout ça que le groupe perdra lorsqu'il finira par claquer la porte. Plus jamais leurs albums ne s'orneront de reprises de Roy Orbison, Martha and the Vandellas, des Kinks, Linda Ronstadt ou d'obscurs standards de Jazz ou de Blues. Ce sera du côté de David Lee Roth qu'il faudra creuser pour se régaler de pépites aux origines aussi diverses que surprenantes. Pèle mêle, Sinatra, Hendrix, Wilson PickettBeatles, Beach boys, Louis Prima, Doors, Nashville Teens, tous se retrouveront à un moment ou un autre au générique d'un album de Diamond Dave.


Ce gars est un authentique Rocker, dès les premiers disques avec Van Halen, il impose sa guitare acoustique à l'autre dingue du courant alternatif, et nous octroie des pauses salutaires. Paillards et fendards, ces morceaux claquent comme des coups de fouet, et entraîne le groupe vers la Country et le Blues, sans jamais sombrer dans le Folk hippie. Un Rocker, je vous dis, on n'est pas chez Led Zeppelin ici.


Je recadre. Après un Women and Children First barbare, capté quasiment live en studio, Fair Warning, quatrième disque de Van Halen est leur chef d’œuvre ultime. Les compositions sont affinées, surpuissantes, et la production est merveilleuse. La voix et la basse mixées bien en avant font la différence, tandis qu'Edward aux mains d'argent riffe comme s'il auditionnait pour Mother's Finest. Placé en embuscade, créatif au possible, l'homme à la six cordes bariolée joue avec les sons, les silences, les rythmes. Parfait. David Lee Roth n'est pas en reste, en plus de pousser l'auditeur à l'hystérie, il nous gratifie de textes mitonnés aux petits oignons. Mean street, Push comes to shove, So this is love, Unchained, "Dirty movies" (un fan des californiennes du x incite sa copine à œuvrer devant la caméra) sont des classiques de l'auto-radio pour accompagner les virées du samedi soir. Fair Warning est l'album d'un groupe en osmose. Mais aussi à son sommet, comme la suite va le démontrer. 
 
 

D'abord avec Diver Down, disque adorable au possible mais indéniablement bâclé. Il reste toutefois parmi ceux qui ont le mieux vieilli. Et surtout par le naufrage de 1984. Si l'album est celui de tous les records, c'est uniquement grâce à Jump, composé pour servir d'hymne à l'Olympique de Marseille (oui, c'est vrai), pour le reste le groupe est dans l'impasse, obligé de ressortir des démos antédiluviennes (House of pain) pour entourer des cagades sans âme, comme Panama, Girls gone bad ou des pompes des premiers albums (Top Jimmy). Bref, ça sent le sapin, et c'est du côté du EP solo du chanteur, Crazy From The Heat, et son avalanche de hits vintages (Just a gigolo, California girls) qu'il faut paradoxalement chercher un peu de fraîcheur. Jamais à court d'idées et enthousiasmé par la réalisation de clips loufoques au possible, David Lee Roth projette de tourner une comédie hollywoodienne dans la jungle équatoriale dont Van Halen signera la bande originale. Plongé dans la bouteille et la défonce, seulement passionné par sa découverte des synthétiseurs et désireux de s'enfermer dans le studio qu'il vient de faire construire chez lui, Eddie Van Halen prend ses distances et refuse tout net de s'investir.
 






La suite de l'histoire s'écrit David Lee Roth. Il se barre, abandonnant les Van Halen à une terne routine en phase descendante, et enregistre deux albums à succès, Eat 'em And Smile et Skyscraper, le temps d'un super groupe sans génie, mais amusant, avant de s'entourer de potes et de revenir aux choses sérieuses, alignant des disques sans cesse meilleurs, bien qu’obtenant peu de reconnaissance. De A Little Ain't Enough à Diamond Dave (2003) en passant par Your Filthy Little Mouth et DLR Band, notre homme va faire briller les cuivres, résonner les influences Blues et opter pour une diversité nappée d'efficacité. Les concerts sont à l'unisson, et sa visite en France en 1992 me donnera l'occasion d'en juger sur pièce. Imaginez vous qu'il ouvrait le show sur You really got me, signifiant ainsi que cette cartouche que beaucoup conserveraient pour le feu d'artifice des rappels n'était jamais que le début de l'histoire. Brillant et sacrément couillu.



 
Fanfaronner les fesses à l'air à travers le globe et enregistrer des disques dont tout le monde se fout, peut lasser le plus motivé des hommes, c'est ce qui finira par arriver et les nouvelles du chanteur se firent plus rares. Un temps devenu ambulancier bénévole dans le Bronx et Brooklyn, il faudra se contenter des versions bluegrass de Jump et Jamies crying, enregistrées avec le John Jorgenson Bluegrass Band pour un tribute album de  Van Halen façon Délivrance pour entendre à nouveau sa gouaille. Une apparition dans Les Soprano le mena, tout récemment, à jouer dans un court métrage japonais. Ce seront là, ses seules activités publiques jusqu'à la reformation de Van Halen. Depuis le temps que les frangins tournaient autour du pot, ça devait finir par arriver.


Le résultat ? Un album hypra massif, mais trop uniforme, et une tournée qu'il devait faire bon de trouver sur sa route. Ce sera l'occasion pour Rolling Stone de publier une interview toujours pertinente au cours de laquelle David Lee Roth cite Kool & the gang en exemple. Un bonheur.

Faut dire que pour ce qui est des interviews, le chanteur s'est invariablement montré aussi passionnant que franc du collier. Allant jusqu'à précipiter le split de Clash. L'intrigue se déroule dans les coulisses de l'US Festival de 1983, David Bowie touche 1,5 million de dollars pour tenir la tête d'affiche du 3eme soir, Van Halen, qui tient le même rôle le 2eme soir, a un cachet d'un seul petit million, mais un contrat en béton qui impose à l'organisateur de les aligner sur le mieux payé du festival. Par ici le demi million de plus. Les emmerdes commencent quand Clash pigent qu'ils sont tête d'affiche du premier soir pour un cachet mal négocié de seulement 500 000$ et, pire, qu'ils ne sont protégés par aucun alinéa salvateur. Vexé comme un pou, Joe Strummer, qui a imposé un an plus tôt le retour de leur manager originel, Bernie Rhodes, contre l'avis de Mick Jones, en fait tout un pataquès, refuse de monter sur scène si l'organisateur ne les aligne pas eux aussi, puis si il ne leur file pas 1 million, enfin si il ne file pas 100 000$ à une oeuvre de charité. La demande finit par être acceptée et le groupe monte sur scène avec deux heures de retard, tandis que le promoteur affiche sur les écrans géants leur salaire de 500 000$ pendant que Strummer harangue la foule sur le thème de l'anti-capitalisme... En coulisse, David Lee Roth assure l'animation "Les Clash ont beaucoup de problèmes. Ils essaient de sauver la nation, ils essaient de donner des conseils pour un avenir meilleur. Et ils ont un nouveau batteur. Ils ont donc du pain sur la planche. Qu'est-ce que je peux dire de plus ? Mesdames et messieurs, hier soir les Clash ont sauvé le monde avec deux heures de retard". Du pur David Lee Roth.


Hugo Spanky