1975, après une décennie de défrichage barbare, le funk se paluche à Philadelphie, se prélasse dans des draps de satin. Le souvenir des plantations, l'âpre odeur du ghetto, la sueur des corps burinés par la malédiction, tout cela n’intéresse plus guère qu'un cinéma naissant dans un underground à l'esthétique crade comme les immeubles délabrés du Bronx.
Les clichés défilent tandis qu'Oncle Sam danse sur Barry White. Désormais adoubés par la jet set, les brothers and sisters délaissent le son des rues, et c'est dans une indifférence totale que James Brown aligne des albums sur l'enfer de l'héroïne ou les ravages d'une fuite en avant occultant une réalité trop noire. Bientôt viendra le temps de Michael Jackson, celui du renoncement, de la négation de la négritude.
Et puisqu'en ces temps de quête d'identité nouvelle, le Funk n'honore plus guère que le luxe au ségrégationnisme hypocritement social mais surtout pas racial du Studio 54, ce sont les blanc-becs qui vont se charger de le parfumer à nouveau aux effluves de stupre et d'argent sale. That's the way ? Unh, hun. Unh, hun.

Vous vous souvenez de Hesch ? Le personnage interprété par Jerry Adler dans Les Soprano. Si c'est le cas, vous avez une bonne définition de Henry Stone Epstein.


Avec KC au chant et aux claviers, et Richard Finch à la basse, le groupe va dévaster les charts, donner un nouveau visage, blanc, pop et cocaïné, au Funk agonisant, et pondre une impressionnante série de hits d'une insurpassable qualité. C'est à leur modèle que Robert Stigwood va reformater les Bee Gees pour leur offrir une seconde carrière en or, strass et paillettes. Ce sont eux aussi qui serviront de référence à Kool and The Gang lorsque le moment de dépasser le "race market" aura sonné. Et, bien sur, KC & The Sunshine Band sera au générique de la B.O de Saturday Night Fever avec l'énormissime et jouissif Boogie shoes. Mais à ce moment là, le groupe aura déjà laissé derrière lui ses plus belles années.
C'est de 1974 à 1976 que KC and The Sunshine Band va scintiller avec le plus d'éclat. En trois albums, ils vont s'inscrire parmi les meilleurs fournisseurs de Funk estampillé 70's. Putain qu'est ce que je les aime ceux là.
Do It Good, leur premier album, pose la donne. Aux antipodes du consternant taux de glucose des pièces montées de Marvin Gaye, Isaac Hayes et Curtis Mayfield, le duo, dorénavant encadré par une grosse poignée de musiciens certifiés black, repart des fondamentaux, concision du format, mélodies accrocheuses, pulsation soutenue, élégance de la mise en plis. Si il n'est pas le mieux garni en hits, ce disque n'en demeure pas moins le plus indispensable de la trilogie royale. Avec des morceaux comme You don't know au menu des festivités, il faut vraiment ne pas aimer taper du pied pour se sevrer de ce bonheur. D'autant que dès la plage suivante, I need a little lovin', ce sont les grandes heures d'Atlantic records que le groupe régénère avec un pep's dont même Wilson Pickett est alors dépourvu. Si Do It Good a raté les charts de peu, ce n'est surement pas par déficit de bonnes chansons. Il ne contient que ça.
Quelques mois plus tard, la formule est au point. Usant d'une stratégie ayant fait ses preuves, le disque suivant se présente comme un premier album et aligne pas moins de trois monumentaux singles, piliers du bon gros beat qui démange les arpions : That's the way (I like it), Get down tonight et ce Boogie shoes que Saturday Night Fever recyclera deux ans plus tard.

Quelques mois plus tard, la formule est au point. Usant d'une stratégie ayant fait ses preuves, le disque suivant se présente comme un premier album et aligne pas moins de trois monumentaux singles, piliers du bon gros beat qui démange les arpions : That's the way (I like it), Get down tonight et ce Boogie shoes que Saturday Night Fever recyclera deux ans plus tard.
Mieux encore, c'est sur ce deuxième album que se déniche I get lifted, monstrueux morceau qui va servir de référence absolue aux titres les plus funky des Rolling Stones. On ne peut aimer les uns sans adorer les autres, jetez vous là dessus et dites moi si je raconte des conneries. Des licks de guitares de Hot stuff aux intonations dont Mick Jagger nous régalera au fil des Miss you, Emotional rescue, Hey Négrita et compagnie, tout est sur ce titre planqué en bout de face B.
Bien rétamé, mais encore debout, le groupe enregistre un troisième album en 1976, Part.3, nouveau carton riche en singles : Shake your booty (shake, shake, shake), I like to do it et I'm your boogie man. Les crocs sont désormais bien limés, le crash est programmé, mais les dents en or brillent comme jamais.


Il va sans dire que si tout ceci vous évoque le scénario de la série Vinyl, n'y voyez surtout aucune coïncidence.