dimanche 7 octobre 2012

cHaRLeS BuKOwSKi

Jamais à un paradoxe près, Hugo Spanky se souvient comment un livre de Charles Bukowski a influencé sa vie de manière positive...


Mon premier contact avec Bukowski, je crois que c'était à la fin des 80's via le splendide film de Barbet Schroeder, Barfly. Tiré d'un scénar du Buk, ce film avec Mickey Rourke allait foutrement nous marquer, toute la bande de l'époque. Barfly, ce sera notre expression préférée les lendemains de grosse charge, "putain, hier j'étais barfly complet" qu'on se disait comme résumé. Faut dire que ça limitait les dégâts vu qu'on se rappelait pas franchement de grand chose, souvent. C'est même devenu le nom de notre groupe.


Les bouquins sont venus juste après. J'avais 20 balais et j'étais déjà cramé.
Certains lieux concentrent une sacrée faune sur un bien faible kilométrage. On pouvait pas se rater, gitans, arabes, légionnaires, parachutistes, bûcherons, speedfreak des montagnes, sympathisants du FN armés ras la gueule, anarchistes dépressifs, ex-(et futur) taulards, un possédé par Satan...et nous, les Rockers, dans lesquels se regroupait une partie de tous ceux là. Détonnant cocktail pour les nuits au(x) comptoir(s), qui finissaient invariablement dans des situations improbables. Dans le plus confortable des cas sur un canapé, ou plus souvent la tronche sur le volant, entassés à 5 dans ma Renault 8. On se croyait invincibles, forts de notre foi en l'électricité à haute tension et de notre soif de vivre un maximum de choses, les concerts, les bars de jobastres, des endroits qui aujourd'hui ne survivraient pas à la bienséance normalisée, les appartements en vrac. On était con. Et la connerie est addictive. De col relevé et tête haute, c'est devenu je baisse les yeux quand je croise ma mère. C'est devenu entourloupes et embrouilles à tout va, entre potes, comme si on était soudain trop nombreux sur un même bifteck. Des cons, j'vous dis.


 
Lorsque j'ai entamé Au Sud De Nulle Part, le bouquin de Bukowski , j'étais dans un état de parano complet. Faut dire qu'il y avait de quoi, entre l'un qui se fait descendre comme un clebs au pied de sa cité et quelques autres histoires qui ont le sommeil profond et c'est très bien ainsi.



Alors ouais, parano totale, pour le gars Spanky. Pourtant pas l'ombre d'un regret, pas même le boulot (chiant) le jour et encore moins les week ends non-stop action. Je remercie les cieux d'avoir connu ça. Des concerts à la pelle dans le moindre rade du moindre bled, des affiches de dingues à Toulouse, Montpellier, du bordel dans tout l'immeuble qui abritait mon premier appart, loué à 18 balais parce que la famille, n'est ce pas, ça encombre. Et au final: l'addition ! Vous voulez un café avec ? Lessivé, laminé, blasé. Fin des illusions, juste la haine d'un endroit, d'un milieu soudain devenu trop glauque. 

Les ficelles m'ont sautées aux yeux, tout ça c'était de la branlette, de l'amitié de circonstance. Y avait du sentiment nulle part, je me sentais craint, envié, respecté, désiré, mais pas aimé. A coup sûr le bon moment pour reprendre son souffle, ouvrir un livre et découvrir notre homme Bukowski (vous voyez que je perds pas le fil). 
 

 


Autant le dire de suite, Bukowski peut être chiant comme la mort, Souvenirs d'un pas grand chose se répète et lasse,  démontre que le Buk a besoin de son double pour ouvrir la vanne aux délires. Sans Hank Chinaski, Charles a du mal à tout déballer, on sent bien que ça touche trop près de la moelle. Mais à côté de ça, y a Factotum, Le Postier, Women, Hollywood, Les Contes de la folie ordinaire (et sa suite), Je T'Aime Albert, Pulp et ce fameux Au Sud De Nulle Part. Y a une œuvre, une vision de la nature humaine que dégun n'avait encore à ce point approché. Ou du moins pas en le racontant comme ça, sans sublimer les choses. Bukowski ne se donne pas le beau rôle, ne se cherche pas des raisons, il écrit, finalement, un peu, comme on le fait de nos jours avec un blog. Par spasme, sans chronologie, juste pour exprimer le sentiment du moment présent. Bukowski n'a jamais écrit son grand roman, le gars n'est pas Hemingway, non, Buk fait dans la brève la plupart du temps et quand il en va autrement ses bouquins m'emmerdent. Il le reconnaissait volontiers lui même, il n'avait pas le talent de narrateur de John Fante.
Et pourtant, il m'a servi de bouée, comme se raccrocher à un rocher glissant alors que la marée vous emporte.


