mardi 29 octobre 2013

LiNDi oRTeGa, éLéGie D'uNe DeesSe


Tout peut arriver dans ce fichu monde. Même une chanteuse canadienne avec du talent. Elle se nomme Lindi Ortega et je vous rassure tout de suite, elle n'est pas du genre à beugler comme si on lui arrachait les dents avec une tenaille.
 
 
La miss Lindi (oui avec un i, ce n'est pas une faute de frappe) à une voix d'une si étonnante sensualité qu'elle est à même de faire taire les grandes gueules qui veulent amuser la galerie, les fiers à bras qui pérorent à tout crin pour draguer la donzelle, les ivrognes qui hurlent qu'on leur resserve un verre fissa et les commentateurs sportifs au bord de l'apoplexie qui resteront pantois devant son timbre ensorcelant. 


Accompagnée par des musiciens pas manchot qui lui offre un écrin musical d'un raffinement exquis, elle s'adonne avec une maestria de tous les instants à la country music. De celle qui vous accroche le cœur dès les premières mesures. 

Son album Cigarettes & Truckstops est une merveille comme il en sort rarement dans ce genre si casse gueule ou la frontière entre la justesse et la mièvrerie la plus écœurante est fort ténue.
Relevé d'une teneur rock'n'roll, qui rappelle le travail le plus remarquable dont a pu nous gratifier ce bon Chris Isaak (son magnifique album Forever Blue notamment), sa musique est gouleyante à souhait. A ce titre les morceaux Dont' wanna hear it et Murder of crows en sont les parfaits exemples. Ils sont dotés d'un swing ravageur grâce aux guitares qui prodiguent une assise rythmique aussi tendue que trépidante tandis que Lindi et sa voix faite de miel envoie le tout vers les plus hautes sphères.


Avec Heaven has no vacancy et Use Me, un autre palier dans la splendeur est atteint. Ces deux titres dégagent un sentiment de sérénité qui vous plongent dans une béatitude régénératrice. Lorsqu'on les écoute, c'est comme si on se retrouvait au beau milieu d'une prairie s'étendant à perte de vue alors qu'un crépuscule de toute beauté nous environne et qu'une brise légère vient nous ébouriffer gentiment les cheveux. Nous sommes dès lors ferré par une sorte de bonheur absolu. 



En fait la musique de la belle et de son gang est de la trempe à vous faire oublier immédiatement tous vos tracas et à vous rendre le genre humain plus fréquentable. Pour vous en convaincre écoutez donc le morceau qui donne son titre à ce disque enchanteur. Alors que la batterie feutrée vous cueille avec douceur, les guitares et leurs arpèges délicats vous chatouillent l'échine tandis que la voix de velours de la dame vous caresse les esgourdes et vous emporte aux portes du Paradis.

 
D'une finesse extrême qui procure le grand frisson (comme le fait, entre autres pépites, la chanson Lead me on), ses compositions aux mélodies imparables sont faites d'onguent à même de cicatriser les pires plaies; elles ont encore plus de force qu'un prêche qui vous réconforte en votre for intérieur. Lorsque vous aurez entendu Lindi pour votre toute première fois, vous nous pourrez plus alors vous en passez; elle vous saura aussi indispensable que l'air que vous respirez.



Voilà de quel bois est fait ce petit bout de femme. Elle n'est que grâce suprême et maîtrise à la perfection toutes les nuances mélodiques qui font chavirer les cœurs les plus endurcis. Voilà pourquoi il serait criminel de passer à côté d'un telle source de félicité.

dimanche 27 octobre 2013

CiAo LoULou !

"J'ai arrêté la drogue en la remplaçant par l'alcool, ça n'a pas  marché"

Ce sera donc la dernière déclaration de Lou Reed, rarement avare en pensées profondes. 
Si ce n'est pas le plus grand des plus grands, comme on ne manquera pas de le lire ailleurs, ce n'est surement pas le plus négligeable non plus qui s'est éteint ce jour. Lou Reed c'est une discographie qui ressemble à son auteur. Foutraque, patraque, souvent sublime, à chaque fois dérangeant, jamais anecdotique, Lou Reed a enregistré ses disques comme il a mené sa vie, sans se soucier de ce que quiconque pouvait en penser. Il laisse une oeuvre dont le plus grand mérite est de n'être surtout pas consensuelle et sur laquelle on n'a pas fini de revenir encore et encore tant elle passionnera longtemps.
Lou Reed est mort à 71 ans, chapeau d'être arrivé jusque là.

