Les productions françaises progressent indéniablement niveau séries et téléfilms, ça c'est dit. France Télé et TF1 se refilent un bourbier d'acteurs et actrices impeccables, de seconde zone, on ne fera cracher le prix d'un ticket de cinéma à personne pour aucun d'eux, mais ils sont impeccables. J'ai même mes préférences. Dans le même temps, le cinéma devient pathétique. Les castings sont soit flagorneurs envers de vieille peau lessivée (Isabelle Adjani) que des producteurs essorent en les acoquinant avec de jeune raté (Pierre Niney) pour un résultat ridicule (Mascarade), soit révolutionnaires de salon en tentant de relancer des formules qui ont fait leurs preuves il y a 30 ans. Les succès de conneries monumentales comme Anatomie d'une chute ou Yannick en sont de bons exemples. Acteur tête à claques, contexte post-branchouille, scénario branlette. On m'explique que c'est voulu pour favoriser l'improvisation. Au final, un réalisateur de kermesse pique la trame d'Un Après Midi de Chien, colle ça dans un théatre et affuble l'ensemble d'acteurs dont j'ai vu défiler toute la carrière en l'espace de 5mns. Je vous le dis tout net, Raphaël Quenard est, au mieux, le nouveau Paul Préboist.
Quelques noms m'ont, un temps lointain, donné à espérer, tous se sont vautrés. Hazanavicius consacre tellement d'énergie à faire oublier OSS117 et The Artist qu'il perd tout ce pour quoi il était doué. Une cure de modestie lui serait profitable. Quant à Jean Dujardin, il semble que personne ne sâche quoi en faire. Yvan Attal persiste à réaliser des Super 8 familliaux qui n'interessent que lui et Guillaume Canet s'est fait laminer par le système. Son cas est d'autant plus regrettable qu'il avait du potentiel des deux côtés de la caméra. Ok, c'était pas le Cassavetes français, mais il y travaillait. Devenu en deux films girondins la coqueluche du métier, au point d'en être un brin agaçant, Rock'n'Roll l'a balancé cul par dessus tête. En mettant de la sorte un miroir face à ceux là même qui l'avaient créé, Guillaume Canet dressa le portrait peu flatteur d'une machine à fabriquer des monstres. Mordre la main nourricière impose un succès commercial sans contexte, seule façon de rendre l'insulte désinvolte. Pas de bol, tout en étant son meilleur film, Rock'n'Roll s'est mangé le mur. Humour acide, sujet provocateur, interprétations décapantes et longueur excessive ont dérouté un public qui, jusque là, aimait à se reconnaitre dans les tranches de vie niaises et nostalgiques dont il s'était fait le spécialiste. Comme disait l'autre, c'est dur d'être aimé par des cons. Après quoi se voir offrir le renouvellement de la franchise Astérix était le baiser de la mort.
Récemment, on l'a regardé dans Pacifiction : Tourment sur les îles. Dites moi quel autre acteur ouvre un scénario avec un titre pareil ? Je suis certain que lui non plus ne l'a pas ouvert. J'avais vu Amants quelques jours plus tôt, je suis incapable de vous dire la moindre nuance de jeu entre les deux films. Millionnaire cocu ou haut dignitaire de l'Etat, c'est kif kif bourricot. Je suis tout aussi incapable de vous dire lequel des deux films est pire que l'autre. Il se peut que les deux soient bons. Démerdez-vous, en ce qui me concerne un film avec Benoit Magimel est au delà de toute évaluation. L'important est ailleurs. Pour vous donner une idée, Pacifiction : Tourment sur les îles, c'est Coup de Torchon revisité par un réalisateur espagnol à la ramasse, ça dure trois plombes, j'ai fait une sieste au milieu, à mon réveil j'étais toujours dans le coup. Un chef d'oeuvre, à mon avis. Le cadrage met Benoit Magimel en valeur, les décors lui vont bien au teint, c'est parfait. Il est droit comme un i, se vautre dans la saloperie, met à l'amende ceux qui débordent de trop, il règne sur son île comme sur le film. A tel point que les seconds rôles sont inexistants, il a fallu que je vois son nom au générique pour m'apercevoir que Sergi Lopez était du lot. Benoit Magimel est éblouissant à ce point là.
Hugo Spanky