A ce moment là, j'ai passé trois mois à lire Buk', à ne faire que ça quasiment, mon éducation, tout seul comme un gland, de retour chez mes parents. Bande son exclusive, Hank Williams et rien d'autre. Le Hillbilly fellow et un teuton bouracho comme thérapie, fallait être tordu pour se lancer là dedans. Trois mois à décrasser la machine aux bons soins de maman Spanky, manière d'être en état de mettre un terme, retrouver un rythme de vie qui ressemble à quelque chose. J'étais détraqué, le mécanisme en charpie, les rouages tous niqués. C'est en lisant Au Sud De Nulle Part que je m'en suis rendu compte, il a fallu ça pour que je percute, pour que j'arrête de voir la loose comme une notion romantique. Le pire peut arriver, le pire arrive toujours, en fait. 
 

Le vieux Buk' m'a ouvert les yeux sur ce que mon père n'avait, pourtant, eu de cesse de me répéter, la masse est conne, seul l'individu compte, plus tu rassembles de monde et moins ça cogite. Chacun se doit de développer sa propre vision des choses, exprimer son propre décalage. Merde à la pensée unique, merde aux communautés d'esprit, de corps ou de tout ce que vous voudrez. Merde aux grands idéaux, aux grandes luttes communes, tout ça n'est, finalement, qu'un prétexte pour ne rien changer avec l'excuse d'attendre d'être rejoint par le plus grand nombre. Les cris fédérateurs me font tourner le dos. La révolution, c'est à chacun de la faire dans sa propre vie, principalement en s'exprimant selon ses convictions même, et surtout, au milieu d'une assemblée hostile.



Voilà ce qui transpire des histoires tordues et abracadabrantes de Bukowski, de son diable en cage, de ce type en fin de course qui tombe amoureux d'un mannequin en plastique mais ne peut s'empêcher d'y taper dessus, de tous ces personnages qui commencent seuls, finissent seuls et qui, dans le cas contraire, ne connaissent que déchéance.

Vous l'aurez pigé, c'est pas très social comme histoire mais de toute façon, je n'ai jamais cru en la solidarité. Quelques temps après avoir lu Au sud de nulle part, j'allais me retrouver avec une artère ouverte à 4 plombes du matin, sur une route paumée, avec plus de sang sur les épaules de mon cuir que ce qui me restait dans le corps, j'ai compté 5 voitures qui sont passées sans s'arrêter. Alors venez pas me causer d'entre-aide, venez pas me charrier avec la nature humaine. Bukowski aide à se sentir moins monstrueux lorsque l'on a le cœur déconnecté de la tête.
Lisez Au Sud De Nulle Part, si ce bouquin ne vous rend pas meilleurs, il ne vous rendra pas pire.


Bukowski est un écrivain important qui n'a jamais rien écrit d'important, la gueule dans le caniveau, dans la pisse des plus malins que lui, dans les merdes de leurs clébards, il s'est contenté de survivre et de nous le faire savoir. On a tous connu des gars terriblement plus malins que nous, mieux calibrés pour la réussite, mieux armés socialement comme disent les conseillers d'orientation. Et puis quoi ? On est quand même là au bout du compte.

Bukowski n'a rien dit d'essentiel, mais ce qu'il a fait est vital, il nous a rendu visibles et incontournables aux yeux d'un monde qui se serait bien passé d'avoir nos tronches à la une, il a fait que ceux qui ne trouvent jamais l'heure d'aller se pieuter se sachent moins seuls. La vie n'a pas de règle, seulement les barrières que l'on se colle sur le cul pour se sentir dans la norme. Pour s'intégrer. Depuis quand on est plus heureux en étant moins seul ? 
Foutaises. 
 
 
Ouais, j'ai lu Bukowski y a un bail et après ça s'en était fini des bandes, des potes par centaine, des groupes de rock'n'roll de mes deux. J'ai pigé que pour ne pas reprocher une décision à qui que ce soit, il fallait la prendre seul. Et puis je me suis barré, et comme j'étais nulle part, je suis parti au sud.

Hugo Spanky
 

 

2 commentaires:

  1. j ai bien aime , merci

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  2. nous sommes tous les deux un peu des BUKOSWKI:sexe,alcool et littérature,le rock and roll en plus mon hugo!!!!bises a vous deux dja

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