Deep down inside I got a Rock'n'Roll heart.

Hugo Spanky


Une pensée pour Gypie Mayo.

mercredi 23 octobre 2013

PosSesSioN, aDjaNi eN FuRie


Bon et bien ça y est depuis le temps que l'on me bassine avec ce putain de film, je me suis enfin décidé à regarder «Possession» de Zulawski. Et, comment dire, ce ne fut pas un voyage de tout repos. Par tous les saints, ce fut carrément une épreuve de force; un véritable enfer, oui !
Comme tout le monde le sait plus ou moins, ce film nous conte la dérive d'un couple dont la femme s'est éprise d'une créature tentaculaire qui lui apporte la quintessence de l'extase sexuelle. Un point de départ donc qui engendre un malaise étouffant.
Mais déjà rien qu'avec la photo de Bruno Nuytten, composée de couleurs froides et agressives, qui se mélange à l'austérité des décors d'une ville délabrée nous sommes plongés, dès les premières images, dans une ambiance morbide à souhait.
Quant aux mouvements tarabiscotés de caméra de ce dingue de Zulawski, il accentue encore plus le sentiment d'inconfort croissant que nous assène la vison de ce long métrage ô combien atypique.


Mais tout cela n'est rien face au jeu volontiers outré des acteurs à côté desquels les pensionnaires d'un asile de fou passeraient pour d'aimables enfants de chœur.
Pour ce film, c'est avant tout Adjani qui a été mise en avant et, même s'il faut bien avouer que sa performance foutrait les jetons au pire des salopards à sang froid de la planète, il ne faudrait pas pour autant oublier le jeu tout aussi halluciné – et hallucinant- de l'étonnant Sam Neill. Sa façon de se balancer sur un siège à bascule, son regard de dément, sa gestuelle désordonnée et ses gémissements bestiaux donnent un furieuse envie de prendre ses jambes à son cou lorsqu'on a le malheur de se retrouver face à lui. Le bonhomme inquiète et pas qu'un peu !



Pour autant, il y a pire que lui, Heinz Bennent, qui interprète l'amant éconduit d'Adjani parvient à franchir un palier supplémentaire dans la folie déjà bien gratinée merci bien de tous les protagonistes de ce cauchemar sur pellicule. Il le faut le voir tabasser Sam Neill, lorsqu'il lui prodigue avec ses jambes et ses bras de violents coups en exécutant des mouvements amples comme le ferait un danseur classique, pour comprendre la démence de son personnage suffisant.
Adjani, quant à elle, dans son rôle de femme possédée s'en donne bien évidemment à cœur joie d'autant plus qu'elle n'a jamais été un adepte de la demi mesure. Qu'elle ait la bouche en sang, qu'elle soit prise d'une crise d'hystérie dans un couloir de métro, qu'elle passe absurdement au mixeur des bouts de barbaques, qu'elle assassine à l'arme blanche ou au revolver ou qu'elle se déplace avec de brusques accélération, elle fait subir les pires tourments à son personnage et autrui de la manière la plus exacerbée qu'il soit.


Clairement avec ce film borderline, on se retrouve tantôt face au nanar ultime - celui dont personne n'arrivera à égaler le ridicule tant ses situations sont excessives et prêtent à rire - tantôt face à une œuvre qui nous amène au cœur de la folie la plus totale; de celle dont on ne revient jamais.
Totalement inclassable, aussi consternant qu'intéressant, aussi fatiguant qu’enthousiasmant, ce film a le mérite en tous les cas de bousculer toutes nos certitudes et de nous laisser lessiver et abasourdi lorsque son générique de fin s'affiche sur l'écran.

Harry Max.

jeudi 17 octobre 2013

Go-Go WasHiNGToN DC !



