samedi 3 décembre 2011

ReNAULT 12 sUR Le PaRKiNG


Ghislaine était une sacrée salope, la preuve, elle ne voulait coucher avec aucun d'entre nous. 
Ne me demandez pas d'expliquer la psyché d'une bande de mômes de quatorze ans mais c'est comme ça qu'on voyait les choses. 
De toute manière seul les bidasses semblaient trouver grâce à ses yeux. Des cranes rasés au sourire en croche, des tristes ne pensant qu'à se débarrasser au plus vite des saletés de morpions qu'on incarnait à leurs yeux de bœufs, pressés qu'ils étaient d'embarquer ma cousine dans des virées nocturnes à destination desquels ils se précipitaient à la vitesse d'une BMW flambant neuve achetée avec la prime du retour d’Afghanistan. 
Pendant ce temps là, week end ou pas, il ne nous restait plus qu'à se morfondre sur des bancs publics dépourvus de la moindre trace d'amour. Et maudire l'absence de moyen de locomotion.

Puis vint la lumière, ce qu'aucun de nous ne savait cacher derrière notre rancœur illumina le jour où elle nous présenta Kada. L'homme à la Renault 12, ze grand wizard de l'autoradio, le masterman des décibels ! Doté d'une qualité qui fit notre bonheur, l'ouverture d'esprit, cet illustre nouveau venu nous accepta sur la banquette arrière lorsque, le samedi soir arrivé, l'heure venait de prendre la direction du seul endroit que la bande de mioches qu'on était aspirée à découvrir : La boite de nuit !
Bénies soient ces années lointaines où laisser sa carte d'identité sur la table de nuit ne constituait pas une barrière infranchissable au moment de passer la porte d'entrée d'un établissement réservé aux noctambules majeurs. Il suffisait de bomber le torse, d'y croire un peu, de pas s'étouffer en tirant sur sa Marlboro, voire pour les plus juvéniles de prendre soin de se raser malgré l'absence de pilosité ce qui, immanquablement, provoquait la venue incongrue de touffes disparates mais bien utile pour se prétendre, peuchère, un homme !
Au moins le temps du passage au vestiaire, après quoi les lumières tamisées feront le boulot, avant que très vite deux verres de whisky ne nous foutent des cernes à passer pour des prétendant au permis de conduire.

Pff, 14 ans, le bel age.



De cette lointaine époque, j'ai gardé en moi le goût de la Funky Music, même la plus putassière. Que Mama used to say claque dans les tweeters, Superfreak, Get down on it, September, même lorsque les Rockers se tente au Disco, j’approuve, Emotional rescue est mon Stones favoris, Blondes have more fun mon Rod Stewart de référence. Qu'un téméraire ose Just an illusion dans son salon ou son rade et s'en est fini de ma bonne tenue.
Ô mazette, qu'importe si j'ai pas le sens du rythme, si les figures que je m'imagine à la James Brown font plus penser à un épileptique en crise qu'au parrain de la Soul, m'en fous, je me fais plaisir et laisse ricaner les plus complexés que moi.

Le Funk bordel, danse de la solitude joyeuse, célébration du je m'en bats les couilles qu'elle se soit barrée. Le Funk, lot de consolation de celui qui ne cause pas, du quidam que personne n'accoste. La musique de celui qui préfère se défoncer sur la piste plutôt que dans les chiottes.

Tout ça pour dire qu'après des week-end de traque tristouille, de compléments alimentaires bas de gamme en forme de galettes vinyliques sans une once de vitamine à l'intérieur voilà que pas plus tard qu'hier, hallelujah, la lumière fut. Le stroboscope pour être exact. Au détour d'une zone industrielle, dans un obscur Cash Express de banlieue où Milady et ma pomme avions atterri sans réel espoir, bam, le lot qui déchire sa race, une cinquantaine de disques calibrée bitume 70's. Une palanquée de maxi singles, de 33 tours à la pulsation chaude, au réconfort plus efficace qu'un chauffage central.



Rufus Thomas, Ohio Players, Main Ingredient, Curtis Mayfield (non, pas Superfly, celui avec la musique de la pub Dim) Rose Royce II, un album de mixes signé Tom Moulton (CJ & c°) le Got to give it up de Marvin Gaye, Boogie city des Reflections, que des tueries. Et un brin d'étrange aussi, Herbie Mann, un...flûtiste ! Le gars donne dans le soyeux, une mise en bouche avant de se coller sous la couette, du Memphis sound à vent avec Donald Dunn et Al Jackson à la rythmique et Duane Allman aux riffs cristallins. 
Bouh, un truc à vous réconcilier avec les cours de musique de la sixième.


Je vais pas faire dans l'érudit, juste envie de donner envie. Pendant un moment je vais me tenir heureux, me jouer tout ça jusqu'à m'en être nourris. Et passer un salut à Kada, où qu'il soit, lui glisser un merci pour m'avoir mis sur la piste avec ses innombrables cassettes.
Je vais aussi regretter un peu plus encore la connerie ambiante, la monotonie, l'uniformité des soirées contemporaines dans des bars qui ne savent plus qu'aligner Rock Garage pour les uns, R&B lyophilisé pour les autres. Bande de sinistres crétins ! Sourdingues paralytiques que vous êtes !



Rah, ça y est je m'emporte, il est temps pour moi de poser sur la feutrine le Different strokes des Nite-Liters ou ce I've got so much to give du big Barry. Mieux encore Euphrates river de Main Ingredient
Putain, j'en reviens pas !

                                                                            
                                                                 Hugo Spanky

3 commentaires:

  1. C'est marrant, mon père l'avait ce disque d'Herbie Mann et je me le suis coltiné un certain nombre de fois au milieu des années 70, quand on habitait à Abidjan, Côte d'Ivoire. (l'ambiance locale était vraiment funky pour le coup)
    Une pochette comme ça, ça s'oublie pas. Je n'ai plus jamais revu ce disque jusqu'à aujourd'hui. Par contre, j'en ai pas spécialement un bon souvenir : une musique d'ascenseur avec de la flûte. Faudrait que je ré-écoute.

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  2. putain hugo quand tu racontes tes souvenirs quel bond en arrière quel pied aussi!!aujourd'hui même a nos ages ils nous casse les bonbons dans les bars c'est dire,en tout cas vive le funk for always ,dja

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  3. T'as pas tort Serge, c'est vrai que ça sonne un peu musique d’ascenseur mais c'est bien aussi parfois, en appréciant un Martini. Toujours est-il que nos pères sont des bons, le mien jouait Melting pot de Booker T chaque dimanche matin, la même rythmique que sur le Herbie Mann. Mais tu sais tout ça.

    Dja, merci vieux frère. Tu viens groover dans mon salon quand tu veux, on travaillera nos pas de danse, depuis le concert de Kool & the gang j'ai pas eu l'occasion de m’exercer.

    Hugo

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