Hier soir j'ai bien roupillé, dès la moitié de Good morning England (le bateau qui rock en v.o...) un film inspiré de l'histoire de radio caroline qui ne démontre que la médiocrité de la culture pop anglaise et l'ennui profond dans lequel devait baigner le gouvernement de leur majesté pour s’attarder, en 1966, à vouloir censurer un mouvement aussi niais.

Je le dis haut et fort, la France est bel et bien le second pays du Rock'n'Roll talonnée de près par l'Italie, toutes deux à mille coudées au dessus des anglais. Londres n'a pas tué qu'Eddie Cochran, elle a aussi plongé Jerry Lee Lewis dans l'obscurité et qu'on ne vienne pas me dire que ce peuple adepte de la coupe au bol a recueilli Gene Vincent, ils n'ont fait que le ringardiser à grand coup de groupes mièvres et aseptisés.
Pfff, lors de la dernière scène que mes yeux ont captés avant que mes paupières ne les obstruent, le dj de « radio rock » bravait tous les interdits en prononçant le mot fuck à l'antenne comme s'il tranchait le cou à sa reine. Hum, comment leur expliquer qu'en France dès 1952, un chanteur du sud mettait en rimes la sodomie d'un juge par un primate peu regardant ?
La pop anglaise c'est du Rock'n'Roll avec un napperon sur la banane et une théière dans le cul !
Ils ont eu les Who, certes, mais on a eu Aznavour, Dutronc, Gainsbourg, Polnareff, Bashung, Fred Chichin.
Bordel, il serait grand temps que l'on se penche sur notre histoire, que notre lègue soit encensé et que soit passé aux plumes et au goudron les sempiternels pitres rabâchant jusqu'à plus soif que le français ne sonne pas en rythme.
Je me contrefous de Claude François mais je salue la sortie d'un biopic enfin consacré à un gars de (presque) chez nous tout autant que je m'inquiète d'apprendre que Julie Delpy va se pencher sur le cas Joe Strummer. Qu'est ce qu'on peut en avoir à foutre de ce qu'elle pourrait bien nous raconter sur le Clash brailleur ? Confidences saisies sur l'oreiller du copain du cousin de la sœur au voisin de squat de cousin Joe ou révélations sur l'enregistrement de London calling, on s'en fout !
Pondez nous un film sur Dick Rivers ! Je viens de finir Mister D, longue interview en forme de biographie qu'il vient de faire paraître aux éditions Florent Massot, c'est fendard, ça cause de Nice, du Paname d'avant 68, de Toulouse, de ses rêves américains, du temps qui passe, pas besoin de prétexter un anglais pour saisir le parfum du Rock'n'Roll, tout est là.
Et qu'on vienne pas me saouler avec le punk, ce phénomène n'a eu aucune résonance chez nous dans la mesure où la moindre chanson de Michel Sardou le rend aussi inoffensif que ridicule. Là encore seul les anglais pouvaient être choqués par ce qui s'est avéré n'être qu'une tempête dans un verre d'eau.
Le Clash ne me passionna que lorsqu'il traversa l'atlantique soit au moment même où son public anglais le condamna pour traîtrise. Bande de zguègues tellement prisonniers de leur île que rien dans leur musique ou leur cinéma (je ne sais pas s'ils ont des écrivains contemporains mais bon) ne sait exister sans un vernis de nostalgie de plus en plus épais. Jusqu'au début des années 2000 tandis que nous avions l'un des meilleurs Hip Hop du monde, ils en étaient encore à se chercher un palliatif aux Beatles. Elle a bonne mine l'avant garde londonienne.
Pour un David Bowie nourrit aux sonorités du monde, un Jerry Dammers, un Mick Jones aventureux dans l'âme, combien de popeux geignards ressassant encore et toujours les mêmes ritournelles ? Combien de cats stevens, de coldplay, de James Blunt ?

Et d’où ça sort que se saper d'un t.shirt imprimé union jack serait le summum du look pop alors qu'un t.shirt bleu blanc rouge serait immédiatement symbole de nationalisme fascisant ?
Non, vraiment s'il y a une différence de niveau entre eux et nous, elle n'est pas culturelle, elle est structurelle. Alors que depuis le ticket Mitterand/Lang en 1981, on traite par ici les musiciens comme des affiliés à la cotorep en leur refilant subventions et locaux municipaux, en les prenant par la main, les anglo-saxons considèrent les leurs comme des professionnels, du coup c'est que le meilleur gagne (ou le plus corrompu) et que les autres se démerdent. Le tri se fait à la source et pas au robinet.
Ce qui ne veut pas dire que le lavabo est plus étincelant pour autant.
Hugo Spanky