Tandis qu'à New York, Sylvia Robinson secouait le cocotier à grand coups de maxi-singles signés Sugarhill Records, à Washington une autre éphémère gloire des 60's, Chuck Brown, s'activait à donner vie à une autre sorte de Funk, le Go-Go DC.


Moins dépouillé que le Hip-Hop New-Yorkais, le Go-Go n'en partage pas moins les mêmes influences Electro-Funk, le même désir de dégraisser ce Funk qui au fil des 70's n'avait eu de cesse de se gonfler d'ornements, parfois brillants, trop souvent étouffants, rarement tranchants. Le Go-Go, Chuck Brown et Trouble Funk en tête, va se charger de revigorer tout ça. Dès les pochettes, leurs disques affichent la différence, couleurs criardes et chamarrées, X vengeur, symbolique guerrière, motif primitif de l'art africain tel que refaçonné par Basquiat, autant d'images choc pour signifier que la musique qu'elles abritent cogne dur au cœur du tempo. Le Go-Go garde les cuivres mais les utilise comme autant de coups de feu, les percussions déboulent en embuscade, emplissent l'espace sonore tantôt en rototom, tantôt cherchant la transe tandis que les basses deviennent infra pour la première fois et qu'au dessus de ce fatras apocalyptique se posent les voix. Guère de mélodies sophistiquées, le Go-Go c'est le règne de l'apostrophe permanente façon Nouvelle-Orléans, le fameux question/réponse, Inané/Olaé ! De quoi rendre jobastre le plus statique d'entre tous alors même que la fête bat son plein sur le dancefloor. C'est qu'il faudrait être sacrément bien riveté au sol pour ne pas se lâcher lorsque la déferlante de sonorités, à l'impact en forme d'uppercut de Mike Tyson, vous saute à la gorge.


Chuck Brown n'en est pas à son coup d'essai en ce début des 80's. Après avoir passé quelques années derrière les barreaux durant la première moitié des 60's, condamné pour meurtre en état de légitime défense, il forme les Soul searchers avec lesquels il enregistrera plusieurs albums durant la décennie suivante avant de s'atteler à l’œuvre de sa vie. A sa suite apparaîtront toute une palanquée de groupes aussi méconnus que bourrés de qualités, des machins tout en énergie brutes, Rare Essence, Experience Unlimited (EU) Junkyard Band, Double Agent Rock, Mass Extension, Hot Cold Sweat, Redds and the boys, tous mélangeant avec élégance mais dans un joyeux foutoir rap, funk, dub, guitares et percussions. Les Run DMC retiendront la leçon.




Musique de clubs alors que le Hip-Hop vivait sa genèse dans la rue, le Go-Go gardera une mauvaise réputation de musique mafieuse, coupable d'avoir fait danser trop de Stagger Lee, de pimps à la gâchette facile. Régulièrement entachées de règlement de compte, les soirées Go-Go ne franchiront jamais les frontières de Washington et le genre périclitera sans avoir connu de reconnaissance nationale, encore moins mondiale. Hormis Trouble Funk rapidement signé par Sugarhill records, rares seront les groupes à décrocher le moindre hit malgré le soutien de Island records et le financement par son magnat, Chris Blackwell, d'un film consacré au genre, Good to go. Qui se ramassera un bide dont on ne se remet pas. Chuck Brown se reconvertira dans un registre plus soft, quelque part du côté de George Benson malgré une fougue plus proche de James Brown. Il s'éteint en 2012, respecté mais jamais vraiment reconnu pour ce qu'il fut, un authentique original, créateur d'un son qui n'a pas pris une ride. Écoutez son We need some money pour vous en convaincre. 




 
Reste quelques compilations du genre, véritables bombes honorant le slogan du Go-Go : Drop the bomb ! Go-Go Crankin' est l'une d'entre elles, regorgeant de morceaux démoniaques au sein desquels on peut reconnaître les prémices de Prince, du Dancehall ou du Rap triomphant des 80's sans qu'elles aient quoique ce soit à leurs envier. J'ai raflé le disque dans un carton humide à l'occasion d'une brocante automnale, pile en face d'un stand de disques sans que cette mirifique galette ait éveillé le moindre intérêt de quiconque. L'ignorance des autres fait le bonheur des uns.


