Récemment,
Arte,
a diffusé "Out
of the blue"
de
Denis Hopper,
un film singulier, foutraque, bancal, malsain et, il faut bien le
dire, un peu trop long également (un quart d'heure de moins
aurait été bienvenu). Mais bon, contrairement à tous ces
films sans aspérités dont on nous abreuve régulièrement
depuis plus de vingt années déjà, celui-ci, qui date de 1980,
a le mérite de proposer un oeuvre dérangeante.

Ce
film débute de façon aussi absurde (une fillette, maquillée comme
une pute, assise dans une cabine de camion à côté de son père qui
tient le volant alors qu’il bibine à tout crin ; les deux se
vannant gentiment) que tragique (la scène se conclut par un crash
d’une violence inouïe entre le dit camion et un car de ramassage
scolaire).
Ensuite
nous suivons au plus près les pérégrinations de cette gamine
laissée à l’abandon par ses parents (puisque son père se
retrouve en prison pour cinq ans tandis que sa mère s’envoie des
shoots d’héroïne comme un mouflet avale des bonbecs et trompe
allègrement son mari). Abordant les gens comme on se cogne à un
mur, elle ne vit que dans le conflit et réfute toute forme
d’autorité. Et le retour de son daron, une fois sa peine purgée,
n’arrangera en rien son comportement autodestructeur.
Traversé
de passages hors normes filmés de manière abrupte (le backstage
surréaliste d’un concert punk new-yorkais, la visite d’un repère
de junkies, la destruction dans une décharge, au moyen d’une
pelleteuse, d’une cabane de chef de chantier, les errances
alcoolisées pernicieuses des protagonistes principaux et deux scènes
de morts violentes digne d’une série Z) et ponctué de moments
musicaux inspirés (Elvis donc
et deux morceaux de cette endive de Neil Young
pour une fois intéressants) ce long métrage nous touche justement
parce qu’il nous propose une tranche de vie glauque sans happy end
qui nous change des niaiseries nauséabondes, ou pires faussement
subversives, qui polluent nos écrans.

En définitive, « Out of the blue » fait parti de cette race de films qui tire avantage de ses imperfections qui lui insufflent un supplément d’âme et de vérité. Du cinéma avec un cœur qui vibre donc ; une condition indispensable pour tout film qui se respecte et qui, malheureusement, se fait de plus en plus rare de nos jours.
Harry Max