Hugo Spanky 

Ranx, le sommaire. 

vendredi 11 octobre 2013

SouthLAnD


Un soleil de plomb dont les rayons toxiques vous transpercent le crâne et mettent votre cervelle en ébullition.
Une chaleur suffocante qui vous fait macérer dans un bain de sueur nauséabond et collant comme de la poisse.
Le corps d'un enfant, pissant du sang à gros bouillon, gisant au milieu de la route.
Des sirènes qui hurlent à vous éclater les tympans.
Une jeune femme nue, violée et tabassée à mort, dont le cadavre a été déposé dans une ruelle sinistre et sur lequel des gamins s'amusent à jeter des cailloux.
Le ballet des gyrophares qui accompagne vos gestes d'animal aux aguets.
Une main sanguinolente jetée sur un trottoir comme on se débarrasse d'un mégot de cigarettes.
Le crissement des pneus de voitures qui arrivent à toute blinde.
Un attroupement de personnes hostiles qui vous insultent et ont une furieuse envie de vous larder de coups de couteaux.
Le regard apeuré d'un de vos collègues qui ne sait quelle contenance adopter.
Des poursuites dans des dédales inextricables où la crasse et le danger pullulent.
Votre cœur qui cogne à vous en faire péter la poitrine.
Un bébé abandonné dans un carton miteux devant un parking.
La colère noire qui vous remue les tripes face à un tel spectacle.
Un merdeux plein aux as qui se croit tout permis et tente de vous amadouer.
Un rictus mauvais qui se dessine sur votre visage à l'idée de le remettre à sa place.
Des coups de feu dans un magasin; un illuminé qui fait son jogging la queue à l'air; une pute accroc au crack qui s'accroche à la vitre de votre voiture et vous quémande du fric; une femme en peignoir qui déambule, l'air hagard, un couteau de cuisine à la main; un énergumène qui balancent par poignée entière des billets de banques aux quatre vents: rien de plus normal, c'est dans l'ordre des choses.
Bienvenue à L.A., ville de toutes les turpitudes.
Bienvenue dans le quotidien des flics de cette ville cauchemardesque.
Bienvenue dans la série Southland.


Alors que tout semblait avoir été dit en matière de séries policières avec «The Shield» (une implacable étude d'une âme corrompue) et «The Wire» (le plus magistrale analyse politique qui soit sur le trafic de drogue et ses ramifications), il faudra désormais prendre aussi en compte «Southland», un autre show qui, au terme de ses cinq saisons, aura lui aussi marqué les esprits.

C'est à une femme, Ann Biderman, que l'on doit le création de cette série dont elle a assuré également la production et une partie de la scénarisation. Et la bougresse n'a pas froid aux yeux: elle n'hésite pas à nous enfoncer le tête bien à fond dans les pires travers de la cité des anges si mal nommée. Si vous pensiez trouver votre dose de glamour ici, vous faites fausse route: ça flingue, ça surine, ça viole, ça bastonne, ça beugle à tout bout de champ; c'est l'antichambre de l'enfer qui nous est donnée à contempler et le spectacle à de quoi vous retourner l'estomac.

Tout débute par l'arrivée du bleu Ben Sherman (interprété par le tendron Benjamin McKenzie, LE point faible du casting car à force d'abuser des ses regards en biais on a envie de le baffer!) qui intègre l'unité des patrouilles de L.A. et se voit attribuer l’officier John Cooper comme formateur. Cooper, dont Michael Culditz sublime le rôle, impose une autorité inébranlable rien que par sa seule présence. Ce type semble taillé dans du granit que rien ne peut effriter et c'est à la dure qu'il éduquera le petiot. Quant on se retrouve face à un Cooper, toute envie de lui balancer des salamalecs nous quitte aussitôt et on se comporte comme une pisseuse face à lui.



Vous me direz en réprimant un bâillement, quoi de plus banal et de déjà vu comme situation de départ sauf que la complexité de ces deux personnages fera toute la différence tout au long du show. Alors que l'on pensait que Sherman avait l'étoffe d'un bon flic, au fil de coups de plus en plus pendable, il finira par perdre toute notre sympathie. Tandis que Cooper se révélera une âme brisée qui ne tient que grâce à son job qui pourtant le conduira à sa perte.


On découvre ensuite la brigade antigang au travers du duo formé par le pondéré, Nate Moretta (incarné par Kevin Alejandro) et le chien fou, Sammy Bryant (joué par LA révélation du show, le formidable Shawn Hatosy). Ces deux là s'entendent comme deux larrons en foire et, alors qu'un danger mortel les attend à chaque tournant de rue, ils asticotent des petites frappes belliqueuses comme si de rien n'était. Ils imposent par leur présence farouche sur le terrain le respect à la vermine. Mais à force de tirer le Diable par la queue, ils finiront par en payer chèrement le prix.

Puis il y a Lydia Adams (sous les traits de l'attachante Régina King) , inspecteur de la criminelle, une sacrée bonne femme au caractère bien trempée qui houspille la hiérarchie dès que celle ci lui met des bâtons dans les roues et qui met un point d'honneur à faire son boulot avec un acharnement jamais pris en défaut. Acharnement si poussé que la plupart de ses partenaires finissent par jeter l'éponge et préfèrent la quitter. C'est le genre de personne qui remuera ciel et terre afin de retrouver une gamine disparue même si parfois au bout du chemin la résolution de l'affaire s'avère des plus cruelles.


Plusieurs points contribuent à la force de cette série.
En premier lieu, il y a sa réalisation qui, en digne héritière de l'école «The Shield», nous plonge au cœur de l'action avec ses caméras portées à l'épaule qui renforcent le réalisme des scènes tournées au cœur même de L.A. Si bien que lorsqu'une course poursuite se déroule, on s'attend presque à ce qu'une bastos vienne se loger dans notre salon. Vient ensuite, l'évolution de ses personnages qui déjoue tous les manichéismes et ne cesse de nous surprendre.


Dewey (interprété par un C.Thomas Howell en roue libre), la tête brûlée insupportable des patrouilleurs, qui jure comme un Tony Montana au nez emplit de coke et qui apparaît comme le pire des branleurs, se révélera bien plus profond et touchant que l'on pouvait l'imaginer. Sammy Bryant, rongé par la relation avec sa tarée de femme et plusieurs traumatismes liés à son job, se trouvera à plusieurs reprises au bord du précipice, prêt à commettre l'irréparable et nous mettra le palpitant en surrégime (il faut le voir affronter l'air buté, devant chez eux, de dangereux malfrats qui ne demandent qu'à le trucider ou être prêt à éliminer de sang froid une enflure pour constater à quel point Shawn Hatosy porte ce rôle au pinacle).

John Cooper nous étonnera constamment face à son attitude (il peu aussi bien terrorisé un marmot pour lui enlever l'envie de traîner dans de rues malfamées que faire preuve de compassion envers une pauvre fille se retrouvant sous les roues d'un bus) et sa fin lors de l’ultime épisode du show, nous laminera jusqu'au tréfonds de notre âme.

L'obstination envers et contre tous dans ses enquêtes et la tristesse qui l'accable quand elle est confrontée à des affaires sordides, nous rapproche de Lydia Adams même si pourtant elle n'est pas exempte de reproches (sa façon d'écraser ses partenaires, son dénie de grossesse apportent une ambiguïté bienvenue à ce personnage).
Quant à Ben Sherman, sa trajectoire du parfait petit flic vers quelque chose de bien plus trouble, nous laisse un goût amer dans la bouche.


L'autre point fort de la série est le choix toujours impeccable de ses guest-stars. Nous avons là d'anciennes gloire de «The Wire» qui viennent en quelque sorte adouber ce show: Wood Harris (le retors, Avon Barksdale dans «The Wire») qui vient jouer un soi disant caïd repenti et Jamie Hector (l'effrayant Marlo Stanfield de «The Wire») qui fait office de parrain des A.A. pour John Cooper. Nous avons également Lucy Liu qui fait un come-back fracassant dans le rôle d'une flic qui ne recule devant rien pour assurer sa promotion, ou bien encore Lou Diamond Phillips (le mec de «La Bamba», oui) épatant en flic teigneux.


Mais ce qu'il fait toute la teneur de cette série, c'est bel et bien son étude d'une précision redoutable du comportement humain. Rien ne nous est épargné: toutes les pires exactions que l'on peut administrer à son prochain, tous nos vices les plus destructeurs nous sont jetés en pâture sans les moindre ménagement. C'est l'art de l'homme pour la destruction qui nous est dévoilé dans ses plus cruelles incarnations: dépendance à la drogue ou à l'alcool, prostitution sauvage, meurtres gratuits, viols, enfance bafoué, famille au bord du gouffre, manigances politiques, abus du pouvoir de l'uniforme, corruption, etc. C'est une litanie sans fin d'horreurs qui se répète jour après jour. Que l'on soit simple citoyen ou flic, personne n'est à l’abri d'un dérapage.
Avec «Southland», c'est le quotidien effroyable qui se cache sous les trompeurs oripeaux de L.A. qui nous est crûment exposé. La ville dans laquelle bien des anges viennent se cramer le ailes pour finir le tête explosée sur le bitume.


Harry Max. 

Le sommaire 

lundi 7 octobre 2013

YoKo oNo, TaKe Me to THe LaND oF HeLL


Vouloir décrire un album de Yoko Ono, c'est comme essayer de faire comprendre la règle du hors-jeu à sa femme. Yoko, c'est chromosome 3, une nana qui ferait passer les moins orthodoxes de tous pour des intégristes mormons. Yoko Ono fait le boulot le plus plaisant du monde, elle lâche les chevaux dès qu'elle se cale derrière un micro et gare à ceux qui n'aime pas les vents violents, son dernier album, Take me to the land of hell ne déroge pas à la règle, ça tangue, ça envoûte, ça fracasse pas mal les esgourdes et ça fait un bien fou. Et pas que quand ça s'arrête.


Depuis Rising en 1995, elle aligne les disques sans coup férir, des engins d'une puissance monstrueuse, des sillons gorgés d'un tas de trucs que dégun n'ose y mettre en temps normal. Normal, c'est le mot à zapper quand on aborde le cas Ono. Ses chansons -je vous assure, ça en est- sont comme des brindilles qui virevoltent dans l'air avant de vous tomber sur le râble et là de vous apercevoir que se sont des enclumes. Yoko Ono fait du power funk perché à très haute altitude, façon Public Enemy, c'est la seule comparaison valable. Votre esprit est bringuebalé dans tous les sens, heureusement que vos pieds battent la mesure pour vous rassurer, oui, vous touchez encore le sol.



Take me to the land of hell est son meilleur album depuis Blueprint for a sunrise. Que les Beastie boys, The Roots, Lenny Kravitz ou, évidemment, Sean Lennon soient dans le coup est un détail. Yoko Ono n'a besoin de personne, sur un de ses disques plus aucun d'entre eux ne sonne comme à son habitude. Elle moucroie les influences comme c'était déjà le cas lorsqu'elle enregistrait des merveilles comme Approximately infinite universe, Walking on thin ice, Kiss kiss kiss, ou Season of glass entourée de pointures aux noms ronflants.


Yoko Ono fait du bien, elle est garante que la musique ne sera jamais tout à fait une marchandise comme les autres. Si vous ne voulez pas succomber, soignez votre mépris, il est votre seul rempart.


Pour sa mélancolie combative, pour sa voix qui écorche autant qu'elle effraie, avant d'apaiser une fois la lutte achevée. Pour les frissons que donnent les notes de piano qu'elle choisit, mêlées à celles du violon, pour les rythmes tantôt années folles, ailleurs futuristico-fracassants qu'elle sort de je ne sais où si ce n'est d'elle-même. Voilà, Yoko Ono est elle-même. Elle ne joue pas. Yoko Ono est belle, hypnotisante, glaçante comme un volcan en éruption. Pour un milliard de raisons, certaines d'une mauvaise foi peu commune, j'aime Yoko Ono.

Hugo Spanky